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ART ET SCIENCE
 
Septembre 2006

Quand la science enquête sur l'art préhispanique

Les Olmèques, les Mayas, les Aztèques, affectionnaient particulièrement le jade pour fabriquer masques, statuettes, objets variés. D'où venait la précieuse roche verte ? La science a la réponse.

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Des centaines d'objets en jade ayant été retrouvés en Amérique Latine, il est clair que les civilisations préhispaniques (civilisations d'Amérique latine antérieures à la conquête espagnole) raffolaient de cette roche par aileurs prisée en Asie. Les Mayas avaient même instauré une taxe sur la fameuse pierre.

Boutons antiques de jade-jadéite. Photo © DR

Mais où se la procuraient-ils ? Toutes les hypothèses ont été envisagées, dont celle d'une importation depuis la Chine. Mais, bien que possibles à cette époque, de tels échanges n'ont pourtant pas eu lieu. C'est donc qu'il devait exister des gisements américains.

Néanmoins, de nombreuses recherches menées au Mexique n'ont rien donné. Et puis, on a eu la bonne idée de regarder du côté du Guatemala.

Les premières prospections ont été effectuées dans les années 50 : elles ont permis de trouver, sur le versant nord du fleuve Rio Motagua, un certain type de jade, différent toutefois de celui qui était le plus exploité. En 1996, une mission française a finalement réussi à trouver le bon gisement, simplement sur l'autre versant du même fleuve.

Du jade ou des jades ?

Il faut dire qu'on peut trouver beaucoup de roches vertes très différentes, allant de l'émeraude à la roche la plus banale, en passant par notre jade. Vous avez peut-être en tête l'image d'un vert pur, translucide ? Il s'agit bien du type de jade le plus connu, mais pas de l'unique représentant de cette famille.

Le jade-jadéite est celui que nous connaissons le mieux. Le plus souvent (mais pas toujours), il est de couleur verte. Il est composé d'aluminium et de sodium. Ce type de jade est pur et très dense. Le jade-néphrite, également de couleur verte, est pour sa part composé de magnésium et calcium. Il est bien moins dense que le premier et c'est pour cela qu'il a souvent servi à fabriquer des outils polis.

Ces deux roches, en les regardant à l'œil nu, se ressemblent énormément, alors comment les différencier ? Et en particulier, comment savoir quel est le jade qu'utilisaient les Olmèques, Mayas et Aztèques (civilisations précolombiennes, de 1200 av. JC jusqu'au XIIIe siècle) pour fabriquer de nombreux masques et statuettes en jade ?

Une surprise à la clé

Pour cela, des échantillons archéologiques ont été soumis à l'analyse par microspectrométrie Raman, car la densité ne suffit pas à caractériser clairement un type. On peut ainsi savoir quels éléments chimiques (et leurs proportions) composent la roche. Ici, le résultat donne de l'aluminium et du sodium, donc du jadéite.

Mais la méthode permet aussi de retracer l'histoire géologique du matériau et de connaitre le gisement exact d'où il provient. Même s'il s'agit de la même pierre, elle aura une signature chimique différente selon sa carrière d'origine.

Pour nos objets préhispaniques, la surprise est incroyable : car les deux versants du Rio Motagua (où a été découvert, rappelons-le, le jade recherché) abritent, particularité unique au monde, deux jadéites différents. Au moment de leur formation, précisément lors de leur refroidissement, ces deux versants n'ont pas dû subir les mêmes conditions environnementales, notamment ne pas être soumis à la même pression.

Dans cette région du monde, la passion pour le jade s'est éteinte avec les premiers conquistadors espagnols, qui ont été plus attirés par l'or. C'est d'ailleurs à cause de cette conquête que les gisements aujourd'hui retrouvés ont été perdus pendant plusieurs siècles.

 

En savoir plus : Visiter Le Machu-Picchu

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