Portrait
 
Juin 2007

Gordon Brown : du 11 au 10 Downing Street

Sacré chef du parti travailliste britannique, dimanche 24 juin, Gordon Brown succède finalement à Tony Blair, après une longue et patiente attente. Qui est-il ? A quel Premier ministre les Britanniques peuvent-ils s'attendre ?
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Mercredi 27 juin, Gordon Brown succède à Tony Blair Photo © Labour
 

Le nouveau Premier ministre britannique, Gordon Brown, est un habitué du pouvoir et de Downing Street. Son parcours.

Des quartiers pauvres au Parlement
Fils d'un pasteur écossais, Gordon Brown est né en 1951 et a grandi dans le quartier de Glasgow, en proie au chômage. Il y découvre la pauvreté, la misère, la détresse, mais aussi la solidarité et la ténacité. Ce surdoué intègre l'éminent collège Kirkcaldy, où avait étudié Adam Smith, et à seulement 16 ans, il devient le plus jeune étudiant à entrer à l'Université d'Edimbourg depuis la Seconde Guerre mondiale. Il y obtient sa maîtrise avec la mention "Excellent". Devenu professeur d'économie à la fin des années 1970, il se laisse bientôt rattraper par sa première passion, la politique. En 1979, il est candidat à la députation. Mais le raz-de-marée conservateur de Margaret Thatcher retarde son entrée aux Communes de quatre ans. Ainsi, en 1983, Gordon Brown est élu au Parlement, en même temps que Tony Blair.

 

Les rénovateurs s'entendent
Longtemps, Brown aura été le "grand frère" de Blair avec qui il partage un bureau à Westminster lors de la longue traversée d'opposition des travaillistes. Les deux jeunes partagent également une même volonté : rénover le Labour vieillissant, réduire le rôle des syndicats et moderniser la doctrine pour attirer les classes moyennes. Brown et Blair gravissent ensemble les échelons du parti et entrent au cabinet. Mais en 1994, à la mort du leader du Labour, John Smith, l'Ecossais qui fait figure de favori à la succession doit se retirer au profit du moderniste Blair, plus télégénique et, surtout, Anglais.

Le 31 mai 1994, ils se mettent d'accord au cours d'un dîner, qui fera couler beaucoup d'encre, au Restaurant "Granita", dans le quartier d'Islington à Londres. Selon plusieurs témoins, un pacte aurait été conclu. Gordon Brown laissait à Blair la tête du parti. Et en échange, Blair laissait les mains libres à Brown aux Finances, puis devait s'éclipser en sa faveur au cours de son second mandat. Le premier ne tiendra pas sa parole, alimentant la frustration du second.

 

Les Lennon-McCartney du Labour

 
Tony Blair et Gordon Brown, surnommés "TeeBee-GeeBee" (leurs initiales) par la presse britannique Photo © D. R.
 

En 1997, Tony Blair emménage au 10 Downing Street, tandis que Gordon Brown, nommé Chancelier de l'Echiquier (ministre des Finances), s'installe de l'autre côté de la rue, au n°11. Celui que la presse rebaptise "Flash Gordon" fait des merveilles pour l'économie britannique, devenue l'une des plus dynamiques d'Europe. La croissance est soutenue, le plein-emploi est quasiment atteint, l'inflation extraordinairement faible. Adulé par la City, Gordon Brown est aussi un authentique homme de gauche comme en témoigne l'instauration d'un salaire minimum pour les jeunes et sa défense des services publics auxquels voulait s'attaquer Tony Blair.

Mais c'est l'euro qui sera à l'origine de la plus grande discorde au sein de cette dyarchie officieuse. Le Premier ministre, éternel partisan d'une Grande-Bretagne au cœur de l'Europe, est favorable à l'adoption de la monnaie unique. Frontalement opposé à cette idée, Brown menace de démissionner. Et remporte la partie, non sans conséquence pour le tandem. Au moment de l'entrée en guerre contre l'Irak, si Brown n'y est pas hostile, il laisse le Premier ministre, seul, se faire vilipender par l'opinion publique.

Pourtant, les Britanniques ne sanctionnent pas Tony Blair, qui remporte une troisième victoire consécutive en mai 2005. Et une fois de plus, Brown doit tenir le second rôle. Finalement, à l'automne 2006, une rébellion éclate au sein du Labour, plus ou moins fomentée par le Chancelier lui-même. Il obtient ainsi de Tony Blair qu'il quitte sa fonction en juin 2007. C'est la fin d'une longue et patiente attente de 10 ans.

 

 
Gordon Brown, chancelier de l'Echiquier, lors d'une réunion du Fonds monétaire international Photo © FMI
 
Quel Premier ministre sera Gordon Brown ?
Succéder au charismatique Tony Blair, génie de la communication politique, ne va pas être chose aisée. Si depuis quelques années, grâce notamment à son mariage avec Sarah Macauley (qui met un terme à la rumeur selon laquelle il serait homosexuel) et à la naissance de ses deux enfants, Gordon Brown a adopté un style moins austère et plus souriant, il faut s'attendre à un Premier ministre moins "people". Autant Tony Blair aime jouer de son charme, multipliant les plaisanteries dans ses discours, autant Gordon Brown a tout de l'Ecossais maussade qui compte avant tout sur son punch.

D'un point de vue politique, Brown ne devrait pas révolutionner l'héritage blairiste, étant lui-même le grand artisan de la "troisième voie". Dès son arrivée au 10 Downing Street, ses priorités seront l'éducation, le logement (au coût très élevé au Royaume-Uni) et la santé. Fort est à parier qu'il sera un interlocuteur intransigeant au sein des instances de l'Union européenne. Au sujet du traité simplifié européen, il a entonné son credo anti-Bruxelles, très porteur dans l'eurosceptique Grande-Bretagne. Sur les grands dossiers internationaux, Irak, Afghanistan, terrorisme, Gordon Brown devrait conserver la ligne de son prédécesseur.

Ce dimanche à Manchester, l'actuel chancelier de l'Echiquier est ainsi devenu, à 56 ans, le nouveau leader du New Labour. Mercredi 27 juin, après que Tony Blair aura présenté sa démission à la reine à Buckingham Palace, il prendra la tête du gouvernement britannique.

 

» Lire aussi notre dossier : 10 ans de Tony Blair en 10 points

 


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