Emmanuelle Cosse : une ancienne punk au gouvernement (BIO)

Emmanuelle Cosse : une ancienne punk au gouvernement (BIO) EMMANUELLE COSSE BIOGRAPHIE - Emmanuelle Cosse a été nommée ce jeudi ministre du Logement et de l'Habitat durable...

[Mis à jour le 11 février 2015 à 17h58] Cosse. Emmanuelle Cosse. Voilà l'un des noms les plus présents dans les rumeurs qui se succèdent autour du remaniement ministériel en ce début d'année 2016. Celle qui était jusqu'ici secrétaire nationale d'EELV a finalement intégré le gouvernement ce jeudi, comme ministre du Logement et de l'Habitat durable. Une option qui a mis le parti écolo en ébullition alors même qu'il ne s'agissait que d'une hypothèse. Car les militants sont toujours divisés sur la participation de leur formation politique au gouvernement Valls. C'est à eux qu'Emmanuelle Cosse s'est d'abord adressé, en leur envoyant un mail annonçant qu'elle met un terme "aujourd'hui à (s)on mandat de secrétaire nationale" d'EELV. "Le président de la république m'a proposé de rentrer au gouvernement et j'ai accepté sa proposition. Je sais que cette décision suscite questionnements, rejets des uns, soutiens d'autres, doutes et interrogations. Je respecte tout cela", explique-t-elle, ajoutant : "Ce choix repose sur une opportunité à se saisir de leviers d'action qui, face aux urgences sociales et environnementales, me paraît prévaloir sur la somme des désaccords".

L'expérience de Cécile Duflot (au Logement elle-aussi) et de Pascal Canfin au gouvernement, entre mai 2012 et avril 2014, a laissé des traces et un retour des Verts dans l'exécutif ne fait pas l'unanimité. Emmanuelle Cosse pourrait cependant avoir joué une carte politique autant que personnelle. Politique car elle a sans doute monnayé son ralliement au nouveau gouvernement contre des engagements concrets de l'exécutif sur les dossiers de Fessenheim ou de l'aéroport Notre-Dame-des-Landes. Personnelle car elle reste depuis des années dans l'ombre des Noël Mamère et autres Cécile Duflot, principales incarnations de l'écologie politique dans l'opinion.

Pour beaucoup de Français, le mystère entoure encore la personnalité d'Emmanuelle Cosse. Qui est cette écolo qui dirige le navire vert depuis novembre 2013 et a affronté déjà bien des tempêtes à la barre ? Dans sa biographie, Emmanuelle Cosse est présentée comme une femme politique ayant commencé à militer au sein de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne dès 1990. Mais ce que ne disent pas la majorité de ces bios, c'est que dans sa jeunesse, Emmanuelle Cosse, fille de "kinés parisiens tendance Mao" selon l'Obs, a d'abord été... punk ! Un premier positionnement radical qu'elle a déjà été amenée à commenter, avouant avoir suivi une "mode", sans tomber dans ses excès. Pas de drogue ou d'autodestruction chez elle à l'époque. Juste une ado qui "écoutait Noir Désir" et "avait des Doc Martins"…

PHOTO - Sur Twitter de vieilles photos de la  nouvelle ministre, en pleine période "punk", circulent en marge des rumeurs sur le remaniement.

Autres facettes  de ce profil, tout aussi personnelles et souvent utilisées elles-aussi pour expliquer sa ténacité : Emmanuelle Cosse serait une amoureuse de rugby et la maman de jumeaux. Quel rapport nous direz-vous ? L'apprentissage de la patience, de l'abnégation et du sens du collectif, des qualités qui lui ont été nécessaires pour diriger un parti comme les Verts sans se fâcher avec tout le monde. Et croyez-le ou non, "Emma" ne s'y est pas fait que des ennemis. En juin 2015, elle s'est mariée avec l'un de ses membres, le député de Paris Denis Baupin, vice-président de l'Assemblée nationale...

EN VIDEO - Avant les régionales de décembre 2015, Emmanuelle Cosse assurait que son parti allait bien, se vantant d'avoir pu présenter des listes dans 12 régions.

"Emmanuelle Cosse assure que son parti va bien"

Emmanuelle Cosse : une hétéro dans le combat LGBT

Le parcours professionnel de la ministre diu Logement et de l'Habitat durable commence en 1992. Emmanuelle Cosse rejoint Act Up-Paris, association de lutte contre le sida. Elle en devient la présidente de 1999 à 2001, la première hétérosexuelle et séronégative à ce poste. Elle y apprendra le militantisme et les actions coup de poing. En 1997, elle obtient son diplôme d'études approfondies de droit public en économie. Elle enseigne alors cette matière à la faculté de droit Paris XII – Val de Marne. En 2002, Emmanuelle Cosse entre au journal Têtu puis chez Regards, où elle tient une chronique. Elle devient la rédactrice en chef du journal quelques années plus tard.

C'est en 2010 qu'Emmanuelle Cosse apparaît pour la première fois sur une liste Europe Ecologie pour les élections régionales d'Île-de-France. Proche de Cécile Duflot, elle devient ensuite la 8e vice-présidente du conseil régional de sa région, chargée du logement, de l'habitat, du renouvellement urbain et de l'action foncière. Une expérience qui aura certainement pesé dans l'esprit de Manuel Valls et de François Hollande avant de la nommer au gouvernement. Lorsque le congrès du parti EELV se déroule à Caen le 30 novembre 2013, c'est elle qui est élue nouvelle secrétaire nationale avec 55 % des voix en sa faveur. On accuse alors Cécile Duflot et sa "firme" d'avoir fait main basse sur la formation lancée en 2009 par Daniel Cohn-Bendit et ouverte à l'origine sur d'autres composantes de l'écologie politique.

EELV : l'énigme Emmanuelle Cosse

Mais depuis, Emmanuelle Cosse n'a eu de cesse de ménager la chèvre et le chou pour tenter de maintenir un semblant de cohésion chez Europe Ecologie-Les Verts, sans trop froisser le PS. ne jamais insulter l'avenir. Lorsque Cécile Duflot et Pascal Canfin claquent la porte du gouvernement après les municipales et la nomination de Manuel Valls comme Premier ministre, elle soutient leur choix mais fait encore partie des délégations d'EELV qui gardent contact avec Matignon. Lorsque des écologistes (Placé, de Rugy, Pompili, Baupin) montrent leurs vélléités à retourner au gouvernement, Emmanuelle Cosse alterne entre gros yeux et dialogue. Elle ne parviendra pas pour autant à empêcher l'hémorragie, quand plusieurs de ces élus clés claqueront la porte du parti pour créer leurs propres formations, alliées a priori du PS et du gouvernement. Enfin, elle restera dans ce même entre-deux quand Cécile Duflot et une partie d'EELV tentera un rapprochement avec Jean-Luc Mélenchon lors des départementales et des régionales 2015. En Ile-de-France, Emmanuelle Cosse sera quant à elle à la tête d'une liste EELV indépendante au 1er tour, mais rejoindra la liste socialiste de Claude Bartolone au second...

Pour toutes ces raisons, difficile aujourd'hui de présenter encore Emmanuelle Cosse comme la marionnette de Cécile Duflot à la tête d'EELV. Difficile aussi d'affirmer que la patronne d'EELV s'est totalement libérée des contradictions de sa famille politique en arrivant au gouvernement. Désormais nommée, son parti, échaudé par les promesses non tenues de 2012 et toujours rétif à toute forme d'alliance avec François Hollande, risque-t-il d'imploser ? Réponse dans les jours ou les semaines qui viennent.

Photo : WITT/SIPA