Alain Bernard, le nouvel espadon de la natation

Le nageur français de 24 ans a été la révélation des Championnats d'Europe en grand bassin d'Eindhoven. Portrait de ce géant, détenteur du record du monde du 100 mètres nage libre.

Laure Manaudou n'est plus seule à porter la natation française ! Alain Bernard, 24 ans, est désormais là pour l'épauler. Lors des championnats d'Europe d'Eindhoven, il a totalement éclipsé les performances de la championne olympique en battant le record du monde du 100 m nage libre à deux reprises puis celui du 50 m, devenant l'homme le plus rapide de l'histoire sur ces 2 distances.

Un nageur "superbement carrossé"

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Alain Bernard détient désormais les records du monde sur 50 m et 100 m nage libre. © FFN

L'éloge vient de la ministre des Sports, Roselyne Bachelot qui, après Chabal, a peut-être trouvé son nouveau chouchou en la personne d'Alain Bernard. La "carrosserie" du nageur est effectivement impressionnante : 1,96 m, 87 kilos, 2,05 m d'envergure... Comment en est-il arrivé là ?

Ses débuts au Cercle des Nageurs de Marseille sont assez difficiles. A 17 ans, le garçon originaire d'Aubagne nage le 200 m dos et le 400 m 4 nages. Il n'est pas très musclé, sa croissance est douloureuse, il multiplie les tendinites. Sa rencontre avec Denis Auguin, son coach depuis 8 ans, va changer son approche des choses. D'abord, Alain Bernard opte pour une distance plus courte : le 100 m nage libre. Mais en 2004, il manque les sélections pour les JO d'Athènes en raison d'une mononucléose. Ensuite, fin 2006, le nageur et son mentor rejoignent le pôle France d'Antibes.

Contrairement à Laure Manaudou, la nouvelle torpille de la natation s'est donc révélée sur le tard. Ses premiers faits d'armes ne remontent qu'à l'année dernière. En février 2007, il bat le record de France du 100 m nage libre en grand bassin en 48"81 et s'offre le meilleur temps mondial de l'année. Lors des championnats de France, en juin, le nageur du CN Antibes signe un chrono de 21"76 sur 50 m, ce qui constitue la 3e performance mondiale de tous les temps, à seulement 12 centièmes du record de monde de Alexander Popov. Mieux encore : sur 100 m, il bat le record de France pour la 3e fois en quelques mois avec un temps de 48"12. Il devient ainsi le deuxième nageur le plus rapide de l'histoire sur la distance, à moins de 3 dixièmes du record du monde de Pieter van den Hoogenband. Lors des championnats d'Europe en petit bassin en décembre, il s'empare de l'or sur 100 m nage libre.

Eindhoven : son talent éclabousse la compétition

Avec ces performances, Alain Bernard était attendu aux Championnats d'Europe en grand bassin d'Eindhoven. Mais personne ne l'imaginait à ce niveau ! En demi-finale du 100 m nage libre, il réalise une course époustouflante et bat le record du monde en 47"60, soit 24 centièmes de moins que le chrono de référence établi par Pieter Van den Hoogenband aux JO de Sydney en 2000. Mieux : en finale le lendemain, il améliore ce temps et termine la course en 47"50 ! Le grand blond entre dans la légende de la natation mondiale.

Et en demi-finale du 50 m nage libre, le dimanche 23 mars, il frappe encore les esprits en établissant un nouveau record du monde : 21"50. Il efface ainsi des tablettes le chrono de Eamon Sullivan pour 6 centièmes de seconde. Mais moins d'une semaine plus tard, l'Australien récupère son record en nageant en 21"41...

L'heure des polémiques : combinaison et "vitamines"

Evidemment, des telles performances suscitent l'interrogation, voire la suspicion, à l'heure où les cas de dopage se multiplient. D'autant plus qu'Alain Bernard ne s'était même pas qualifié pour la finale du 100 m des derniers Championnats du monde en 2007.

 
 
La combinaison LZR Racer de Speedo © Getty Images pour Speedo
 

Première polémique : sa combinaison l'a-t-elle aidé à réaliser ces chronos ? Alain Bernard porte la LZR Racer, mise au point par Speedo. Depuis sa sortie en février, plus de 10 records du monde ont été battus par des athlètes vêtus de cette combinaison : l'Américaine Natalie Coughlin, la Zimbabwéenne Kirsty Coventry, l'Australien Eamon Sullivan, le Français Alain Bernard... Dans les colonnes du journal "L'Equipe", Pieter Van Den Hoogenband, champion olympique en titre du 100 m libre, s'est emporté : "Elle flotte, c'est clair, je l'ai vue. C'est tellement plus facile d'être haut sur l'eau !" Problème : une combinaison qui permet une meilleure flottabilité est interdite par la Fédération internationale de natation (Fina).


Deuxième polémique : Alain Bernard a-t-il "trouvé les bonnes vitamines" comme l'a affirmé son rival italien Magnini (avant de se rétracter en invoquant "l'humour") ? Le nageur français a coupé court en déclarant : "Je sais ce que je mange et ce que je bois, je travaille dur pour vivre ça." Il a également révélé qu'il bénéficie d'une Autorisation d'usage thérapeutique (AUT) pour de l'asthme d'effort, une hyperactivité bronchique, traitée par des bouffées de ventoline. Or, la ventoline peut être un produit qui masque la prise d'amphétamines.

"L'asthme d'effort est extrêmement fréquent actuellement", a tenu à ajouter Jean-Claude Servetti, le médecin de la Fédération française de Natation, qui précise que 20 % de l'équipe de France bénéficient d'une AUT.

Objectif JO

Avec Alain Bernard, les chances de médailles françaises en natation à Pékin se multiplient. Lui qui avait raté les JO d'Athènes sera l'homme à abattre pour ses adversaires en août prochain. Et cette fois-ci, le grand blond compte bien être au rendez-vous...