2e vague du coronavirus : que disent les scientifiques ?

2e vague du coronavirus : que disent les scientifiques ? Inéluctable pour les uns, évitable pour d'autres, la deuxième vague de l'épidémie de coronavirus est sujette à débat. Qu'en pensent les scientifiques ?

[Mis à jour le 26 mai 2020 à 17h50] L'amorce du déconfinement a été entamée il y a maintenant trois semaines. Avec cette étape, certains craignaient une résurgence de l'épidémie. Pour l'heure, il n'en est rien… Au 25 mai 2020, le nombre de malades en réanimation continue de diminuer avec 1 609 patients. Pourtant le spectre de la seconde vague de l'épidémie de coronavirus plane.

Cette menace, Patrick Goldstein, directeur du SAMU du Nord et des urgences du CHU de Lille, "ne la voit pas arriver pour l'instant." Il a déclaré sur France3 : "On constate ici une diminution très claire de l'activité au niveau des urgences et en réanimation pour les patients Covid. La circulation du virus ralentit." Dans un entretien accordé à L'Internaute, Guy-André Pelouze, chirurgien des hôpitaux et responsable santé d'Objectif France, a expliqué : "Aujourd'hui, nous sommes face à une seconde phase et non à une seconde vague. L'épidémie prospère désormais de manière lente et endémique, c'est-à-dire que le virus est chez nous et il fait des petits progrès qui sont inéluctables avec le rétablissement de la plupart des activités humaines." Selon Daniel Camus, professeur et épidémiologiste à l'Institut Pasteur de Lille, "la probabilité d'une deuxième vague est faible" à condition que les gestes barrières soient respectés. L'épidémiologiste a alerté : "Il suffirait d'un tout petit relâchement pour que le virus en profite pour infecter une nouvelle partie de la population." Daniel Cohen a assuré que le Covid-19 "continue de circuler à bas bruit et il pourrait revenir pendant l'hiver, comme le virus grippal. Pendant cette période, la faible luminosité fait que nos défenses immunitaires fonctionnent moins bien. Le virus, lui, pourrait trouver des conditions favorables dans le froid et l'humidité. La conjonction des deux pourrait alors entraîner une recrudescence de l'épidémie de coronavirus, d'où la nécessité de trouver un vaccin ou un traitement."

Le coronavirus pourrait se réactiver et revenir chez une personne guérie

Jusqu'à présent, on tenait pour acquis qu'une personne contaminée par le virus développait des anti-corps et se trouvait immunisée. Oui mais... Le centre de contrôle des maladies infectieuses de Corée du Sud, en première ligne contre le coronavirus bien avant l'Europe, a publié des nouvelles inquiétantes. Sur 7329 cas de patients contaminés qui avaient terminé leur quarantaine et avaient été testés négatifs, 163 (soit 2,1%) ont été testés positifs une nouvelle fois. En moyenne, le virus a été retrouvé chez ces patients après 13,5 jours. Pour l'un d'entre eux, la durée qui a séparé la fin de la quarantaine et le retour du virus a été de 35 jours. Environ un tiers des patients testés positifs une seconde fois concernait de jeunes adultes âgés d'entre 20 et 30 ans. L'explication à ce retour du virus n'est pas encore certaine selon les scientifiques. Il pourrait s'agir de tests qui n'auraient pas bien fonctionné, indiquant qu'un patient était guéri alors qu'il ne l'était pas. Autre explication : le virus pourrait se "cacher" dans l'organisme, à des endroits où les prélèvements ne sont pas effectués. Il pourrait alors "hiberner" et revenir plus tard.

D'autres virus ont ce comportement, comme Ebola qui reste transmissible sexuellement pour des patients guéris ou même la varicelle qui peut revenir à l'âge adulte après une maladie enfant. La dernière possibilité pour expliquer ce retour du virus, qui serait la plus effrayante, serait qu'il pourrait se réactiver. Selon Michael Kinch, directeur du Centre for Research Innovation in Biotechnology and Drug Discovery at Washington University à St Louis aux Etats-Unis, ce n'est pas une réactivation à proprement parler qui se produirait mais une nouvelle contamination. En présence d'une autre personne contaminée, un patient guéri serait à nouveau infecté. La raison ? Les patients trop légèrement touchés ne créeraient pas suffisamment d'anti-corps pour pouvoir empêcher un retour du coronavirus en cas de nouvelle exposition.

L'immunité au coronavirus est-elle certaine après la guérison ?

Une autre problématique du coronavirus est son immunité. En Corée du Sud, plusieurs malades guéris avaient été testés à nouveau positifs. Depuis l'OMS a corrigé, il s'agissait de "faux positifs" causés par des fragments inactifs du virus. "S'il reste des cas de réinfection c'est en nombre très marginal. Et ils peuvent sans doute s'expliquer par des rebonds de la virémie", a indiqué au Figaro Étienne Decroly, directeur de recherche CNRS au laboratoire Architecture et fonction des macromolécules biologiques à Marseille. Les études sur le singe ont démontré une mémoire immunitaire certaine. "On suppose que chez l'homme l'immunité fonctionne aussi correctement, car dans 80 % des cas les individus guérissent seul", a rassuré Étienne Decroly.

Toutefois, compte-tenu du peu de recul sur la maladie il est impossible de définir la durée de cette immunité. D'autant qu'en fonction de la gravité de la maladie les concentrations d'anticorps varient. Aussi, une interrogation sur les anticorps facilitateurs (qui faciliteraient la réinfection) demeure. Pour l'heure, les données scientifiques se veulent rassurantes. 

Aux Etats-Unis, la crainte d'un retour cet hiver

Dans une interview au Washingon Post, le directeur du centre des maladies infectieuses américain, s'est dit pour sa part très inquiet d'un retour du Covid-19 cet hiver. Il estime qu'un cocktail entre la grippe saisonnière et le coronavirus serait détonnant. Surtout que le confinement a eu un autre effet inattendu : il a mis fin à la grippe saisonnière avec environ 1 mois et demi d'avance. Hors c'est la fin de la grippe saisonnière au printemps qui permet aux modèles épidémiologiques d'anticiper la prochaine vague. Et donc de concevoir des vaccins adaptés, incluant la protection contre les virus "du moment".

En effet, si elle est dénommée chez année "grippe", cette maladie est en effet causée chaque année par un ou des virus différents. Tout le travail des scientifiques est d'estimer au printemps quels seront les virus qui seront présents six mois plus tard et de les inclure dans le vaccin annuel. Faute d'informations fiables, le vaccin pourrait être cette année beaucoup moins efficace car risque de ne pas cibler tous les virus circulant. L'engorgement du système de santé aux Etats-Unis provoqué par une grippe sévère et un Covid-19 de retour serait bien pire que ce qui a été connu entre mars et avril.

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