Tafta (TTIP) : Greenpeace balance des documents secrets, peur sur la Champagne
TAFTA - Greenpeace a rendu publiques, ce lundi 2 mai, 248 pages de documents confidentiels concernant les négociations du futur traité de libre-échange entre l’UE et les Etats-Unis.
[Mis à jour le 2 mai 2016 à 17h23] Plus qu'un pavé dans la mare, c'est un véritable coup politique que s'offre Greenpeace Pays-Bas ce lundi matin : en publiant près de 250 pages de documents confidentiels sur les négociations du Tafta, l'organisation militante prend de court les dirigeants politiques de l'Union européenne et des Etats-Unis chargés de l'élaboration du traité qui redéfinira les accords commerciaux entre les deux partenaires. L'ensemble des documents est en ligne sur le site http://ttip-leaks.org/, téléchargeable par chapitres, en format PDF. Dans un communiqué joint à la presse, le directeur de Greenpeace Europe, Jorgo Riss, met en garde l'opinion publique, assurant avoir agi afin de permettre "à des millions de citoyens de mieux comprendre ce qui se négocie en leur nom". Selon l'organisation écologiste, "ce traité mettrait les intérêts des grandes entreprises au centre du processus de décision politique et législatif au détriment des enjeux environnementaux ou de santé publique".
Les documents révélés datent de près d'un mois, rédigés cependant après 12 cycles de négociations. Le plus frappant réside dans le caractère déséquilibré des échanges : la plupart des propositions ont été faites par l'Union Européenne. Les Américains ont déjà manifesté, en revanche, plusieurs désaccords majeurs : il n'est pas question de renforcer la coopération réglementaire des services financiers, il n'est pas non plus envisagé de laisser aux Européens la possibilité d'imposer dans les échanges le fameux "principe de précaution". Concrètement, les autorités européennes pourraient bien à l'avenir devoir "prouver" la dangerosité de certains produits pour en refuser l'importation, alors qu'aujourd'hui, seuls de forts doutes concernant des risques pour la santé ou l'environnement suffisent pour refuser certains produits (notamment les OGM). Selon RTL Nieuws, qui a épluché dans le détails les documents, il serait également question d'échanges facilités concernant les cosmétiques dont la production a nécessité des expérimentations animales. Autre hic soulevé, la demande des Américains d'intégrer de nouvelles règles sur les appellations protégées, comme notamment la possibilité, à l'avenir, de se servir du nom "champagne" pour certains domaines viticoles des Etats-Unis. Côté européen, il est proposé de renforcer le nombre de ces appellations protégées, comme notamment le chablis ou le parmesan. L'UE demande par ailleurs davantage d'harmonisation des standards industriels et davantage de droits commerciaux concernant l'accès aux marchés publics américains.
TAFTA : Bruxelles rassure
"Les accords commerciaux ne changeront pas nos lois sur les OGM ou sur la façon de produire de la viande de bœuf en toute sécurité, ou sur la façon de protéger l'environnement", a rapidement réagi la commissaire au Commerce Cecilia Malmström, en première ligne dans les négociations. Sur son blog, elle condamne les "malentendus" des révélations de Greenpeace, assurant qu'elle n'est pas "de celles qui vont abaisser les normes". Une source diplomatique a, par ailleurs, assuré que les 250 pages publiées ne prenaient pas en compte des "évolutions importantes". Plus encore, les négociateurs n'auraient pas encore acté la moindre décision : "Il est normal que dans des négociations [...] les deux parties aient des positions différentes", a fait savoir le gouvernement allemand dans la journée, relativisant les rumeurs sur un éventuel rabaissement ou assouplissement des normes européennes.