Interview
 
Décembre 2007

Fabrice Delloye : "Nicolas Sarkozy va au-delà de ce que les Farc pouvaient espérer"

Une semaine après la diffusion d'une vidéo apportant une preuve de vie d'Ingrid Betancourt, Nicolas Sarkozy s'est adressé directement au chef des Farc dans un message télévisé. Les réactions de Fabrice Delloye, ex-mari de l'otage Franco-Colombienne.
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Fabrice Delloye (à gauche) est l'ex-mari d'Ingrid Betancourt et le père de Mélanie et Lorenzo (à droite). Diplomate, il a rejoint l'ambassade de France du Pérou en novembre 2007, en tant qu'attaché culturel. © German Guzman Nogales
 

Nicolas Sarkozy a adressé un message télévisé au chef des Farc, Manuel Marulanda, ainsi qu'un mot d'encouragement aux otages à la radio. Que pensez-vous de ces deux interventions ?

Ma première réaction, c'est d'abord une immense reconnaissance pour ce qu'a fait le président de la République. C'est une première : jamais un chef d'Etat étranger ne s'était adressé directement aux Farc. C'est aussi la première fois qu'un président s'adresse à Ingrid et aux autres otages avec un tel message d'espérance. Il leur a dit : "je suis avec vous, et je vais tout faire pour vous sauver, avec Alvaro Uribe, avec Hugo Chavez, avec George Bush". De cette manière, il montre aux Farc et à leurs otages la coopération internationale qui se met en place, et cette volonté de tout faire pour les sortir de là.

Que peuvent changer ces messages à la position des Farc ?

Au niveau diplomatique, jamais un chef de l'Etat ne s'était adressé de manière aussi solenelle au chef des Farc. Nicolas Sarkozy a été clair : "je ne partage pas vos idées et vos méthodes, mais je vous demande de faire un geste significatif et humanitaire. Il ne faut pas laisser mourir les otages. Je mettrai tout en œuvre pour sortir la Colombie de la guerre." C'est une ouverture diplomatique sans précédent ! En s'adressant de cette manière à Manuel Marulanda, il lui montre une certaine forme de reconnaissance tout en lui faisant comprendre qu'il a une lourde responsabilité. Il lui dit "faites attention", mais aussi "libérez Ingrid Betancourt, et je serais là pour sortir la Colombie de la guerre".

"Ce message est probablement la dernière chance pour les Farc de passer à la postérité."

Diplomatiquement, il lui offre une nouvelle représentation sur la scène internationale. Cet appui et cet appel au dialogue d'un pays étranger comme la France est important pour trouver un accord de paix. Cela va au-delà de ce que les Farc pouvaient espérer. S'ils ne le comprennent pas, ils auront une lourde responsabilité dans cet échec : la mort d'Ingrid Betancourt qui est à bout de souffle. Ce serait une calamité pour Alvaro Uribe qui a toujours empêché cette ouverture, et une faute irrévocable pour les Farc. Ce message est probablement leur dernière chance de passer à la postérité.


Qu'attendez-vous désormais de Nicolas Sarkozy ?

Il faut d'abord attendre la réponse des Farc et les négociations avec la communauté internationale. Nicolas Sarkozy tente de recréer un lien entre George Bush, Hugo Chavez et Alvaro Uribe. Ce qu'il fait est déjà très positif. Il va faire en sorte que les Farc acceptent de négocier avec les autorités françaises en échange d'un appui de la France à l'international.


Pensez-vous que l'intervention d'Hugo Chavez ces dernières semaines a été utile ? Souhaitez-vous qu'il reprenne sa médiation ?

 
Et aussi
 
 
 

Hugo Chavez reste incontournable. C'est lui qui a permis d'avoir des preuves de vie d'Ingrid. Quand Nicolas Sarkozy a délivré son message aux otages, il a pris soin de réintégrer M. Chavez, de l'inclure dans le processus. Hugo Chavez a été écarté par le président colombien sans que Nicolas Sarkozy n'ait été averti. Les derniers événements le montrent : M. Uribe doit comprendre qu'aucun espace de discussion n'est possible sans contrepartie. Ca ne s'est jamais vu des gens qui peuvent libérer des otages en imposant leurs conditions ! Je crois que M. Uribe a un passé de psychologue. En la matière, il devrait, je pense, reprendre des cours. Grâce à Hugo Chavez et à Nicolas Sarkozy, il y avait une ouverture favorable. Elle aurait pu donner des résultats si Alvaro Uribe n'avait pas bloqué la situation pour des raisons épidermiques, de politique interne, et pour son électorat le plus conservateur. Par ailleurs, il y a beaucoup d'échanges économiques entre la Colombie et le Vénézuela. Ces deux pays ont besoin de dialoguer.


Quelle a été votre réaction après l'interception, il y a une semaine, des preuves de vie d'Ingrid Betancourt par l'armée colombienne ?

Le fait de découvrir qu'Ingrid était vivante, ça a été formidable. Mais son état de santé nous a tous beaucoup inquiétés. Ce qu'elle a écrit dans la lettre adressée à toute la famille démontre son courage, sa dignité. Mais c'est un testament... Plutôt qu'un testament, j'aurais préféré que ce soit une feuille de vie. Elle doit retrouver ses enfants et jouer le rôle qu'elle mérite dans le futur de la Colombie.


» Le Comité de soutien à Ingrid Betancourt appelle les Français à matérialiser leur engagement en signant la pétition demandant la libération d'Ingrid Betancourt sur le site internet : www.agirpouringrid.com


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