Macron sur les retraites : farouchement opposé au report de l'âge de départ... en 2019

Macron sur les retraites : farouchement opposé au report de l'âge de départ... en 2019 Le chef de l'Etat a incontestablement changé d'avis sur la réforme des retraites : en 2019, il avait publiquement soutenu que décaler l'âge de départ à la retraite n'était pas une bonne idée.

"Tant qu'on n'a pas réglé le problème du chômage dans notre pays, franchement, ça serait assez hypocrite de décaler l'âge légal. Quand aujourd'hui on est peu qualifié, quand on vit dans une région en difficulté industrielle, quand on est soi-même en difficulté, qu'on a une carrière fracturée... Bon courage déjà pour arriver à 62 ans ! C'est ça la réalité de notre pays". Cette phrase n'a pas été prononcée par un représentant de la CGT ou par une figure de la Nupes, mais par Emmanuel Macron, le 25 avril 2019.

Certes, la crise sanitaire du Covid et le creusement du déficit public sont de nouveaux paramètres incontestables depuis cette déclaration. Certes, Emmanuel Macron a aussi revu sa copie sur le sujet et l'a fait savoir durant la dernière campagne présidentielle. Mais l'argumentaire du chef de l'Etat sur l'inefficience d'un report de l'âge légal pour accéder à la retraite ne peut que prêter à sourire.

Que disait-il exactement ? Le 25 avril 2019, donc, le président de la République organisait une conférence de presse dans le cadre du "Grand Débat national", réponse formulée à la crise des gilets jaunes. Il avançait alors que l'économie française nécessitait structurellement davantage de temps de travail des Français, mais indiquait que reculer l'âge de départ pour la retraite était une mauvaise idée. Le patron du PS, Olivier Faure, s'est d'ailleurs amusé de la force de la démonstration, exposée par Emmanuel Macron ce jour-là.

"On doit travailler plus longtemps parce qu'on vit plus longtemps. C'est du bon sens. Quand je regarde notre pays aujourd'hui, par rapport à il y a 40 ans, l'espérance de vie n'a cessé d'augmenter et l'âge d'entrée sur le marché du travail n'a cessé de reculer parce qu'on fait plus d'études", disait-il. Il s'interrogeait alors aussi sur les manières d'y parvenir : "Faut-il reculer l'âge légal qui est aujourd'hui à 62 ans ? Je ne crois pas. [...] Je me suis engagé à ne pas le faire et c'est mieux, sur un sujet aussi important, de faire ce qu'on a dit. Pourquoi ? On laisse 62 ans comme âge légal, pour faire une réforme beaucoup plus large, beaucoup plus profonde qui est de créer ce nouveau système par point, qui va permettre de corriger les vraies injustices du système que sont les régimes spéciaux. [...] Et ça c'est beaucoup plus profond, plus ambitieux et il ne faut pas le compromettre en bougeant l'âge légal".

"On doit gagner la bataille du plein emploi"

Emmanuel Macron donnait un argument bien plus solide dans la suite de son exposé, en faisant une analyse sur le marché du travail des séniors et à l'inefficacité de ne bouger que le curseur de l'âge de départ à la retraite : "On va nous dire : 'Il faut maintenant aller à 64 ans. Vous ne savez déjà plus comment faire après 55 ans, les gens vous disent : 'Les emplois c'est plus bon pour vous'. C'est ça la réalité, c'est le combat qu'on mène, on doit d'abord gagner ce combat avant d'aller expliquer aux gens 'Mes bons amis, travaillez plus longtemps !' [...] J'invite les gens qui, de manière simpliste, disent 'C'est ça la solution', à d'abord regarder notre société. On doit gagner la bataille du plein emploi'".

Lors de cette prise de parole, le taux de chômage en France était de 8,1%, selon les données de l'Insee. Au 3e trimestre 2022, il était de 7,3%. Assez pour dire que la "bataille du plein emploi" a été gagnée ? A ce débat, il faudrait d'ailleurs ajouter une donnée plus pertinente encore : le taux d'emploi des 55-64 n'est que de 56% en France, selon les données de la Dares, publiées dans un rapport d'avril 2022. Des chiffres qui viendraient facilement s'insérer dans l'argumentaire du chef de l'Etat, en 2019, pour lui donner du crédit.