Chloé Delaume "La Règle du Je" : la question de l'autofiction

Chloé Delaume fait le ménage dans son genre

Voici maintenant 10 ans que Chloé Delaume est tombée dans la marmite de l'autofiction. Sans jamais céder aux sirènes de l'intrigue des gros romans (qui pourtant se vendent tellement mieux) elle poursuit ses recherches et ses expérimentations, triturant la narration, disséquant les systèmes d'énonciation... jusqu'à finalement s'imposer comme maîtresse du genre, et devenir une silhouette connue du paysage littéraire. Tissant ses livres avec soin, elle poursuit sans relâche leur publication de petits éditeurs en petits éditeurs.

Après 10 années de pratique, Chloé Delaume théorise l'autofiction dans "La règle du Je". Pose ses limites et en redore le blason au passage, le tout aux PUF (Presses universitaires de France) qui s'engaillardissent d'une nouvelle collection appelée "Travaux Pratiques".

L'autofiction, c'est la mode du moment. On raconte sa vie (pas forcément dans ce qu'elle a de plus intéressant ou de moins sordide) on change son nom, celui de quelques personnages qui pourraient avoir l'idée d'intenter un procès à l'éditeur, et hop, voilà un témoignage qui devient une autofiction.

C'est la faiblesse du genre. L'autofiction est un peu la voiture balai des témoignages sans catégorie.

Précisions et rigueur

C'est dit. Mais que vaut "la Règle du Je" ? C'est un excellent essai-fiction (il fallait inventer un genre pour en définir un autre...) Les premiers chapitres montrent le chemin parcouru depuis ses premiers livres "Le Cri du sablier" ou même "Certainement pas". L'écriture est mature et les intentions apparaissent clairement, Chloé Delaume a trouvé sa voie et avec elle, une cohérence, beaucoup de précisions et de rigueur. Ceux qui ont aimé ses livres, aimeront celui-là, pour les autres, c'est le moment de se lancer.