Nicolas Duvauchelle "Dans les silences, on dit parfois beaucoup plus de choses qu'en parlant des heures"

Nicolas Duvauchelle est à l'affiche de l'adaptation au cinéma de la bande dessinée de Manu Larcenet, "Le Combat ordinaire", qui sort en salles le 15 juillet 2015. Il revient pour nous sur le tournage de ce film aux résonances très personnelles.

Dans Le Combat ordinaire, Nicolas Duvauchelle interprète Marco, un trentenaire un peu bourru qui quitte Paris et son boulot de photographe de guerre pour s'installer en pleine campagne. De nouvelles rencontres vont ainsi lui permettre de vaincre ses vieux démons et de se reconstruire, tout en se rapprochant de sa famille.

Le rôle de la maturité

"Interview Nicolas Duvauchelle"

Linternaute.com : Comment définiriez-vous le film pour nous donner envie d'aller le voir ?
Nicolas Duvauchelle : C'est un film sur la vie, sur les angoisses qu'on peut avoir et tout le monde peut s'y reconnaître. Il y a un thème universel : comment peut-on être heureux ? Il parle du retour aux racines, de savoir ce que ses parents ont vécu, du rapport à l'enfance aussi. Je trouve ça très beau, universel et humain avant tout.

Comment expliquez-vous le besoin de votre personnage de changer de vie ?
Je pense que c'est quelqu'un qui avait besoin de se retrouver et, quand tu es photographe de guerre, tu es dans l'urgence tout le temps. Tu es dans la réalité des conflits ou des choses comme ça, mais tu n'es pas dans la vraie vie pour moi. Je pense qu'il a eu besoin d'une coupure, de retrouver ses origines, d'où il venait, de retrouver ses parents. Puis un besoin de se poser aussi qu'on a tous, passé à un certain âge. On en a marre d'être à droite, à gauche et on a besoin de se sédentariser.

Et son côté un peu bourru, sa peur de l'engagement ?
Tous les mecs, un peu, ont peur de l'engagement. Ça, je pense que ça parle à tout le monde. Et puis, ce côté bourru, que je peux avoir aussi, ce n'est pas forcément quelque chose de méchant. Le gars est comme ça, il ne parle pas beaucoup. Moi, j'aime bien ce genre de personnes. Je pense que dans les silences, parfois on dit beaucoup plus de choses qu'en parlant des heures.

Faire ressentir le malaise intérieur de Marco

"Interview Nicolas Duvauchelle"

On sent que votre personnage cache un lourd passé et il fait d’ailleurs régulièrement des crises d’angoisse. Comment avez-vous appréhendé ces scènes ?
Moi, je n'ai jamais fait de crises d'angoisse donc c'était un peu compliqué. Après, j'ai regardé, ça peut être très différent d'une personne à l'autre. Il y en a qui suffoquent, il y en a qui sont prostrés... Il y a plein de manières différentes d'avoir ça, donc moi j'ai essayé de faire comme ça venait, de faire au mieux. Je me suis imaginé pris d'angoisse. Le processus est compliqué à expliquer, mais j'ai essayé de faire comme je le sentais.
J'appréhendais un peu, parce que j'en avais beaucoup parlé à Laurent Tuel, le réalisateur. On s'est dit que je lui proposerais un truc et qu'il me dirait si c'était trop ou pas assez. Et puis, on est arrivé et on l'a faite. Apparamment, il faut se lancer. On en a fait plusieurs versions, plus ou moins intenses, et je pense que ça passe bien.

Avez-vous passé davantage de temps avec Olivier Perrier et Liliane Rovère sur le tournage pour rendre crédible votre relation parents-enfant ?
Déjà, on a fait des lectures ici-même [dans les locaux de la société de production Nord-Ouest à Paris, ndlr]. C'est ici que tout a commencé. Après on les a revus. Et puis, comme c'était un tournage en Province, on restait ensemble le soir, on mangeait ensemble le soir et tout. Donc ça crée beaucoup plus de liens que quand c'est à Paris, où on rentre chacun de notre côté le soir. Là, on était tous dans le même petit village de vacances. Le soir, on mangeait ensemble, on buvait des coups. Le matin, pareil, on prenait le petit-déj'. On a passé beaucoup de semaines vraiment toute l'équipe ensemble. Ça soude et ça crée des liens, donc forcément à l'écran ça se voit et c'est plus facile après pour montrer ces liens. A l'écran, ça passe beaucoup mieux, bien sûr.

Et connaissiez-vous votre partenaire Maud Wyler avant de tourner ce film ?
Oui, je l'avais déjà rencontrée il y a longtemps. Elle est super, Maud, dans le film. Elle est géniale et puis elle a cette tête un peu de dessin animé, avec ses cheveux roux, ses petites tâches de rousseur et un truc très doux comme ça... Elle ressemble énormément à la Emilie de la BD. Ça, c'était vraiment fou. Et puis, elle est magnifique dans le film, elle dégage un truc super frais et elle est drôle. Elle est vraiment géniale.

Vers de nouveaux choix de films

"Interview Nicolas Duvauchelle"

On vous voit rarement jouer des personnages habitants à la campagne comme dans le film. Est-ce parce que vous êtes un Parisien dans l’âme ?
Je suis né à Paris, j'ai grandi à Paris, mais j'ai vécu à Amiens aussi pendant six ans. Donc je connais bien la Province. Et puis, mon père vient d'Amiens, ma mère de Ouistreham. J'ai beaucoup de souvenirs là-bas. Par exemple à Amiens, dès que j'y retourne, un peu comme dans le film, j'ai tout le passé qui ressurgit. C'est important pour moi et j'aime bien la Province, parce que, même sur le tournage, par exemple sur les docks, quand on a tourné toutes les scènes avec les dockers, ils nous ont ouvert complètement le port. Ils étaient contents qu'on filme leur vie, qu'on filme leur lieu de travail, tout ça. Ils n'étaient pas blasés comme certains Parisiens, même si moi aussi j'en fais partie et j'en suis un. C'était vraiment une super énergie. C'était très émouvant de les voir et puis ils étaient vraiment très contents qu'on vienne. J'étais super content. C'était une très belle expérience.

On vous voit surtout dans des drames. A quand une comédie ?
Ça m'est déjà arrivé qu'on m'en propose, mais après, voilà, les comédies ce n'est pas vraiment mon registre de base, on va dire. J'ai fait Comme des frères, ça s'était très bien passé. J'avais adoré. J'ai rencontré un de mes meilleurs amis, qui est François-Xavier Demaison. J'ai eu la chance de travailler avec Pierre Niney, de rencontrer Hugo Gélin aussi avec qui j'ai passé de très bons moments. Après, je n'en ai pas eu d'autres qui m'ont donné de coups de coeur comme ça. Et puis, moi j'aime beaucoup les drames au cinéma. C'est quelque chose qui me parle beaucoup, mais une comédie, si, pourquoi pas ? Si j'en trouve une bien, un jour, et qu'on me la propose, ce sera avec plaisir.

En général, qu’est-ce qui vous pousse à choisir un film plutôt qu’un autre ?
Le scénario déjà, bien sûr. Un bon film, c'est un bon scénario, comme on dit. Après, la rencontre avec le réalisateur aussi, c'est très important pour moi. Savoir avec qui je vais travailler, comment il voit la chose... Et la motivation de la personne aussi, c'est très important.

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