Péage urbain : le projet abandonné, pas de péage positif non plus ?

Péage urbain : le projet abandonné, pas de péage positif non plus ? PEAGE URBAIN - Le péage urbain, alias "tarif de congestion", est a priori abandonné par le gouvernement. Le projet de péage positif serait lui aussi abandonné.

[Mis à jour le 19 décembre 2018 à 10h23] Le projet de péage urbain à l'entrée des grandes villes françaises va-t-il finalement être abandonné ? Après un abandon global du projet par le gouvernement (une information révélée par Le Monde le 26 novembre dernier), la métropole de Lille a quant à elle abandonné son projet de péage positif. Le ministère des Transports invoque le "faible nombre de collectivités à avoir manifesté leur intérêt à utiliser cet outil" pour justifier l'abandon du péage urbain. En effet, certaines d'entre elles avaient même décrié le principe du péage urbain : Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, avait qualifié le péage urbain de "discriminatoire" pour les ménages "à faibles revenus".

L'idée derrière le péage urbain consistait à faire payer l'accès routier aux villes de plus de 100 000 habitants. Le montant serait également plus important pour les villes de plus de 500 000 habitants. La mise en place du péage urbain se ferait sur décision des villes, et non de l'État. Le système de péage urbain est déjà présent dans plusieurs grandes métropoles européennes. Pour tout savoir sur le projet de péage urbain, découvrez notre dossier spécial consacré à la loi sur l'orientation des mobilités.

Péage urbain : comment ça marche ?

Le système de péage urbain dans les grandes villes sera se matérialise par un système de téléservice (des caméras lisant les plaques d'immatriculation et des marquages au sol) qui enregistre vos allées et venues dans la ville et vous envoie une facture mensuelle par la suite. Il devrait aussi être possible de payer le péage urbain avant d'entrer dans le périmètre, peut-être via un abonnement. Si le péage urbain est appelé "tarif de congestion", c'est car le gouvernement veut bel et bien réduire la circulation automobile autour et à l'intérieur des villes, en particulier aux heures de pointe.

Péage urbain : les villes concernées

Les péages urbains sont réservés aux grandes villes. Le projet de péages urbains ou "tarif de congestion" concerne les villes de 100 000 habitants ou plus. Les très grandes villes de plus de 500 000 habitants, comme Paris, Marseille ou Lyon sont aussi concernées. Les villes sont libres de choisir ou non si un péage urbain est installé sur leur territoire. D'après la sénatrice Fabienne Keller (Agir), le péage urbain ne serait payant "qu'en semaine, aux heures de pointe entre 7 heures et 18h30". La présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse dit en tout cas non au péage urbain à Paris. "Cela couperait la région en deux en accroissant la fracture sociale et territoriale", déplore Valérie Pécresse. Anne Hidalgo, quant à elle, dit oui à ce projet à plusieurs conditions : que la gratuité des transports en communs soit financée, que le prix du péages soit réduit en heures creuses, et qu'un accord soit formé dans le cadre du Grand Paris.

Beaucoup de grandes villes de province sont pour le moment contre l'installation d'un péage urbain sur leur territoire. Selon La Dépêche, le maire-adjoint en charge des transports de Toulouse, Jean-Michel Lattes, serait par exemple farouchement contre. "Faire payer les habitants de banlieue pour venir dans Toulouse serait une pratique discriminatoire", indique-t-il au journal local. Pas de péage urbain prévu à Rennes non plus : le vice-président de Rennes Métropole délégué aux transports, Jean-Jacques Bernard, indique à Ouest-France que "l'instauration d'un péage urbain n'est clairement pas une option retenue" car "la Métropole entend saisir d'autres leviers" pour améliorer la qualité de l'air, comme "la massification du covoiturage du quotidien". Quant à la présidente de la métropole Aix-Marseille Provence, Martine Vassal, elle rejette par exemple en bloc cette idée de péage urbain selon La Provence.

A Strasbourg, le maire Roland Ries pense que "les populations ne sont pas prêtes à ça". Roland Ries assure à 20 Minutes que "rien ne se fera avant les élections municipales de 2020". Du côté de Bordeaux, le maire Alain Juppé a écarté au micro de France Bleu Gironde l'idée d'installer un péage urbain. "Si on met cela en place, tous ceux qui sont à l'extérieur vont nous dire que la Métropole se barricade", a déclaré Alain Juppé. "La question pourrait éventuellement se poser sur les poids lourds, mais pas sur les véhicules individuels", a poursuivi le maire de Bordeaux. A Nantes, Nantes Métropole assure à 20 Minutes vouloir "agir sur d'autres leviers pour réduire la part de la voiture, comme le covoiturage, l'autopartage, le développement des transports collectifs et du vélo" ou encore "l'extension des parkings-relais". La mairie de Caen, dans le Calvados, promet elle aussi au micro de Tendance Ouest qu'il est "hors de question" d'instaurer un péage urbain aux entrées de la ville, pour ne pas "affoler les automobilistes". Enfin, dans les Alpes-Maritimes, Nice compte plutôt sur les nouvelles lignes de son tramway pour "supprimer 800 bus et réduire de 20% la circulation automobile", indique la ville à 20 Minutes. Enfin, au Havre, déjà entouré de ponts à péage et du péage de l'autoroute A29, le refus de la mairie est catégorique. "Notre décision est ferme et définitive", assure le maire Luc Lemonnier à Ouest-France.

Péage urbain : péage positif

La ville de Lille et la métropole Lilloise auraient abandonné leur projet de péage positif, qui avait pour but de rétribuer jusqu'à 80 euros par mois les automobilistes qui empruntent les autoroutes A1, A25, A23, A27, A22 et la N41 tous les jours en évitant les heures de pointe. Selon France Bleu Nord, "le dispositif a fait les frais d'une modification du projet de loi d'orientation des mobilités". Le péage urbain a en effet globalement été abandonné, et l'idée d'un péage positif semble être passée aux oubliettes également. "Je regrette que nous n'ayons pas pu garder ce volet positif pour nos habitants et leur pouvoir d'achat", a déclaré Damien Castelain, le président de la métropole européenne de Lille (MEL). Selon France Bleu, ce "rétropédalage" découle du "peu d'intérêt" qu'ont eu les métropoles envers ce dispositif, ainsi que des "revendications du mouvement des gilets jaunes qui dénonçaient le fait de devoir payer pour circuler en centre-ville".

Péage urbain : quel prix ?

Le tarif des futurs péages urbains sera défini par les collectivités locales qui décident de mettre en place le système. Le montant imposé aux automobilistes sera au minimum fixé à 2,50 euros : la loi sur les mobilités ne prévoit pas de tarif inférieur. Mais les villes de plus de 500 000 habitants, comme Paris, Lyon ou Marseille pourront faire le choix de multiplier le prix du péage urbain par deux en imposant une taxe de 5 euros aux automobilistes qui entrent sur leur territoire. Le montant du "tarif de congestion" ne pourra pas être supérieur à 5 euros. Le texte d'avant-projet de loi précise également "qu'un coefficient multiplicateur au plus égal à 4 selon la catégorie du véhicule" pourra être appliqué. Concrètement, tout ce qui est plus gros qu'une voiture ou une moto (utilitaires, camions, bus…) devront s'acquitter d'un montant pouvant atteindre 20 euros à l'entrée d'une grande ville.

Péage urbain : à quelle date ?

Aucune date n'a pour le moment été annoncée pour la mise en place des péages urbains. Le projet de péage urbain a été retiré du projet de la loi sur les mobilités, qui a été présenté au Conseil des ministres en novembre et sera présenté à l'Assemblée nationale et au Sénat au printemps 2019. D'autres pays qui ont déjà mis en place le péage urbain. En Italie, Milan applique cette mesure depuis 7 ans. En Suède, Stockholm a instauré le péage urbain ou "tarif de congestion" il y a 12 ans, et Londres s'est habitué à cette taxe à l'entrée de la ville depuis 15 ans. En France, la possibilité de mettre en place des péages urbains a été prévue dès 2007 avec le Grenelle de l'environnement. Mais "les critères de mise en place étaient tellement restrictifs" qu'aucun péage urbain n'a pu être installé, d'après le ministère des Transports.

Péage urbain : quelles exceptions ?

Le projet de loi sur les mobilités incluant la mise en place de péages urbains (ou "tarifs de congestion") dans les grandes villes laisse la place à quelques exceptions. Des tarifs réduits, voire une gratuité complète pourront être appliqués pour certains usagers. Les automobilistes concernés seront avant tout ceux dont "le domicile ou le lieu de travail est situé dans la zone soumise au tarif de congestion". Bien entendu, les véhicules de transport public (bus, navettes...) seront exemptés du "tarif de congestion", tout comme les véhicules "d'intérêt général" comme les véhicules de secours ou les ambulances. Le projet de loi ne prévoit pour le moment pas d'exception pour les taxis et autres VTC, qui entrent et sortent de Paris à de nombreuses reprises chaque jour.