Le suspense est au rendez-vous

'je n'aime pas la littérature unidimensionnelle.'
"Je n'aime pas la littérature unidimensionnelle." © L'Internaute Magazine / Marie Bruggeman

Les rebondissements se succèdent à un rythme effréné : acquisition par le Louvre d'un trésor mystérieux appelé l'Or d'Alexandre, des tableaux du musée qui se révèlent être des copies, meurtre d'une spécialiste de la Grèce antique, découverte de toiles spoliées par les nazis? N'avez-vous pas eu peur d'en faire trop et de perdre le lecteur différentes ?


Olivier Delorme : Je n'aime pas la littérature unidimensionnelle qui vous mène en ligne droite d'un point à un autre. Je n'aime pas la littérature cachexique qui met une idée par livre de cent pages en gros caractères. Une littérature de pingre ; je suis généreux à table comme au lit ou en littérature. Lorsque je lis un roman, j'aime qu'on me balade, qu'on me trompe, qu'on me conduise dans des impasses, que j'y sente le vent du large et que j'y entende la rumeur du monde. J'aime me plonger, m'immerger dans l'univers d'un auteur. Chaque livre est pour moi un voyage. J'écris les livres que j'aime lire : j'adore Eco, Durrell, Ellroy ; on s'y demande parfois où l'on en est, on y est parfois dérouté, perdu. J'aime aussi qu'on m'égare. Dans Le Comte de Monte Cristo, Dumas nous promène de la prise de Janina par les Turcs aux caches des bandits italiens.

"Delorme nous cultive en nous passionnant."

Les critiques que des lecteurs ont laissé sur des blogs, sur leur site ou sur le mien semblent indiquer que lorsqu'on ouvre ce livre, on a un peu de mal à le lâcher. L'un d'eux emploie une métaphore ferroviaire qui m'a beaucoup plu, d'un train qui roule à toute vitesse, "s'arrête net, vous coupant le souffle, pour prendre une autre voie que vous n'aviez même pas vue. Mais à côté de cela, la vitesse du train ne vous empêche pas de vous imprégner d'un paysage baigné de rivages grecs aux statues antiques et de couloirs de musée décorés des plus beaux tableaux que l'humanité a produits. Bref, Delorme nous cultive en nous passionnant. "

C'est exactement ce que j'ai voulu faire. Le succès de la Quatrième Révélation m'a montré que le suspense était un excellent moyen pour embarquer le lecteur et le bousculer en lui racontant des choses auxquelles il ne s'attendait pas. Captiver par une intrigue à rebondissements, cela permet de parler au lecteur de tel épisode de l'histoire, de tel courant philosophique, de tel sujet politique, social ou religieux.

"Le suspense est un excellent moyen pour embarquer le lecteur et le bousculer en lui racontant des choses auxquelles il ne s'attendait pas."

Et puis, fondamentalement, contrairement à la logique qui préside à la littérature cachexique de produits formatés censés répondre aux attentes du consommateur, je fais le pari de l'intelligence et de la curiosité. Je me souviendai longtemps d'un lecteur de La Quatrième Révélation, routier de profession, venu me dire dans une rencontre lyonnaise que, sitôt après avoir lu mon roman, il était allé demander à son libraire un livre sur la mythologie grecque parce que ce que j'en racontais l'avait passionné et qu'il avait eu envie d'en savoir plus. C'est un des plus beaux compliments qu'on m'ait jamais fait.