Le temps des marchés n’est pas celui de l’économie

Alors que le début d'année s'annonçait prometteur, l’économie mondiale a ralenti avec le tsunami au Japon et la hausse des prix du pétrole. Ces chocs absorbés, la crise de confiance dans les dettes souveraines soulève pour le deuxième semestre de nombreuses questions.

Après un début d'année très prometteur, la situation sur les marchés s'est dégradée à partir du printemps pour devenir franchement horrible durant l'été. Sur le plan macroéconomique, les perspectives de forte croissance du début d'année ont été douchées par deux chocs exogènes qui ont déprimé l'activité. Il s'agit en premier lieu de la forte hausse du pétrole dont le prix est passé des environs de 80 dollars le baril à plus de 120 dollars, en grande partie du fait de la situation sociale et politique tendue dans un certain nombre de pays producteurs. Le tremblement de terre au Japon a également désorganisé un certain nombre de chaînes de production. La conjonction de ces deux facteurs a entraîné un ralentissement temporaire au printemps qui devait laisser place à une amélioration de la croissance durant la deuxième moitié de l'année, une fois ces chocs absorbés. Les données statistiques de juillet sont d'ailleurs orientées dans ce sens.

Mais les chiffres publiés en juillet concernaient les mois précédents et ont donné l'image d'une économie mondiale en net ralentissement. Là-dessus, s'est greffé tout un ensemble d'inquiétudes liées aux problèmes de la Grèce, mais aussi au psychodrame des négociations sur le plafond d'endettement aux Etats-Unis. Le tout a culminé avec la dégradation de la note américaine par Standard & Poor's. En Europe, l'Italie et l'Espagne ont également été attaquées, ce qui a entraîné les valeurs bancaires européennes dans la tourmente. Tout ceci a provoqué une brutale crise de confiance qui s'est manifestée par une baisse de plus de 20% par rapport au niveau de fin juin.


Un risque de récession ?
Historiquement, les crises de confiance boursière entraînent rarement l'économie réelle, mais le contexte est aujourd'hui beaucoup plus fragile. Nous ne pensons pas qu'une nouvelle récession soit le scénario le plus probable. Les composantes cycliques de l'activité n'ont pas vraiment décollé depuis le point bas de 2009, ce qui fait que l'économie a peu de « gras » à éliminer. Par ailleurs, l'indicateur le plus en temps réel, les inscriptions hebdomadaires du chômage selon nous, n'implique pas de cassure depuis cet été. Néanmoins, l'obligation faite aux Etats, d'accélérer leurs mesures de rigueur budgétaire aura un impact sur la croissance. Nous voyons donc plutôt un scénario de croissance molle.


Les marchés actions peuvent-ils monter dans un tel contexte ?
Nous le pensons. En l'absence de récession, les résultats des entreprises ne nous semblent pas particulièrement en danger. Le niveau élevé du taux de chômage et sa difficulté à baisser vont contenir les coûts salariaux. La valorisation actuelle des actions est extrêmement basse, tout particulièrement en Europe, avec un ratio de capitalisation de 8,7 fois les résultats prévus pour dans douze mois contre une moyenne sur vingt ans de 13,8. Le dividende des actions offre un rendement de 5%.

Cette valorisation très basse découle sans aucun doute des inquiétudes sur la crise des finances publiques dans la zone euro. Or que voyons-nous ? Tous les pays ont pris le chemin de la rigueur et font des progrès dans la réduction de leur déficit. Parmi les pays actuellement aidés, L'Irlande et le Portugal sont en bonne voie selon le FMI. Seule la Grèce pose véritablement problème avec une indéniable dégradation de la situation économique et fiscale. Mais même une issue défavorable pourrait être absorbée en l'absence de contagion. Les annonces du 21 juillet qui doivent être votées par les pays durant l'automne devraient permettre de réduire les pressions sur les autres pays. Le temps des marchés n'est pas celui de l'économie : il faut donc protéger les pays fragilisés pour éviter tout emballement, ce que la BCE fait en achetant des obligations italiennes et espagnoles. Tôt ou tard, les marchés prendront acte des mesures prises par les pays européens pour restaurer leurs finances publiques et ce regain de confiance devrait ramener les marchés actions et les valeurs bancaires vers des niveaux plus rationnels.