La réforme des retraites à l'Assemblée nationale : les stratégies de l'opposition
La réforme des retraites arrive à l'Assemblée nationale le 6 février et les forces de l'opposition sont déterminés à faire barrage au texte. Que ce soit dans l'hémicycle ou dans la rue, à chacun sa stratégie.
Trois jours de débats en commission des Affaires sociales et seulement deux articles sur les vingt que compte la réforme des retraites ont été traités. Sur les plus de 7000 amendements déposés, seule une partie infime a été débattue. De quoi annoncer la couleur des débats qui se préparent à l'Assemblée nationale dès lundi 6 février et l'arrivée du projet de loi dans l'hémicycle. Avec plus de 20 000 amendements déposés par les différents groupes politiques, les débats vont avancer au pas. Pourtant, les députés seront tenus par le temps à cause de l'article 47.1 de la Constitution qui limite à 50 jours l'examen du texte au Parlement et à seulement 20 jours les débats au palais Bourbon. Malgré les contraintes, les oppositions se sont mises en ordre de marche pour contester la réforme des retraites et tenir tête au gouvernement.
La gauche allie amendements et manifestations contre la réforme des retraites
Une fois n'est pas coutume, la Nupes est l'auteur de 18 000 amendements sur les 20 000 déposés contre la réforme de retraites. Accusée de jouer la carte de l'obstruction parlementaire et de faire le jeu de la majorité, La France insoumise - force majorité de l'alliance de la gauche - se défend et explique vouloir avec toutes ces rectifications "mettre en lumière l'immense régression sociale imposée par cette réforme" et "forcer le gouvernement à s'expliquer sur chaque article de son projet de loi". Ce sont surtout trois points centraux du texte qui sont visés : le report de l'âge de départ à 64 ans, l'augmentation de la durée de cotisation et les critères de pénibilité.
Mais la gauche, si elle mène le combat parlementaire à coups d'amendements, est aussi présente sur le front des manifestations contre la réforme des retraites. A chaque journée de mobilisation, les élus de la gauche se joignent aux cortèges aux côtés des Français et des syndicats. Certains font même le lien entre les deux luttes comme Sandrine Rousseau qui le 31 janvier a participé aux mobilisations puis a rapporté les paroles des manifestants dans l'hémicycle.
Le Rassemblement national pense au référendum
L'extrême droite est bien absente des cortèges, sa présence n'étant pas souhaitée par les syndicats. Un point qui ne pose cependant pas de problème aux élus du Rassemblement national qui croient plutôt au pouvoir des institutions. "Notre rôle, c'est de mener l'opposition à l'Assemblée nationale", a rappelé Marine Le Pen depuis le palais Bourbon une semaine avant l'arrivée du texte. Mais le combat ne doit pas tant passer par les amendements, seulement 200 ont été déposés par le parti à la flamme. Un chiffre qui vaut au RN d'être qualifié d'"opposition de façade" par la gauche. Non, l'extrême droite a préféré miser sur la motion référendaire - à noter que la Nupes avait aussi déposé une motion, mais le tirage au sort a favorisé le RN -.
Si la motion est votée alors la réforme des retraites sera soumise au vote des Français, mais encore faut-il que les deux assemblées parlementaires votent la motion à la majorité et que le président de la République, à l'origine de la réforme, consente à l'organisation du référendum. Ce qui n'est pas gagné d'avance.
Les Républicains veulent peser sur la réforme des retraites
Dans le camp des Républicains pas question de faire barrage à la réforme des retraites, en revanche la mouture actuelle du texte ne fait pas l'unanimité auprès des députés de la droite. Alors que le chef de l'Etat et la Première ministre pensaient s'être assurés le soutien des élus LR, des divisions internes ont rebattu les cartes. Les députés se sachant indispensables à la majorité pour faire adopter le texte souhaitent jouir de cette position pour modifier la réforme selon leurs envies. Plusieurs modifications ont déjà été faites (report de l'âge à 64 au lieu de 65 ans ou la revalorisation des retraites). Mais certains en veulent plus.
Ils seraient entre 10 et 20 députés issus de la droite dite populaire a jugé le texte encore trop injuste. C'est peu mais suffisant pour remettre en question la majorité recherchée par le gouvernement. Ces élus affichent d'autres exigences qui donnent à la majorité à réfléchir. Les Républicains de leur côté pourraient être les gagnants en pesant sur la version finale de la réforme.
Calendrier de l'examen de la réforme des retraites à l'Assemblée
- Du 30 janvier au 1er février 2023 : examen du texte à la commission des affaires sociales
- Du 6 février au 20 février 2023 : examen du texte en séance - sauf si adoption en commission
- A partir du 17 février : examen du texte par le Sénat en première lecture
- 4 mars 2023 : examen du texte en commission mixte paritaire (une délégation de députés et de sénateurs)
- 26 mars : à cette date, faute d'accord, le gouvernement pourra demander l'arrêt des débats : le texte est en effet inséré dans le projet de budget rectificatif de la Sécu, qui limite à cinquante jours au total les débats au Parlement.