Incendies au Canada : une saison des feux historiques, la superficie de la Grèce a déjà brûlé

Incendies au Canada : une saison des feux historiques, la superficie de la Grèce a déjà brûlé Les incendies au Canada sont d'une ampleur inédite en 2023. Ils ont déjà détruit plus de 14 millions d'hectares de forêt, soit l'équivalent de la superficie de la Grèce. Les ordres d'évacuation se multiplient.

[Mis à jour le 23 août 2023 à 15h06] Plus de 14 millions d'hectares, dépassant ainsi la superficie totale de la Grèce, ont été dévastés par les flammes au Canada en 2023. Et le nombre d'incendies en cours demeure à un niveau historique, dépassant la barre des mille depuis plusieurs mois. Face à ces chiffres saisissants, les ordres d'évacuation se multiplient à travers le territoire nord-américain. Des dizaines de milliers de résidents ont été contraints de quitter leurs foyers dans les régions des Territoires du Nord-Ouest et de la Colombie-Britannique. Avec des incendies d'une ampleur monumentale depuis le mois de mai, les pompiers canadiens font face à un manque d'effectifs et à un épuisement qui entravent leurs efforts pour maîtriser la totalité de ces feux dévastateurs.

1 037 feux qui étaient encore actifs au Canada, à la date du 23 août 2023, d'après le Centre interservices des feux de forêt du Canada (CIFFC). Le pays est confronté à une vague d'incendies sans précédent dans son histoire, qui a débuté en mai dans la province de l'Alberta, située dans l'ouest du pays. Parmi ces 1 037 feux actifs, 652 étaient hors de contrôle, 161 étaient contenus et 224 étaient maîtrisés. 

Les 20 000 habitants de Yellowknife, la capitale des Territoires du Nord-Ouest, ont reçu l'ordre d'évacuer la ville. "La ville ne fait pas face à un danger immédiat (…) mais, sans pluie, il se peut que le brasier gagne les environs de la ville ce week-end", a prévenu Shane Thompson, ministre de l'Environnement de ce territoire fédéral. Des propos rapportés par Le Monde. Bowinn Mann, responsable des situations d'urgence de la Colombie-Britannique, a précisé que 30 000 personnes ont reçu l'ordre d'évacuer dans son état et que 36 000 autres habitants doivent se préparer à une éventuelle évacuation. "Nous insistons sur l'importance absolue de suivre immédiatement les ordres d'évacuation. C'est une question de vie ou de mort pour les gens qui se trouvent dans ces propriétés, mais aussi pour les secours qui sont parfois contraints de revenir et de prier les gens de partir", a-t-elle témoigné en conférence de presse.

Le risque d'incendie au Canada devrait être "supérieur à la normale" jusqu'au mois de septembre, rapportait Libération à la mi-août, citant Michael Norton, directeur général du Service canadien des forêts.

Le changement climatique aurait "rendu sept fois plus probables" les incendies

Le dérèglement climatique n'est pas étranger à l'ampleur historique des feux au Canada. Des chercheurs du réseau scientifique international World Weather Attribution ont publié une étude sur ces incendies et les conditions météorologiques à l'origine des feux de forêts entre mai et juillet 2023 au Québec. Yann Boulanger, un membre canadien de cette étude, a décrypté auprès du Monde les résultats : "Le changement climatique allonge la saison des feux, les rend plus fréquents, plus intenses. Les incendies ont des impacts excessivement importants sur la nature, mais aussi sur l'économie, sur les infrastructures, sur les populations. Il est important d'essayer de le mesurer car cela peut être encore pire dans les années à venir. Et cela permet aussi de mieux communiquer, car nous ne sommes vraiment pas non plus à l'abri des climatosceptiques et des théories conspirationnistes."

L'étude affirme que cette saison historique d'incendies au Canada, avec 14 millions d'hectares de brûlés alors que le précédent record était de 7,6 millions en 1989, pourrait se reproduire une fois tous les 25 ans. Cette durée serait même divisée par deux en cas de réchauffement du climat de deux degrés. Friederike Otto, spécialiste du climat et de l'environnement à l'Imperial College de Londres, a expliqué à Franceinfo que "tant que nous ne cesserons pas de brûler des combustibles fossiles, le nombre d'incendies de forêt continuera d'augmenter, brûlant des zones plus vastes pendant des périodes plus longues".

Un pays qui brûle depuis mai

C'est au début du mois de mai dernier que les premiers incendies d'ampleur se sont déclarés au Canada, dans la province de l'Alberta située à l'ouest du pays, comme le rappelle Le Parisien. Fin mai, c'est la Nouvelle-Ecosse, à l'est du pays, qui a été à son tour frappée par les flammes. Au début du mois de juin, la province de la Colombie-Britannique, située au nord-ouest du Canada, a elle aussi été touchée par les incendies. D'autres feux d'ampleur se sont également déclarés à l'est du pays en juillet, au Québec. En cette mi-août, c'est au tour des Territoires du Nord-Ouest de faire face au fléau des flammes, comme indiqué plus haut dans cet article. 

Si la saison des feux de forêt commence habituellement au mois de mai dans le pays, comme le rapporte Le Parisien, ils ont été favorisés cette année par une sécheresse importante qui frappe le Canada depuis le début de l'année, mais aussi par des températures élevées. En raison de sa situation géographique, le pays se réchauffe plus rapidement que le reste du monde. Un rapport d'Environnement Canada publié en 2019 affirme ainsi que le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète, indique Le Figaro

Des conséquences climatiques désastreuses

Le Canada fait face depuis plusieurs années à des événements météorologiques extrêmes comme ces feux d'ampleur, rappelle franceinfo. Le changement climatique amplifie leur intensité et leur fréquence. Dans une sorte de cercle vicieux, les feux de forêt qui touchent actuellement le pays ont engendré des émissions de dioxyde de carbone record, ce qui ne fait qu'aggraver le changement climatique. "Nos estimations préliminaires indiquent que les émissions de la saison en cours ont dépassé le milliard de tonnes de dioxyde de carbone équivalent", a ainsi indiqué Michael Norton, directeur général du Service canadien des forêts, le 11 août dernier, rapporte Libération.

Dans les prochaines années, le gouvernement canadien estime même que "la superficie dévastée par les feux de forêt devrait doubler d'ici 2050 à cause des changements climatiques." En réponse, le pays a lancé la mission "GardeFeu" : un système satellitaire pour surveiller ses forêts. Mais l'Agence spatiale canadienne ne prévoit sa mise en service qu'en 2029. Un laps de temps important à l'heure où les feux menacent de plus en plus.

Des sapeurs-pompiers trop peu nombreux au Canada 

Les sapeurs-pompiers canadiens peinent à lutter face à l'ampleur de la saison des feux dans le pays cette année, faisant face à une pénurie de main-d'œuvre, comme le rappelle Le Parisien. Le quotidien francilien indique que près de 5 000 pompiers d'autres pays ont été envoyés pour leur venir en aide depuis les premiers incendies en mai dernier, et que les forces armées canadiennes ont également été appelées en renfort. L'Australie et les Etats-Unis font notamment partie des pays qui ont envoyé des équipes de pompiers au Canada, tout comme la France. 

Quelles sont les solutions pour le Canada ?

Parmi les solutions possibles pour répondre au fléau des feux de forêt, un débat existe au Canada sur la possibilité de miser sur des arbres moins inflammables pour remplacer les conifères qui caractérisent les forêts canadiennes. Certaines provinces se montrent également ouvertes au retour d'une technique des autochtones pratiquée depuis des millénaires : le brûlage dirigé. Il s'agit d'"éviter la formation d'un lit de végétaux qui pourrait servir de combustible à un éventuel incendie" en brûlant la végétation la plus combustible et le bois mort avant la saison estivale, selon le service départemental d'incendie et de secours du Var.