La France paye-t-elle une "erreur" avec la hausse des taxes américaines sur le vin et les spiritueux ?

La France paye-t-elle une "erreur" avec la hausse des taxes américaines sur le vin et les spiritueux ? Dernière menace dans la guerre commerciale entre l'UE et les États-Unis : Donald Trump veut taxer les vins et spiritueux européens à 200%. Une annonce qui pourrait avoir des conséquences "dramatiques".

"Dans les conflits qui peuvent opposer l'Europe aux États-Unis, ce sont le vin et les spiritueux français qui trinquent". Le secteur viticole est "systématiquement otages de ces situations", a regretté au micro de Franceinfo, vendredi 14 mars, Jérôme Bauer, viticulteur en Alsace et président de la Confédération nationale des producteurs de vin à appellation d'origine contrôlée. Il réagissait à l'annonce de Donald Trump de taxer à 200% les vins et spiritueux français et européens.

L'escalade a débuté plus tôt durant la semaine, après l'entrée en vigueur des taxes de 25% sur les exportations européennes d'acier et d'aluminium aux États-Unis. En représailles, la Commission européenne a annoncé taxer une série de produits américains allant des motos aux alcools américains, essentiellement le whisky à partir du 1er avril. Si les mesures ne sont pas encore appliquées, elles ont motivé la surenchère de Donald Trump qui, dès le lendemain, a menacé de taxer à 200% les alcools européens.

Le Premier ministre, François Bayrou, a affirmé jeudi qu'il ne fallait pas "se laisser terrasser par des menaces de cet ordre" : "Il importe que nous montrions, nous, Européens, qui nous sommes et que nous ne cédons pas à ce genre de menaces." Laurent Saint-Martin, ministre du Commerce extérieur, avait affirmé plus tôt dans la journée que la France reste "déterminée à réagir" à la guerre commerciale instaurée par Donal Trump.

"Perdre le marché des États-Unis aurait des conséquences dramatiques"

Le ministre de l'Economie, Eric Lombard, a de son côté dénoncer une "guerre idiote" sur France 2, mais il n'envisage pas se faire marche arrière. Le ministre estime au contraire que "si on veut pouvoir négocier, il faut qu'on se mette à armes égales" et donc augmenter les tarif : "On va être dans une phase d'escalade. Cela s'est passé comme ça il y a 8 ans. Après on va discuter pour faire rebaisser la tension", tient-il à rassurer, rappelant que Donald Trump "a reconnu que les États-Unis pourraient être cette année en récession". Eric Lombard compte d'ailleurs participé lui-même aux négociations et a annoncé une prochaine visite aux Etats-Unis.

Le viticulteur Jérôme Bauer, lui, estime que la réponse européenne était "une erreur". "Vouloir taxer les bourbons américains c'était mettre le vin français et européen, et les spiritueux français et européens, au centre de la cible des représailles." Il appelle plutôt à "travailler ce dossier avec intelligence et d'une manière pragmatique". Sinon, "on restera le dommage collatéral de ce conflit" commercial, a-t-il assuré.

Car si la menace du président américain entrait en vigueur, des professionnels du secteur pourraient en souffrir, voire perdre leur activité, prévient Jérôme Bauer. "La viticulture française se porte [déjà] très mal [à cause] des problèmes structurels de baisse de consommation, [et] des problèmes géopolitiques", a-t-il indiqué, faisant référence à la guerre en Ukraine et aux taxes chinoises sur le cognac européen. Il insiste : "Perdre le marché des États-Unis aurait des conséquences dramatiques sur certaines entreprises." Le secteur compte environ 450 000 emplois directs et indirects.

Jérôme Bauer estime que l'heure est aux négociations. "Je pense qu'il y a encore moyen de réagir pour éviter" la mise en place de ces taxes. Et pas en poursuivant l'escalade des taxes, mais en ouvrant des discussions. "Il faut faire comprendre que dans ce conflit commercial, personne ne sortira gagnant."