Abdelhamid Abaaoud mort : qui était le donneur d'ordre de Daesh en Europe ?

Abdelhamid Abaaoud mort : qui était le donneur d'ordre de Daesh en Europe ? PORTRAIT- Abdelhamid Abaaoud, alias Abou Omar Soussi, un Belge de 27 ans, était l'un des bourreaux les plus actifs de Daesh et son chef des opérations en Europe. Il a été tué par les policiers du RAID jeudi 18 novembre.

[Mis à jour le 19 novembre 2015 à 14h04] Abdelhamid Abaaoud a bien été tué lors de l'intervention des policiers du RAID et de la BRI. Le procureur de Paris vient de confirmer que son corps a été formellement identifié. Il était la cible prioritaire de l'assaut anti-terroriste organisé mercredi 18 novembre, dans deux appartements de Saint-Denis. Les enquêteurs s'étaient forgé ces derniers jours la conviction qu'Abdelhamid Abaadoud était en train d'organiser de nouveaux attentats, probablement à Paris ou en Banlieue parisienne.

Qui était Abdelhamid Abaaoud ?

Abdelhamid Abaaoud, Belge d'origine marocaine de 27 ans, était originaire du quartier de Molenbeek. Il était aussi connu pour être un bourreau de Daesh en Syrie, l'un des plus actifs, et répondait au pseudo de Abou Omar Soussi, son nom de guerre. Il a donc trouvé la mort dans  une opération de police mercredi matin à Saint-Denis, prêt du Stade de France où trois kamikazes se sont fait exploser vendredi. Par ailleurs, cinq kamikazes des attentats de Paris ont déjà été identifiés, pour la plupart des Français.

Abdelhamid Abaaoud était bien connu des autorités. Les services secrets savait qu'il avait enrôlé son frère de 13 ans, Younès, dans les rangs de l'organisation Etat islamique (EI). Une affaire qui avait fait la une des journaux belges en février 2013 qui surnommaient alors l'adolescent "le plus jeune djihadiste de Syrie". Mais Abdelhamid Abaaoud (également appelé Abou Omar Soussi ou Abou Omar al-Baljiki) s'était surtout fait remarquer dans une vidéo postée en mars 2014 par Daesh. Il apparaissait alors à visage découvert conduisant un pick-up trainant quatre cadavres, des personnes tuées par l'EI. Donné plusieurs fois pour mort, Abdelhamid Abaaoud a longtemps demeuré introuvable. Libération avait fait cees derniers mois le portrait d'un jeune homme qui aurait monté les échelons au sein de l'Etat islamique jusqu'à être chargé d'une mission particulière : retourner en Europe entraîner des djihadistes dans le but de perpétrer des attentats.

Capture d'écran de la vidéo postée par Daesh dans laquelle apparaît Abdelhamid Abaaoud :

Abdelhamid Abaaoud : pilote de plusieurs opérations en Europe

Par ailleurs, le nom d'Abdelhamid Abaaoud était déjà apparu dans l'enquête sur une série d'attaques déjouées en Belgique au mois de janvier dernier. Il avait déjà été identifié comme le cerveau de ces attaques, celui qui dictait les ordres et qui finançait l'opération. Suite au démantèlement de sa cellule jihadiste belge, il aurait fui et se serait caché dans un autre pays, peut-être la Grèce ou la Turquie. Le téléphone portable de Abdelhamid Abaaoud avait, lors de l'enquête en janvier, été localisé en Grèce. Il se trouve que c'est également en Grèce que le passeport syrien retrouvé près d'un kamikaze du Stade de France a été enregistré. La suite de l'enquête dira si un lien est établi entre ces deux informations. Par la suite, Abdelhamid Abaaoud a été condamné à 20 ans de prison à Bruxelles. Une condamnation qui a été prononcée en juillet dernier lors d'un procès auquel il n'était bien sûr pas présent.

Selon Libération, Abdelhamid Abaaoud aurait été ces derniers mois en contact avec différentes personnes étant ou prévoyant de passer à l'acte. Il aurait ainsi connu Ayoub El-Khazzani qui a attaqué le Thalys Amsterdam-Paris en août dernier, Sid Ahmed Ghlam qui prévoyait de cibler des églises à Villejuif en avril et enfin Mehdi Nemmouche, l'auteur de la tuerie du musée juif de Bruxelles en mai 2014.

D'après un témoin cité par France Info, Abdelhamid Abaaoud aurait déjà eu comme projet de retour de Syrie de "frapper une salle de concert" en France. En réalité, ce serait un djihadiste espagnol, interpellé mi-août, qui aurait révélé avoir reçu un entraînement pour perpéter un attentat en France. Entraînement qui aurait été assuré par Abdelhamid Abaaoud, rapporte Libération. Ce dernier aurait par la suite envoyé le djihadiste en Europe avec comme consigne de frapper une salle de concert. Il lui aurait confié 2000 euros en liquide et une clé USB contenant des logiciels de cryptage.

Abdelhamid Abaaoud : contact direct des terroristes lors des attaques

Abdelhamid Abaaoud aurait été en liaison directe avec l'un des terroristes qui résidait lui aussi à Molenbeek. Pour les enquêteurs, il serait donc bien le commanditaire des attaques sanglantes de vendredi. Selon le journal De Standaard, c'est avec Brahim Abdeslam, un kamikaze qui s'est fait exploser boulevard Voltaire, que cet homme aurait été en contact. Leurs deux noms apparaîtraient dans plusieurs dossiers criminels de droit commun pour des faits commis à Bruxelles et remontant à 2010-2011. D'après DH.be et France Info, Abdelhamid Abaaoud et Salah Abdeslam, frère du précédent qui est activement recherché, étaient amis d'enfance. Ils auraient par le passé été accusés de braquages. 

Celui qui est présenté comme étant "le cerveau" des attentats de Paris et les frères Abdeslam ont résidé à Molenbeek, près de Bruxelles. C'est d'ailleurs vers la Belgique que les hommes en cavale auraient pu se rendre, et c'est à Molenbeek que la police a procédé à sept interpellations ce week-end et mené une importante opération lundi. Cette banlieue de la capitale belge est connue pour être un "fief islamiste". L'auteur présumé de la tuerie du musée juif de Bruxelles, Mehdi Nemmouche, y aurait séjourné. 

"J'ai honte pour Abdelhamid, mon fils. Il a ruiné nos vies"

A cette époque, Courrier International avait recueilli le témoignage de son père qui était alors en dépression depuis qu'il avait appris les agissements de son fils. "Je n'en peux plus, je suis à bout de forces", déclarait-il. "J'ai honte pour Abdelhamid, mon fils. Il a ruiné nos vies". "Pourquoi, au nom de Dieu, voudrait-il tuer des Belges innoncents ? Notre famille doit tout à ce pays", avait-il ajouté. Le père de celui qui est aujourd'hui suspecté d'avoir mené les attentats expliquait avoir travaillé dans la mine à son arrivée en Belgique il y a quarante ans, puis avoir "reçu un magasin de vêtements" et en avoir aussi acheté un pour Abdelhamid Abaaoud. "Abdelhamid n'était pas un enfant difficile et c'est devenu un bon commerçant", racontait son père. "Mais tout à coup, il est parti pour la Syrie. Je me suis demandé tous les jours pour quelle raison il s'était radicalisé à ce point. Je n'ai jamais reçu de réponse".

Crédit vignette : DIDIER BAUWERAERTS/ISOPIX/SIPA