Wauquiez : Pécresse, Juppé et Sarkozy furax... mais pas les militants

Wauquiez : Pécresse, Juppé et Sarkozy furax... mais pas les militants WAUQUIEZ - La droite est-elle en train de se déchirer ? Les propos de Laurent Wauquiez tenus à l'EM Lyon, puis ses explications de texte, ont semé la zizanie dans sa famille politique. Mais les sympathisants LR ne lui en tiennent pas rigueur.

  • Laurent Wauquiez reste malgré lui empêtré dans la polémique depuis que Quotidien a diffusé un enregistrement d'une conférence tenue devant les étudiants de l'EM Lyon. Plusieurs personnalités du parti LR ont claqué la porte.
  • Valérie Pécresse a réagi aux propos de Laurent Wauquiez sur RTL : "Il y a deux droites, il y a une droite des décibels et une droite de la crédibilité", a-t-elle durement jugé.
  • Alain Juppé serait, en privé, très sévère également. "Quel con !", aurait-il lâché à son entourage à propos du patron de la droite.
  • Néanmoins, 82% des sympathisants de droite pensent que Laurent Wauquiez a eu raison d'assumer ses propos, selon un sondage publié par BFMTV. 

22/02/18 - 18:00 - L'enregistrement des déclarations de Wauquiez est-il illégal ?

FIN DU DIRECT - La plainte de Laurent Wauquiez a-t-il des chances d'aboutir à une condamnation de Quotidien ? Pour Delphine Meillet, avocate au barreau de Paris, interrogée par Le Parisien, il est difficile de considérer que les enregistrements faits à l'insu de l'homme politique sont illégaux. "Il a tenu des propos qui sont considérés, selon la jurisprudence, d''intérêt général'". "A partir du moment où vous tenez des propos d'intérêt général et que vous êtes vous-même une personne publique, il est légal de diffuser ces propos". La Cour de cassation a d'ailleurs tranché la question de l'enregistrement effectué en secret : si l'intérêt général est démontré, la méthode en cas d'espèce n'est pas condamnable.

22/02/18 - 11:57 - "Mais quel con !" : la réaction de Juppé aux propos de Wauquiez

"Mais quel con !". Voilà, selon Le Parisien, les mots qu'auraient eu Alain Juppé après avoir découvert les déclarations de Laurent Wauquiez à son sujet devant les étudiants de l’école de commerce EM Lyon. Pour rappel, le patron des Républicains a ouvertement critiqué la gestion du maire de Bordeaux qui aurait "totalement cramé la caisse", "fait exploser les impôts, la dépense publique et l’endettement".

21/02/18 - 20:30 - La réponse de Quotidien à Laurent Wauquiez

Entre Laurent Wauquiez et Quotidien, l'émission de Yann Barthès, les relations sont pour le moins tendues. "Les méthodes auxquelles s’est livré un journaliste sont des méthodes de voyou", a estimé le président de LR hier soir, qui a ajouté qu'il allait porter plainte et saisir le CSA. "C’est une très bonne chose car on préfère nettement être jugé par la justice que par Laurent Wauquiez, ça s’appelle l’état de droit", a répondu Yann Barthès à l'antenne, ajoutant : "Quotidien a toujours été respectueux de la vie privée sauf que, dans ce cas, il s’agit d’une parole publique, d’un homme public, face à un public et qui évoquait un sujet politique. S’il y a un procès, il va être passionnant car ce sont des sujets passionnants".

21/02/18 - 20:00 - "Une grosse merde" : selon Wauquiez, Sarkozy n'a pas été aussi vulgaire

Le patron de la droite a-t-il été copieusement insulté par l'ancien président au téléphone ? "Il était mécontent et je le comprends. Mais ceux qui connaissent Nicolas Sarkozy savent bien que ce n'est pas sa façon de s'exprimer", a fait savoir Laurent Wauquiez au Figaro ce mercredi 21 février. Le Canard Enchaîné indique dans son édition du jour que l'ancien chef de l'Etat a glissé ces mots doux : "Beaucoup de monde me disait que tu n'étais qu'une grosse merde. Aujourd'hui je n'ai d'autre choix que de penser comme eux". L'entourage de Nicolas Sarkozy est en tout cas clair : "La conversation a été très vive" et "la plaie pourrait laisser quelques trace", indique-t-il au Figaro.

Les explications de Laurent Wauquiez

Pour tenter d'éteindre l'incendie, il s'est rendu hier soir sur le plateau de BFMTV, donnant quelques explications sur les propos enregistrés à son insu à l'EM Lyon. Laurent Wauquiez a fait simple : offensif, déterminé, il est resté dans ses bottes : il a attaqué le système médiatique pour se défendre, et assuré qu'il assumait tous ses propos, sauf ceux tenus au sujet de Nicolas Sarkozy. "Ce message, c'est le seul que je regrette. J'en ai présenté mes excuses à Nicolas Sarkozy. Parce qu'au-delà de la politique, j'ai une profonde estime pour la personne (...) Ce que j'ai expliqué à ce moment-là c'était une rumeur, je n'ai jamais pensé que Nicolas Sarkozy mettait ses ministres sur écoute", a-t-il expliqué.

Laurent Wauquiez a fait savoir qu'il ne présenterait pas d'excuses : "Je n'ai pas insulté les Français, je ne suis pas Emmanuel Macron. Dans mes propos il n'y avait pas une once de mépris", s'est-il justifié, mais a reconnu une "erreur" : "Je n'ai pas mesuré le degré de violence et de manipulation auquel certains journalistes sont prêts à se livrer. Je ne m'y tromperai plus. [...] Je sors de cette épreuve plus déterminé que jamais à défendre mes convictions et ma liberté de parole. Je demande aux Français : est-ce que ce qui vous préoccupe, c'est les propos que j'ai pu tenir, ou le président de la République qui baisse le pouvoir d'achat ?".

La violente réaction de Nicolas Sarkozy 

Nicolas Sarkozy, lui, a laissé fuiter dans le Canard Enchaîné la teneur de la conversation qu'il a eue avec Laurent Wauquiez. "Je l'ai pulvérisé. Il m'a présenté ses excuses. Il était piteux. Ensuite, je ne l'ai pas laissé en placer une", aurait-il dit à son entourage, ravi de transmettre le tout au Canard. L'ancien chef de l'Etat aurait parlé très franchement au nouveau patron de la droite, au sujet de sa naïveté : "Il paraît que tu as des ambitions présidentielles. Si j'étais toi, je trouverais un autre métier". Mais il se serait aussi placé sur le terrain de l'invective, pour lui rendre la pareille : "Beaucoup de monde me disait que tu n'étais qu'une grosse merde. Aujourd'hui, je n'ai d'autre choix que de penser comme eux", aurait-il asséné. Nicolas Sarkozy aurait aussi défendu le ministre des comptes publics, son ancien porte-parole : "Tu prétends que Darmanin n'a plus d'avenir politique, mais, toi, quand je vois que, sitôt à la tête du parti, tu commences comme ça, je me dis que tu n'iras pas loin. L'électorat des Républicains va t'en vouloir, et, sans lui, tu ne pèses pas grand-chose".

Laurent Wauquiez, un "parlé vrai" ?

Le patron de la droite s'est excusé "platement" auprès de Nicolas Sarkozy, qui "en a pris note", selon les informations de BFMTV. Il a réitéré ses excuses, publiquement, à la télévision. Mais pas question de présenter - pour le moment - des regrets plus poussés. Laurent Wauquiez "est très en colère. Il n'est pas dupe sur ce qu'il se passe et croyez-moi, il ne se laissera pas faire", a fait savoir pour lui la porte-parole du parti LR sur CNews lundi. Reste que derrière la critique de la méthode employée par les journalistes de Quotidien, demeure des propos indéfendables. Aucun cadre des Républicains n'a osé commenté le fond du discours. D'aucuns laissent entendre que cette séquence lui servira, en le "Trumpisant". Mais peut-on vraiment viser les plus hautes responsabilités de l'Etat en se laissant aller à ce genre de commentaires, en public, sur sa propre famille politique ? Ce qui est sûr, c'est que ses adversaires politiques vont pouvoir, à l'envi, le confronter à ses gentillesses. Et lui rappeler qu'il avait pris l'habitude, ces dernières années, à fustiger le "double discours" des hommes et femmes politiques. Il avait notamment été très sévère à l'endroit de François Hollande, lors de la publication d'"Un président ne devrait pas dire ça". "Pour moi, c'est l'incarnation d'une classe politique qui n'est plus capable de verbaliser des évidences", disait-il.

Comme pour résumer le malaise qui entoure ces révélations, le président du conseil d'administration de l'école de commerce de Lyon, Bruno Bonnell, a fait part de sa "déception vis-à-vis de la qualité de ce qu'il a dit" lors de cette intervention, pourtant intitulée "Grands enjeux de société". Il estime que "ce n'est pas ce qu'on attend d'un mec du niveau de Wauquiez". Alors que certains élèves se disent "trahis" par ces enregistrements, le président de l'EM Lyon a décidé de ne pas diligenter d'enquête interne pour savoir qui a enregistré la prestation du patron des Républicains. "On va réitérer en interne que l'engagement de confidentialité fait partie de la boîte à outil du manager", a-t-il simplement fait savoir. Précision importante : Bruno Bonnell est par ailleurs député LREM. Laurent Wauquiez de son côté a dénoncé un enregistrement "illégal" et des méthodes "qui ouvrent la voie à des suites judiciaires".

La liste des perles de Laurent Wauquiez face aux étudiants

De quoi parle-t-on exactement ? Quels sont les propos qui suscitent une telle polémique ? Laurent Wauquiez a donné un "cours" à l'EM Lyon, au cours duquel il a parlé sans retenue. Les enregistrements qui ont fuité et qui ont été diffusés dans l'émission Quotidien sur TMC sont clairement embarrassants pour un homme politique aussi ambitieux, et tout juste élu à la tête du principal parti de la droite républicaine française. A plusieurs titres. Les propos tenus par Laurent Wauquiez devant les étudiants et enregistrés à son insu, témoignent à la fois d'un certain degré de naïveté de la part de l'intéressé, piégé par une banale sortie de route en "off", mais aussi d'une forme de méchanceté brute de celui qui entend incarner une alternative au pouvoir d'Emmanuel Macron. Plus loin encore, ces propos sont le reflet d'une analyse politique au raz des pâquerettes qui ne rend pas vraiment service à son auteur. Car chez Laurent Wauquiez, il est question de "guignols" quand on parle des élus d'En Marche, de "dictature totale" quand il s'agit de décrire le fonctionnement actuel de la majorité ou encore de "conneries", quand il faut qualifier une mesure de Valérie Pécresse, l'une de ses principales rivales à droite.

Ces mots sont issus de la dernière salve dévoilée par l'émission de Yann Barthès sur TMC. Et la première, diffusée en fin de semaine dernière, ne constituait pas, elle non plus, une observation de très haute volée de la vie politique. Laurent Wauquiez lâchait ainsi que Nicolas Sarkozy mettait sur écoutes ses ministres quand il était président, que François Fillon avait été victime d'une "cellule de démolition", que Gérald Darmanin, poursuivi pour viol - une affaire depuis classée sans suite - allait "tomber", ou encore qu'Emmanuel Macron lui avait piqué l'idée de s'afficher en bras de chemise...

Sur Nicolas Sarkozy - "Nicolas Sarkozy, il en était arrivé au point où il contrôlait les téléphones portables de ceux qui rentraient en conseil des ministres. Il les mettait sur écoutes pour pomper tous les mails, tous les textos, et vérifier ce que chacun de ses ministres disait au moment où on rentrait en conseil des ministres".

Sur Angela Merkel - "Vous avez déjà regardé son compte Instagram ? Croyez-moi, pour y trouver du charisme, faut se lever de bonne heure".

Sur Emmanuel Macron - "Le président actuel, Macron, lui pour faire cool, il fait comme moi ! Il se met en chemise. Bras de chemise. Jamais un président de la République ne s'était mis en bras de chemise".

Sur François Fillon - "Objectivement, [Emmanuel Macron] a quand même eu un alignement de planètes assez inespéré. Que Fillon gagne la primaire et que derrière, il le démolisse... Je suis sûr et certain qu'il l'a organisé, je pense qu'ils ont largement contribué à mettre en place la cellule de démolition".

Sur Gérald Darmanin - "C'est du Cahuzac puissance 10 [...]. Mais c'est un monument à regarder, ce truc [les révélations du ministre sur franceinfo] ! Le type sait très bien ce qu'il a fait, il sait très bien ce qui va arriver. Vous penserez à moi dans les semaines qui viennent, mais lui, je ne lui promets pas un grand destin".

Sur le projet d'exclusion de Gérald Darmanin de LR - "J'ai sorti ça, j'ai été en minorité à l'intérieur de mon parti. Moment très dur pour moi à gérer. J'ai eu toute une série de voix dissonantes qui ont dit non, mais nous on trouve que c'est bien, faut qu'il reste, présomption d'innocence. En ayant eu une séance de débat autour de la table avec un certain nombre de responsables de notre famille politique... En les regardant dans les yeux, je me demandais : il y en a combien qui se disent pourvu que ça ne m'arrive pas".

Sur les élus d'En Marche - "Vous croyez qu'un parlementaire a le moindre pouvoir aujourd'hui ? Vous avez vu les guignols d'En Marche, là, ils sont tous avec le petit doigt sur la couture, et ils doivent tous voter la même chose quand ils osent apporter la moindre dissonance ils se font taper dessus avec une matraque".

Sur la "dictature totale en France" - "Il n'y a aucun équilibre des pouvoirs en France [...]. Donc il y a une dictature totale en France ! L'alignement entre l'exécutif et le législatif, c'est une vaste foutaise".

Sur les subventions de sa région aux syndicats - "La CGT se faisait un joli chèque de 3 millions d'euros sur le budget de la région chaque année [...]. Le pire, si on est très honnêtes entre nous, c'est que les plus catastrophiques, c'est le Medef et c'est la CGPME. C'est-à-dire, eux ils en ont rien à foutre de savoir si on augmente les cotisations sur les entreprises, si on augmente le truc, la seule chose qu'ils veulent c'est encaisser l'argent".

Sur le Premier ministre canadien Justin Trudeau - "Il a pas l'air gentil Justin ? Qu'est ce qu'on a derrière ? Regardez moi ça. Lui en gros c'est simple, tout ce qui est mainstream, tout ce qui est bonne pensée, je prends tout. L'objectif c'est : je suis à fond dans tout, tout est nickel, tout est ripoliné, y a pas un cheveu qui dépasse, je suis le mec cool, gentil, complètement dans le mainstream du média".

Sur Valérie Pécresse, ancienne ministre de l'Enseignement supérieur, au sujet d'une mesure permettant aux étudiants de prépa littéraire d'intégrer des écoles de commerce - "Ah, le nombre de conneries qu'elle peut faire !"

Sur Alain Juppé - "Alain Juppé, qui est une personnalité, éminemment respectable, il a totalement cramé la caisse. Bordeaux est géniale, c'est très bien géré, mais il a fait exploser les impôts, et il a fait exploser la dépense publique, et il a fait exploser l'endettement. Moi ma conviction c'est que quand vous avez fait ça, vous n'avez plus aucune forme de crédit".

Sur cette conférence donnée aux étudiants - "Si j'ai la moindre interface qui sort par le moindre élève, là pour le coup, ça se passera très mal. Si on veut que ce lieu soit un lieu de liberté, il faut que tout ce que je dise reste entre nous [...] La caractéristique, quand on est un élu, surtout dans le monde actuel, c'est que tout ce que vous dites, à tout moment, peut être utilisé, repris, et déformé contre vous".

La réaction d'Emmanuel Macron

Le chef de l'Etat a d'ailleurs été interpellé sur le sujet, en marge d'un déplacement aux Mureaux. A un journaliste qui lui a demandé ce que les propos de Laurent Wauquiez lui inspiraient, Emmanuel Macron a répondu : "Rien, parce qu'il n'est pas inspirant. Moi, je travaille, j'ai autre chose à faire".

Valérie Pécresse réagit

La présidente de la région Île-de-France a d'abord manifesté sa désapprobation aux propos du patron de son parti, elle relayant sur son propre compte Twitter de nombreuses réactions d'internautes. Comme celle d'une élue LR, qui revient sur les propos tenus par Laurent Wauquiez sur son action politique : "La droite doit travailler à redevenir crédible et à ne pas être une caricature d'elle-même. Je suis consternée par ce #WauquiezGate surtout qd au passage il égratigne une des réformes de Valérie Pécresse visant à revaloriser la filière littéraire et dont on peut être fier"

Valérie Pécresse s'est exprimée jeudi 22 février sur RTL. "Je ne laisserai pas attaquer mon bilan ministériel, mes réformes au gouvernement. (…) On voit très clairement, aujourd’hui, qu’il y a deux droites, il y a une droite des décibels et une droite de la crédibilité", a-t-elle réagi. Et de tacler le patron de la droite, qui lui invoque de l'humour lorsqu'il parlait des "conneries" de Valérie Pécresse." J’aimerais bien moi aussi faire de l’humour sur les réformes faites par Laurent Wauquiez au gouvernement mais, malheureusement, j’ai bien cherché, je n’en ai pas trouvé", a-t-elle dit.

Le clan Juppé furax

"Cramer les caisses de la ville… C'est quoi cette terminologie ? On ne brûle pas les billets à Bordeaux, on investit !", a fait savoir Nicolas Florian, adjoint d'Alain Juppé à la mairie de Bordeaux, au micro de France Bleu. L'ancien candidat a la présidentielle n'a pas souhaité livrer lui-même le fond de sa pensée. Mais le message est clair : "Je dois dire que je suis un peu meurtri par cette déclaration à l'emporte-pièce", glisse Nicolas Florian, qui interpelle le patron de son parti : "Qu'un président de parti passe plus de temps à taper sur ses amis, cela pose question. Vu les responsabilités qu'il occupe et celles auxquelles il aspire, ce n'est pas de son niveau. Il faudrait qu'il prenne plus de hauteur", a-t-il dit. Alain Juppé lui-même serait très remonté : "Mais quel con !" se serait-il exaspéré devant des proches, révèle Le Parisien.