Rima Hassan en prison en Israël : pourquoi l'eurodéputée n'a pas signé l'acte d'expulsion
Interpellée avec d'autres militants par les autorités israéliennes à bord du navire humanitaire Madleen qui se rendait à Gaza, l'eurodéputée Rima Hassan a refusé d'être expulsée et renvoyée en France avec trois autres ressortissants.
Quel sort Israël réserve-t-il aux militants qui se trouvaient à bord du Madleen ? Le voilier humanitaire qui transportait 12 militants, dont l'activiste suédoise Greta Thunberg et l'eurodéputée de LFI Risma Hassan, a été intercepté par l'armée israélienne alors qu'il se dirigeait vers la bande de Gaza dans la nuit de dimanche à lundi. Le navire a été dérouté vers le port d'Ashdod, un grand port commercial situé au sud d'Israël et à proximité de Gaza, tandis que les passagers ont été transférés à l'aéroport de Tel-Aviv a indiqué le ministère israélien de la Défense. Les autorités de l'Etat hébreu ont ensuite assuré que les militants interpellés "ne [les] intéressent pas" et "vont être mises dans des avions" selon les mots de l'ambassadeur d'Israël en France, Joshua Zarka.
Au moins 7 des 12 militants du Madleen ont cependant refusé d'être renvoyés dans leur pays respectif selon une source proche des avocats des militants. Parmi eux, cinq sont Français et l'une d'elle n'est autre que l'élue européenne Rima Hassan. En refusant leur expulsion par Israël, les militants s'exposent à des risques dont un séjour en prison, qui semble planifié. "Ceux qui refusent de signer les documents d'expulsion et de quitter Israël seront traduits devant une autorité judiciaire, conformément à la loi israélienne, pour autoriser leur expulsion", a précisé le ministère des Affaires étrangères israélien sur X. Mais en attendant le jugement, les militants actuellement retenus par les autorités à l'aéroport devraient être placés en détention, pour 96h. Selon le média i24, Rima Hassan et les autres activistes du bateau ont déjà été transféré au centre pénitentiaire de Giv'on, pour être expulsée d'ici la fin de la semaine "de force". "À partir du moment où la personne dit : 'je refuse de partir', elle va en prison", a quant à lui confirmé l'ancien ambassadeur de France en Israël Éric Danon sur franceinfo ce mardi 10 juin.
Pourquoi les activistes ont-ils refusé d'être expulsés ? Selon le média israélien Kan, ils auraient refusé de signer les documents, sans présence de leurs avocats. Personne ne sait à ce stade quelles exigences Israël a officiellement formulé dans ces documents. Selon l'équipe parlementaire de Rima Hassan, qui a publié un communiqué de presse; les autorités israéliennes "ont affirmé que l’équipage serait entré illégalement sur le territoire israélien et ont prononcé à leur encontre une interdiction de territoire de cent ans". Et de préciser : "Les membres de l’équipage se sont alors vu présenter un document les invitant à reconnaître cette prétendue entrée illégale. Ils avaient le choix entre le signer – et être immédiatement expulsés – ou refuser, et être déférés devant un juge israélien".
Les autorités du pays ont par ailleurs plusieurs fois formulé, notamment, leur souhait que les activistes visionnent "une vidéo montrant les atrocités commises le 7 octobre 2023 contre des militants détenus qui ont tenté de défier le blocus israélien de Gaza", comme l'annonçait le ministre de la Défense dans un communiqué il y a quelques heures. Cette vidéo, dont certains extraits ont été diffusé à l'Assemblée nationale l'an dernier montre les attaques terroristes du Hamas avec des images non censurées des atrocités.
Le cas de Rima Hassan pose cependant question : en tant qu'eurodéputée, elle pourrait d'une immunité diplomatique. Or, l'arrestation de l'élue par les autorités israéliennes contrevient à cette immunité et un placement en détention pourrait constituer une nouvelle violation. "Nous avons été en lien avec les autorités israéliennes pour prévenir tout incident", a précisé le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot à ce sujet sur BFMTV. Pour Éric Danon, en revanche, Rima Hassan n'a pas de statut de protection particulier, "elle n'agit pas dans le cadre de son mandat parlementaire".
La France a demandé à Israël d'assurer la "protection" de ses six ressortissants ainsi que l'organisation de leur retour sur le sol français comme l'a déclaré Emmanuel Macron lundi. Le président de la République n'a toutefois pas évoqué le scénario envisagé en cas de refus des militants d'être expulsés vers la France.
L'interception du bateau et des militants est-il une violation du droit international ?
Le voilier Madleen, voguant sous pavillon britannique, avait pour mission d'apporter du matériel humanitaire jusqu'à la bande de Gaza, sans passer par Israël, pour "briser le blocus israélien". L'Etat hébreu a justifié l'interception du navire en assurant qu'il "ne permettra à personne de briser le blocus de Gaza" comme indiqué par le ministre de la Défense, Israël Katz, en réponse à ce qu'il a considéré comme une provocation. Il a également accusé les militants d'avoir "essayé de mettre en scène une provocation médiatique dans le seul but de se faire de la publicité".
L'interception du bateau a cependant été qualifiée d'"illégale" au regard du droit international par plusieurs personnalités. C'est le cas de Jean-Luc Mélenchon, de l'eurodéputée Manon Aubry (LFI), ainsi que du ministère turc des Affaires étrangères et l'Iran. Selon eux, ainsi que plusieurs experts du droit international, l'intervention de l'armée israélienne était illégale puisque le bateau se situait encore dans les eaux internationales au moment de l'interception. Une information confirmée par le traçage en ligne du Freedom Flotilla. Interrogé sur BFMTV, l'ambassadeur israélien en France, Joshua Zarka, a affirmé que le navire a été intercepté "quand il est entré dans les eaux territoriales israéliennes".
La Coalition de la flottille pour la liberté, organisation qui a affrété le navire a elle aussi dénoncé une "violation manifeste des lois internationales". "Israël n'a pas d'autorité légale pour détenir les volontaires internationaux à bord du Madleen", a déclaré sa responsable, Huwaida Arraf.
Le gouvernement prudent sur ses mots
Si le terme "illégal" a facilement été prononcé par plusieurs personnalités, le gouvernement français se veut plus prudent, même s'il a pris des dispositions pour la sécurité de ses ressortissants. Interrogé à ce sujet, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a évité soigneusement le sujet de la légalité de cette action : "Nous établirons la licéité de cet arraisonnement et nous le qualifierons." Il a assuré devant la presse que le gouvernement avait "mis en garde" les six passagers français du navire avant le début de l'expédition.
15:58 - LFI donne des indications sur les documents que Rima Hassan a refusé de signer
Mathilde Panot, mardi, lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale, a réagi aux propos de la diplomatie française sur le sort des ressortissants qui n'ont pas accepté leur expulsion. "Ce ne sont pas eux qui ont refusé de rentrer en France, mais ils ont refusé de signer un papier qui, en plus de prononcer une interdiction de cent ans du territoire israélien, mettait comme condition de reconnaître que leur entrée sur le territoire était illégale, ce qui est évidemment absolument faux", a-t-elle déclaré. Jean-Luc Mélenchon a posté sur X, en réaction : "Rima a refusé avec raison".
15:22 - La diplomatie française s'agace de l'attitude de Jean-Luc Mélénchon.
"Un certain nombre de responsables politiques [français] critiquant les agents du Quai d’Orsay et de notre ambassade sur place, alors même qu’ils exercent leurs missions (…) dans des conditions extrêmement difficiles. (...) A ce jour, deux (Français) ont accepté de signer les papiers les expulsant du territoire israélien et leur permettant de rentrer dans notre pays. Quatre l’ont refusé à ce jour", a annoncé M. Barrot, ministre des Affaires étrangères, sur X. Cette déclaration fait suite à celle de Jean-Luc Mélenchon, qui a notamment fustigé la "nullité des services français"; en affirmant que son parti et les familles des Français retenus en Israël n’avaient "aucune nouvelle".
11:02 - Pas d'immunité pour Rima Hassan
Pour l'ancien ambassadeur Éric Danon, interrogé par franceinfo, il n'y a aucune raison pour que Rima Hassan bénéficie d'une protection particulière puisqu'elle "n'agit pas dans le cadre de son mandat parlementaire". Le diplomate considère par ailleurs que les activistes qui ont été interpellés ont monté une "opération de communication" et qu'ils ont souhaité "faire un peu plus le buzz" avec leur navire.
10:42 - "À partir du moment où la personne dit : 'je refuse de partir', elle va en prison"
L'ancien ambassadeur de France en Israël Éric Danon vient de s'exprimer sur franceinfo et pour lui, les choses sont très claires concernant Rima Hassan et les autres activistes français qui ont refusé de signer les documents d'expulsion : ""Si la personne ne veut pas partir, elle ne part pas", a-t-il dit, ajoutant : ""À partir du moment où la personne dit : 'je refuse de partir', elle va en prison". Selon lui, "il y a deux lignes à remplir pour dire qu'on accepte de partir. Même si ce papier n'est pas signé, la personne ne part pas et donc elle va en prison assez rapidement dans l'attente d'une instruction".
10:20 - Rima Hassan "restera en prison"
Selon le média i24News, les autorités israéliennes ont acté du sort de Rima Hassan : "elle restera en détention au centre pénitentiaire de Giv'on, dans le centre du pays, pour une durée de 96 heures, après quoi elle sera expulsée de force", écrit le journal en ligne, spécialisé sur l'actualité d'Israël.
09:12 - Rima Hassan et quatre autres Français ont refusé d'être expulsés d'Israël
Six Français qui se trouvaient à bord du voilier humanitaire Madleen ont été interpellés par les autorités israéliennes. Parmi eux, un seul a accepté d'être renvoyé en France a fait savoir le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, ce mardi 10 juin. "Un de nos compatriotes a choisi de signer le formulaire israélien acceptant son expulsion accompagnée sans attendre la décision de justice. Il devrait regagner la France dès aujourd’hui". En ce qui concerne les cinq autres personnes, parmi lesquelles se trouve l'eurodéputé insoumise franco-palestinienne Rima Hassa, ils vont être conduit devant la justice israélienne pour un "processus d’expulsion forcée" et "leur éventuelle expulsion aura lieu après décision du juge israélien dans les prochains jours", a précisé le ministre dans son communiqué.