L'Internaute > Week−end
> Expositions > Le Douanier Rousseau
 EXPOSITION 
Mars 2006

Un douanier rêveur de jungles

Ce sont de grandes lianes vertes, d'immenses fleurs aux couleurs incroyables et des fauves en tout genre qui rodent sur les murs du Grand Palais. L'univers étrange, audacieux et exotique du Douanier Rousseau y est à découvrir jusqu'au 19 juin. Raillé par ses contemporains avant d'être considéré comme la figure emblématique de l'art naïf, Le Douanier, à l'aube du XXIème siècle, surprend encore.

Envoyer à un ami | Imprimer cet article
Pratique
Nom : Le Douanier Rousseau Jungles à Paris
Lieu : au Grand Palais, Paris
Dates : jusqu'au 19 juin
Tarifs : 10 euros / tarif réduit : 8 euros
Sur le Web : www.rmn.fr

Les jungles envahissent Paris
Issus de collections prestigieuses, publiques et privées, européennes, américaines, japonaises et russes, les 50 tableaux réunis pour l'exposition "Le Douanier Rousseau Jungles à Paris" témoignent d'un univers pictural exubérant, coloré, aux scènes exotiques simplifiées et fantastiques. Dans la douzaine de "jungles" présentées, la violence et la candeur se partagent une végétation luxuriante aux proportions irréelles, embellies de fleurs énormes, de soleils rouges, et d'animaux tantôt sympathiques et perplexes, tantôt sauvages et inoffensifs. Une jungle déconcertante, sortie tout droit d'un songe fascinant.

Un douanier imaginaire
Car Henri Rousseau garde une part de mystère. Modeste employé de l'Octroi, autodidacte devenu peintre sur le tard, il produit une œuvre décalée. On parle de rêve éveillé, d'imagination créatrice, et même, selon la formule d'André Breton, de "réalisme magique". Mais tous ces qualificatifs se perdent dans cette singulière vérité : le Douanier Rousseau n'a jamais quitté Paris.

Il a puisé l'essentiel de ses figures dans les imageries populaires, des cartes postales, des journaux illustrés, un album "Bêtes sauvages" de l'époque, et les seuls fauves et végétations tropicales qu'il ait jamais vus dans sa vie sont ceux du Jardin des Plantes, du Muséum d'Histoire Naturelle et du Jardin d'Acclimatation… Citadin en mal d'ailleurs ? Amateur naïf à l'imagination débordante ? Copieur roublard de décalcomanies ? Génie aux illuminations exotiques ?

Ce qui est certain, c'est que Le Douanier connaissait son talent : il "avait conscience de sa force", écrit Apollinaire. Si les images qui nous viennent immédiatement à l'esprit à l'évocation de son nom sont ses jungles, plus de la moitié de ses œuvres sont pourtant consacrées à des vues de Paris et de banlieues. S'infiltre dans ces toiles aux paysages urbains pourtant familiers, une étrangeté subtile et insaisissable. Dans ces décors presque démodés apparaît toute la complexité du peintre. Son étonnante capacité à détourner les thèmes de ses peintures fait doucement s'entrechoquer une sensation de réalité avec une indéfinissable impression d'hallucination. Dans ce jeu de formes et de couleurs, le rêve est directement plaqué sur le réel, sans proportions ni perspectives, rendant l'effet d'aplat plus intriguant encore.

Henri l'inconnu
Inclassable, Le Douanier, reconnu par les plus grands de son temps, comme Jerry, Picasso, Delaunay et Kandinsky, tandis que le grand public, le milieu de l'art et les critiques se gaussent de lui à l'unanimité. "Peu d'artistes ont été plus moqués durant leur vie que Le Douanier, et peu d'hommes ont opposés un front plus calme aux railleries, aux grossièretés dont on l'abreuvait" rajoute encore Apollinaire. Hormis quelques documents relatifs à sa carrière et aux affaires judiciaires auxquelles il a été mêlé, Le Douanier n'a laissé que très peu de traces.

Aujourd'hui consacré, sa peinture dément une classification trop hâtive. Son tableau "La Guerre", par exemple, renverse son image de peintre naïf, et montre qu'il est capable aussi de paysages dévastés et angoissants. Inlassablement, il fuit une place trop rangée, trop cadrée, et laisse ses natures fantastiques parler à sa place et les yeux globuleux de ses fauves nous renvoyer à nos propres interrogations.

EN IMAGES Les plus beaux tableaux du Douanier Rousseau
14 peintures
 
 Elodie Rothan, L'InternauteWeek End
 
Magazine Week−End
Envoyer | Imprimer
Haut de page