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TÉMOIGNAGE
 
22/11/2006

Apprendre à Voir avec Gérard Taillefer

Depuis 1962, Gérard Taillefer vit en Suède. Ses photographies soigneusement composées révèlent toute la beauté des paysages nordiques, urbains et ruraux. Des paysages minimalistes et poétiques, à découvrir dans le diaporama de l'auteur.

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EN IMAGES Diaporama des photos de Gérard Taillefer
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Parlez nous un peu de vous, votre métier, vos passions et hobbies…

Je suis parti pour la Suède en 1962 et j'y suis resté. Après quelques petits boulots, je suis finalement entré dans les labos photo où j'ai travaillé pendant 6-7 ans. Je filtrais principalement les épreuves papier amateur.

En 1974 j'ai commencé des études universitaires, toujours à Stockholm et en 1978 j'étais professeur de français et anglais. J'ai ensuite enseigné le suédois aux étrangers jusqu'à l'été 2006. Aujourd'hui je suis à la retraite, ce qui me permet d'aider quelques jeunes amis kurdes qui ont besoin d'aide dans leurs études. Hobbies? Photos et prises de son.

"Portrait of the artist as an old man" © Gérard Taillefer
 

 

Depuis combien d'années pratiquez-vous la photo ? D'où vient cette passion ?

J'ai acheté mon premier appareil - un Agfa Optima (24x36) - à Paris en novembre 1960. Puis, en 1963, en Suède, j'ai acheté mon premier Nikon. J'ai beaucoup photographié à Stockholm pendant huit ou neuf ans. Début 1999, j'ai dû rester chez moi en convalescence suite à une maladie grave. Comme j'avais le droit de me promener, j'ai commencé à faire de grandes randonnées photo solitaires en ville puis dans la nature autour de Stockholm. J'ai dépensé un argent fou en appareils moyen et grand format 4,5x6 et 6x9 (Fuji), en pellicules, développements et à faire faire des agrandissements 50x60 cm sur papier. J'étais retombé dans le piège !

En juillet 2005 je me suis mis au numérique. Ce qui, en plus de l'appareil lui-même, m'a quand même obligé à acheter un nouvel écran orientable Samsung, un nouveau logiciel de traitement d'images, un nouveau pied photo… Cette passion vient principalement je pense du besoin de créer quelque chose dont on est fier. Je n'avais au départ aucune formation artistique, ce que j'ai toujours regretté. Je n'ai que la photo et les mots pour m'exprimer artistiquement.


Avez-vous envisagé devenir photographe pro ?

Oui, quand j'étais jeune. C'était le rêve de beaucoup, en Suède dans les années 60. Tout le monde avait un ou deux appareils Leica, Canon ou Nikon. Certains avaient un Hasselblad. Il fallait tout documenter - la vie et la ville, la nature, les mines de fer, la vie à la campagne, les relations humaines, les handicapés… J'y croyais moi aussi. Je vendais des photos, j'étais publié… Mais pour vivre de la photo il aurait fallu une toute autre formation, d'autres connaissances de l'économie d'entreprise et du marketing. La photo m'a coûté beaucoup. Quelques mois après le début de mes études universitaires, j'ai vendu mes appareils et j'ai acheté une machine à écrire. Je suis passé de l'image au mot.


Combien de temps par semaine (ou par jour) vous prend la photo ?

C'est très irrégulier. Quand on a pris des photos, il faut ensuite les faire développer et numériser, il faut en faire la sauvegarde, les trier, les étudier une à une… Puis, si une photo semble réussie, il faudra travailler dessus, contrôler couleurs, intensité, saturation, contraste, perpendicularité, cadrage… Je peux travailler pendant plusieurs jours sur une seule photo.

 

"Bretagne 1970", Trébeurden, novembre 2006, FRANCE. Photo © Gérard Taillefer

 

Quel matériel utilisez-vous ? Argentique, numérique ? Votre prochain APN ?

Depuis juillet 2005 j'utilise un Olympus C-8080. C'était, déjà en juillet 2005, un appareil en voie de disparition, mais il correspondait à mes besoins comme aucun autre. Ce qui était important pour moi, et qui l'est toujours, c'est l'objectif - très bien corrigé sur cet appareil. Il débute à 28 mm (équivalent 24x36), qui est une focale que j'utilise beaucoup. Mais il faut savoir qu'il y a dégradation rapide de l'image sur cet appareil dès qu'on essaie de monter plus haut que ISO 50. Ce qui limite, bien sûr. Il ne faut pas croire qu'on pourra prendre des photos très nettes à ISO 50 si le ciel est gris et que le vent souffle. Mon prochain APN ? À ma connaissance il n'existe à l'heure actuelle aucun appareil pouvant me donner de meilleurs résultats optiques que ce que j'obtiens avec mon C-8080. Malheureusement.

 

Y-a-t-il un APN spécialisé qui vous convient le plus pour chaque situation donnée ?

J'ai possédé cette année un Olympus µ800. C'était un appareil résistant aux intempéries et c'est la raison pour laquelle je l'avais acheté. Mais ce µ800 n'est qu'un gadget qui m'a fait rater un grand nombre de photos car il n'arrive pas à faire la mise au point sur un sujet sombre. Adieu donc, photos d'hiver ou prises le soir en ville, et adieu donc µ800. D'ailleurs, cet appareil est tout aussi inutilisable par beau temps à cause des reflets sur l'écran et sur l'objectif. Ce que j'achèterais volontiers, ce serait un APN au format vertical, tout comme l'étaient les Olympus 18x24 mm des années 60, ou même le Fuji 4,5x6 cm que je possédais en 1999.

 

Votre plus belle rencontre photographique ?

La Bretagne. La Bretagne des ports de pêche, des grèves, des pointes et des criques… et puis la Bretagne intérieure des petits chemins, des champs labourés, des monts et montagnes. La Bretagne des cafetiers, des chauffeurs de cars…

 

Votre prochain voyage ? Avec quel(s) matériel(s) partez-vous en voyage ?

Mon prochain voyage pourrait justement être la Bretagne. Mais je ne suis pas un Eugène Smith - qui pouvait prendre de très belles photos du Japon par les fenêtres des trains et des taxis. Moi, je veux un point d'attache d'où je pourrais rayonner à vélo, à mobylette ou en voiture. Mon matériel sera très simple. Pour les photos de nature, mon Olympus C-8080 ou équivalent. Pied photo bien sûr. Mais pour refaire le genre de reportage que j'ai fait en Bretagne en mars 1970, il faut un appareil à visée directe et une bonne qualité d'image à ISO 400-800. Je peux m'imaginer reprendre mon vieux Nikon F3 (argentique) si je ne trouve rien d'autre.

 

J'ai remarqué que vous effectuez de très belles photographies de paysages monochromes, souvent avec une lumière douce. Quel est votre thème photographique de prédilection ?

Merci pour le compliment. En fait, je n'ai pas de "thème photographique de prédilection". Pour la lumière douce, il vaut mieux éviter le soleil direct. Il y a des heures et des jours plus favorables que d'autres.

 

Bois
"Novembre", Bromma, novembre 2006, SUEDE. Photo © Gérard Taillefer

Quels conseils (techniques, pratiques, filtres…) donneriez-vous à nos lecteurs pour réussir leurs images ?

L'appareil photo n'est qu'un outil. Il m'est arrivé de faire des photos dont je suis relativement fier avec un appareil jetable à 5 euros. Le processus artistique n'est pas compris dans le prix de l'appareil. Il faut donc l'avoir ailleurs, c'est-à-dire dans la vision. Il faut avoir un sujet valable et une idée de ce que ce sujet donnera lorsqu'il sera passé par l'objectif. Il faut apprendre à VOIR. Il faut regarder des tableaux de maître, aller dans les musées. Il faut comprendre la lumière, ses couleurs selon qu'elle vient du soleil ou du ciel, selon qu'il est midi ou sept heures du soir.

Moi, j'ai eu aussi ma période d'apprentissage. Il y avait alors d'excellentes revues annuelles - "Photography Annuals" - Je regardais les images, je les étudiais, je cherchais à comprendre pourquoi ces photos avaient été choisies parmi des quantités. J'envoyais des photos (avec coupons-réponse) aux magazines américains Popular Photography et Camera 35. On me les renvoyait …puis un jour j'ai été publié, ici, là.

La composition, en effet, est très importante. Je n'utilise aucun filtre - mais un pare-soleil efficace -avec toujours une lumière ambiante. Chaque fois que c'est possible, j'utilise un trépied. J'en ai un de qualité, avec une tête ManFrotto à trois réglages séparés et un petit niveau à bulle. Le pied est nécessaire pour les temps d'exposition longs, les poses avec déclencheur à retardement, mais aussi pour un cadrage exact du sujet. La plupart des objectifs donnent leur meilleur résultat optique au milieu de la gamme des diaphragmes. D'autre part, la profondeur de champ étant dépendante de l'ouverture du diaphragme choisie, on aura intérêt à contrôler à l'avance la netteté des divers plans du sujet. La netteté de votre sujet "d'ici à l'horizon" sera plus grande à f/8 qu'à f/5,6 et moins grande qu'à f/11 (mais d'un autre côté, votre objectif aura peut-être plus de piqué à f/8 qu'à f/11).

 

Utilisez-vous le mode manuel ? Ou bien préférez-vous les préréglages de votre appareil ? Dans quelles situations choisissez-vous l'un ou l'autre ?

J'utilise soit A soit S. P est parfait si un rhinocéros déboule devant vous et que vous ne voulez pas le rater. Mais pour les paysages, les natures mortes ou l'architecture, l'ouverture est cruciale et il faut donc s'assurer sur place que l'ouverture utilisée est la bonne, plutôt que de faire confiance au micro-ordinateur P de votre appareil.

 

Nuit d'été
Nuit d'été, Nyköping, juillet 1970, SUEDE. Photo © Gérard Taillefer
" Le processus artistique n'est pas compris dans le prix de l'appareil."

Effectuez-vous des retouches sur vos images ? Si oui, comment et avec quel outil ?

Oui, surtout si l'original est une vieille diapositive pleine d'impuretés dans la gélatine. Je "travaille" aussi mes photos numériques parfois pendant des heures. Pour ce faire, j'utilise deux outils très différents : Photoshop Elements et Micrografx Picture Publisher version 6.0. Grâce à l'ordinateur, on a aujourd'hui des possibilités presque illimitées de sauver et de transformer une photo. Il est tentant de jouer avec le curseur de la saturation des couleurs et de voir des couleurs ternes devenir "vivantes". J'ai cependant compris que parfois on doit faire le contraire, c'est-à-dire "désaturer" légèrement certaines photos.

 

Quel endroit aimeriez-vous prendre en photo ?

La forêt de Fontainebleau, avec les grandes futaies, les roches, les fougères, les sentiers sablonneux, les mares perdues.

Ceci dit, il y a d'autres endroits sur terre qui sont probablement plus grandioses, mais pratiquement impossibles à rendre sur un écran d'ordinateur et encore moins sur papier : tous les grands sites naturels sont constamment photographiés par des professionnels de l'affiche ou de la carte postale utilisant des appareils panoramiques grand format… Inutile de passer derrière eux.

De plus, la qualité des images sur un ordinateur bon marché ou sur le net est limitée. Bien des photos destinées au net sont déjà tellement réduites par rapport à l'original qu'elles n'ont plus le piqué qui leur donnait la vie. Si d'autre part vous les regardez à l'aide de Microsoft Windows Picture & Fax Viewer, la déception sera encore plus grande vu que ce programme manque franchement de netteté comparé à Photoshop Elements, et encore plus si vous le comparez avec Micrografx Picture Publisher. C'est pourquoi il faut parfois volontairement simplifier une belle photo d'un paysage et la transformer en un mélange entre photo et peinture, augmenter la saturation et le contraste…

 

De combien de photos personnelles disposez-vous ? Comment les stockez-vous ? (albums, CD, ordinateur...)

Aucune idée. J'ai laissé quelque part des quantités de photos, négatifs, boites de diapositives, cd et dvd de photos numériques.

Dès que je rentre chez moi, je copie mes photos sur mon disque dur et j'en fais immédiatement un ou plusieurs disques que j'appelle "Original negs". Je peux alors formater la carte de mon appareil.

Je ne "travaille" que sur des photos au format tif, puisque je peux avoir à les sauvegarder 15 fois, 20 fois ou plus et qu'il ne faut pas que ces photos se détériorent à chaque sauvegarde. Je place ainsi ma photo-résultat dans un fichier appelé "Mes meilleures photos". Je change en même temps la numérotation, j'abandonne celle d'Olympus et je la remplace par année (4 chiffres) + mois (2 chiffres) + jour (2 chiffres) + l'heure selon Olympus (4 chiffres). Suivent quelques annotations sur certaines concernant les opérations réalisées. Régulièrement je fais une sauvegarde du fichier "Mes meilleures photos" sur disque DVD rewritable.-

 

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