Au fait, que dit la loi
?
Le Code du travail prévoit
que le dimanche est le jour de repos obligatoire.
Mais les dérogations se multiplient et
consommateurs et distributeurs jouent la politique
du fait accompli. La loi va suivre.
(Septembre 2004)
Dans le Code
du travail, l'article L-221-5 stipule que
"le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche".
Mais certains types de magasins dans certaines
zones bénéficient de dérogations le plus souvent
attribuées par le préfet. De plus, un commerçant
travaillant seul ou avec des membres de sa famille
non-salariés, peut ouvrir le dimanche. Ce
qui est sûr, c'est qu'"il est interdit d'occuper
plus de six jours par semaine un même salarié"
(article L221-2) et que "le repos hebdomadaire
doit avoir une durée minimale de vingt-quatre
heures consécutives" (article L221-4).
En 1996, la Cour de
Justice des Communautés européennes, tout
en reconnaissant l'obligation d'une journée de
repos hebdomadaire, a annulé le principe du "dimanche".
En général, les pays européens restent traditionnellement
attachés au repos dominical. Cependant, la Grande-Bretagne
et la Belgique ont permis certains aménagements
plus libéraux. La crainte de voir les consommateurs
partir vers d'autres régions ou d'autres pays
le dimanche, amènera sûrement les différentes
législations européenness à s'harmoniser.
Dérogations
et fait accompli
Les commerces ouverts le dimanche doivent
en théorie bénéficier d'une dérogation
les autorisant à ouvrir et surtout à
faire travailler leur personnel ce jour-là.
Pour des raisons
économiques, des dérogations permanentes et
de plein droit existent pour certains types
d'établissements : hôpitaux, transports, musées,
kiosques à journaux, magasins de fleurs
Quant
aux commerces de détail alimentaire, ils bénéficient
d'une dérogation de principe le dimanche
matin.
Le maire
(ou le préfet pour Paris) peut accorder des dérogations
exceptionnelles et collectives, c'est-à-dire
limité à cinq dimanche par an et par branche d'activité,
aux commerces de détail qui en font la demande.
C'est souvent le cas des magasins ouverts exceptionnellement
pour les fêtes de fin d'année par
exemple.
Le préfet
peut accorder des dérogations individuelles
et temporaires, de trois ans maximum, aux
commerces de détail pouvant justifier que la fermeture
le dimanche "serait préjudiciable au public"
ou "compromettrait le bon fonctionnement
de l'établissement".
Enfin, le
préfet peut accorder des dérogations par communes
et zones touristiques pour faciliter l'accueil
du public : "dans les communes touristiques
ou thermales et dans les zones touristiques d'affluence
exceptionnelle ou d'animation culturelles permanente".
Sont concernées à Paris : les Champs-Elysées,
la Place des Vosges et la rue de Francs-Bourgeois,
la rue de Rivoli, l'avenue Daumesnil, la rue d'Arcole
et une partie du boulevard Saint-Germain.
Mais, comme
la procédure est longue et que les autorisations
sont rares, la plupart des commerçants ont décidé
de passer outre, c'est-à-dire d'ouvrir le dimanche
sans autorisation, au risque de devoir payer des
amendes (jusqu'à 1 500 euros). C'est le cas
des grandes marques (Virgin, Ikea, Leroy Merlin,
Castorama
) qui ont été les premières à ouvrir
le dimanche, rapidement suivies des petits commerçants
craignant la concurrence.
Un
furieux débat
Faut-il autoriser l'ouverture des magasins
le dimanche ? Le débat fait rage depuis
plusieurs années et revient régulièrement
à la une des journaux. Selon un sondage
Ifop réalisé en juin 2001, un Français sur deux
y serait favorable. pas de mystère : les
consommateurs ayant formulé ce choix habitent
en majorité dans des grandes agglomérations et
ont un fort pouvoir d'achat. Ils apprécient
de pouvoir aller faire leurs courses le dimanche
car ils n'ont pas le temps le reste de la semaine.
D'autres crient au scandale, dénoncent une évolution
à la "new-yorkaise", avec des magasins ouverts
7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Pour eux, le
dimanche doit être réservé à la famille ou à la
maison. A cela, certains rétorquent qu'on peut
aller faire ses courses le dimanche en famille
et qu'avant de bricoler ou de jardiner, il est
bien pratique de pouvoir faire un tour à Castorama
ou Leroy-Merlin.
Coté
salariés aussi, on est divisé :
certains employés, comme les étudiants
et les célibataires, se disent heureux de travailler
le dimanche, d'autant que la rémunération est
plus intéressante. Mais de nombreux syndicats
dénoncent la violation de la loi et l'exploitation
des travailleurs.
Les marchands,
eux, ont déjà tranché : "Nous
sommes ouverts en Ile-de-France uniquement, car
ici tout est ouvert ! En province, les gens n'ont
aucune habitude de consommation le dimanche. Nous
nous adaptons à une réalité proprement francilienne",
expliquait Hervé Pivet, directeur des Ressources
Humaines d'Ikea France au "Nouvel Observateur"
en octobre 2002. Mais cette situation semble amenée
à s'étendre petit à petit. Pour faire face aux
concurrents (qui ouvrent le dimanche) et pour
répondre à la demande des clients (qui s'habituent
à aller faire leurs courses le dimanche), de plus
en plus de commerçants décident
de rester ouvert le septième jour de la
semaine.
Le législateur
va sans doute finir par prendre en compte les
changements intervenus dans les modes de vie et
les comportements d'achat des Français. Il s'agit
de tenir compte des intérêts des consommateurs
et des employés, de données sociales (assurer
une journée de repos collectif consacré à la famille,
aux loisirs
) et économiques (créer des emplois,
attirer les touristes
). Une proposition de loi
dans ce sens a été déposée
en janvier dernier par le député
Patrick Balkany.
En
savoir plus
Code du travail :
http://www.legifrance.gouv.fr
Proposition de loi
:
http://www.assemblee-nat.fr/12/propositions/pion0585.asp
Le cas de la rue
des Francs-Bourgeois
Une étude réalisée par le Crocis, rue des
Francs-Bourgeois, a montré que 66 commerçants
sur 75, soit 88 % des commerçants, ouvraient
le dimanche (la majorité sans autorisation,
bien que situé en zone touristique). Ce phénomène
est en progression : 3 commerces ont
ouvert le dimanche dans les années 1970, 7
dans les années 1980 et 38 dans les années
90. Les deux commerces les plus récents, créés
en 2001, ont immédiatement ouvert le dimanche.
L'étude montre encore que 45 commerçants,
sur les 61 interrogés, se déclarent "très
satisfaits" de cette expérience et ce
pour deux raisons : un chiffre d'affaire supérieur
réalisé ce jour là et une notoriété accrue.
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