Athlétisme : dopage, corruption, racket... Pourquoi la Russie risque d'être privée de Jeux olympiques
Les athlètes russes risquent de ne pas pouvoir participer aux Jeux olympiques 2016. C'est en tout cas ce que préconise le rapport accablant de l'Agence mondiale anti-dopage, ce lundi. Explications.
[Mis à jour le 09/11/2015 à 17h36] DOPAGE EN RUSSIE - Le rapport de l'agence mondiale anti-dopage (AMA) rendu public ce lundi est un véritable coup de tonnerre pour le monde de l'athlétisme et pour la Russie en particulier. Ce rapport d'enquête sur les pratiques de dopage et de corruption dans l'athlétisme mondial recommande notamment une suspension de la Russie pour les épreuves des Jeux olympiques 2016 ainsi que la suspension à vie de cinq entraîneurs et cinq athlètes russes : quatre coureuses de 800 m (Mariya Savinova, championne olympique en 2012, Ekaterina Poistogova, médaillée de bronze en 2012, Anastasiya Bazdyreva et Tatjana Myazina) et une coureuse de 1 500 m (Kristina Ugarova). Dans ce texte, les enquêteurs de l'AMA estiment d'ailleurs que les Jo de Londres, en 2012, ont été "sabotés". Le rapport pointe du doigt "l'utilisation systématique et importante de produits dopants par de nombreux athlètes russes" et souligne que beaucoup d'athlètes ont refusé de participer à l'enquête, parmi lesquelles Anastasiya Bazdyreva.
Le gouvernement russe accusé d'intimidation
Le texte dénonce plus largement une véritable "culture du dopage" en Russie : "La plupart des personnes aux fautes les plus flagrantes sont des entraîneurs qui étaient d’anciens athlètes [...] Cette mentalité de ''gagner à tout prix'' a été transmise aux athlètes actuels, avec ou sans leur consentement. Cet état d’esprit est ancré profondément chez les athlètes russes et ''justifié'' par le principe que tous les autres trichent aussi". Les autres sanctions préconisées par l'AMA sont le retrait de l'accréditation du laboratoire antidopage de Moscou, à qui il est reproché d'avoir détruit près de 1 500 échantillons. Le rapport accuse d'ailleurs le gouvernement russe d'avoir fait preuve "d'intimidation" vis-à-vis de ce laboratoire. Le ministre des Sports russe, Vitali Moutko, directement visé, a simplement répondu en fin d'après-midi que l'AMA n'avait "pas le droit de suspendre" mais la Fédération internationale d'athlétisme, par la voix de son président Sebastian Coe, a d'ores et déjà annoncé qu'elle lançait la procédure de suspension.
D'autres pays concernés ?
Le scandale n'en est peut-être qu'à ses balbutiements puisque le rapport d'enquête précise aussi que le dopage organisé concerne d'autres pays et d'autres sports, sans toutefois qu'aucun nom ne soit mentionné ("La Russie n’est pas le seul pays, ni l’athlétisme le seul sport à faire face au problème du dopage organisé dans le sport").
Rappelons que cette enquête de l'AMA avait été lancée à la suite d'un documentaire, diffusé en décembre 2014 par la chaîne allemande ARD, intitulé "Dopage confidentiel : comment la Russie fabrique ses vainqueurs", dans lequel une athlète confie notamment que 99 % des athlètes russes se dopent. Quelques jours plus tard, la spécialiste du marathon Lilya Shobukhova, suspendue pour dopage, déclarait que le gouvernement avait organisé un racket des athlètes dopés, en leur évitant des sanctions en échange de sommes d'argent. Enfin, l'enquête souligne des que des manœuvres de corruption ont lieu "au plus haut niveau international de l'athlétisme". La Commission d'éthique du Comité international olympique (CIO) a d'ailleurs demandé ce lundi la suspension provisoire de l'ex-président de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF), Lamine Diack, de son statut de membre du CIO. Ce dernier, accusé d'avoir reçu de l'argent pour fermer les yeux sur les pratiques dopantes organisées en Russie, est actuellement mis en examen par le juge français Renaud Van Ruymbeke, pour corruption passive et blanchiment aggravé.
EN VIDEO - Dopage et corruption dans le sport : "La Russie est concernée directement".