"Jai
mis la robe de mariée de ma mère et je me
suis présentée aux essais "
A l'occasion de la sortie en salle de "Mariages
!" , un film de Valérie
Guignabodet dans lequel elle interprète
le rôle de Johanna, la mariée,
L'Internaute a interviewé Chloé
Lambert, jeune actrice que l'on a déjà
vue dans Chaos (Coline Serreau) ou
"24h de la vie d'une femme"
(Bouhnik).
Mariages ! , écrit et réalisé
par Valérie Guignabodet, est un film
qui se déroule en une seule et même
journée, mais pas n'importe quelle
journée, celle du mariage de Johanna,
interprétée magistralement par
Chloé Lambert. C'est donc autour de
son personnage que tourne le film sans pour
autant que l'on puisse considérer que
son personnage en tienne le rôle principal,
car il s'agit d'un "film-choral"
où Miou-Miou, Jean Dujardin, Mathilde
Seigner, Lio ou encore Catherine Allégret
se partagent tous la vedette. Les festivités
sont l'occasion de grandes joies mais aussi
de règlements de compte.
Mariages ! est un film à la fois
drôle et profond qui invite à
reprendre, non sans dérision ni courage,
la chanson que le prêtre entonne durant
la cérémonie à l'Eglise
: "Qu'il est formidable d'aimer".
Vous avez commencé
parallèlement au théâtre et dans des courts-métrages
: c'était important pour vous dès le départ
de garder un équilibre entre la scène et le
cinéma ? Est-ce une double carrière que vous
souhaitez conserver longtemps ?
Chloé
Lambert Je fais du théâtre
et du cinéma, parce que j'aime le théâtre
et parce que j'aime le cinéma. C'est
aussi simple que cela. En fait, je dirais
qu'il s'agit d'un même métier
mais que les manières de travailler
sont différentes. Au théâtre,
on a plus de temps, on a deux mois de répétition,
on participe davantage au travail de création
dans son ensemble, on a peut-être même
plus d'influence sur l'allure du résultat
final. Au cinéma, on n'est présent
parfois que quelques jours, on n'a pas la
maitrise sur l'ensemble mais on y éprouve
les plaisirs de l'abandon. Il faut faire confiance.
C'est pour cela que je travaille au cinéma
et au théâtre, parce que j'aime
les plaisirs de l'un comme de l'autre.
Au théâtre, vous avez joué dans des
classiques (Anouilh, Oscar Wilde, Sarraute,
Marivaux, Musset) mais aussi dans des pièces
très contemporaines comme une pièce de Stéphane
Druet, Marie Hasparren de Jean-Marie Besset
et L'Ouest Solitaire de Martin Mc Donagh.
Que recherchez-vous à travers cet ecclectisme
?
Au départ, j'avais très
envie de jouer des classiques. J'ai toujours
ressenti une attirance très forte pour
le théâtre et celle-ci s'est
d'abord exprimée pour les grands textes
de la littérature. C'est ensuite que
j'ai eu envie de travailler sur des textes
contemporains et j'en ressenti un plaisir
immense. Travailler sur des Créations,
c'est l'occasion de rencontrer des auteurs
vivants, c'est une expérience formidable,
c'est quelque chose d'extraordinairement excitant
: pour Marie Hasparren, j'ai pu rencontrer
Jean-Marie Besset, pour l'Ouest solitaire,
Martin Mc Donagh qui est véritablement
devenu un ami.
Quand on n'écrit pas soi-même,
c'est formidable de pouvoir suivre une écriture,
connaître son évolution, en discuter
avec l'auteur. Et puis être guidé
par lui aussi. Après tout, c'est lui
qui a créé le personnage, donc
il sait comment le personnage doit être
incarné, comment il doit être
"humanisé". Je ne dis pas
qu'un metteur en scène ne le sait pas
bien sûr mais la rencontre avec un auteur
à ce sujet est évidemment quelque
chose de très particulier.
Au cinéma, cette rencontre est beaucoup
plus fréquente car le réalisateur
est très souvent l'auteur du film.
Cela a d'ailleurs été le cas
pour Mariages ! avec Valérie
Guignabodet. C'est très agréable
de pouvoir avoir ce double dialogue.
En 2001, vous avez doublé Naomie Watts
pour son rôle dans Mullholland Drive. Qu'avez-vous
retiré de cette expérience ? Allez-vous continuer
à la doubler et devenir sa voix française
?
J'ai été très heureuse
de le faire. Cela s'est fait sans que je le
demande. En fait, j'ai été repérée
par celui qui était chargé du
doublage du film pour mon rôle dans
Marie Hasparren de Jean-Marie Besset.
Il m'a proposé de faire des essais,
à moi qui n'ai jamais fait de doublages
auparavant. Il était convaincu que
je correspondais et que techniquement j'y
parviendrais. Honnêtement, cela n'a
pas été facile et c'était
même beaucoup de travail parce que vous
n'avez en face de vous qu'une image et aucun
repère pour vous aider (je pense notamment
aux répliques d'un partenaire) excepté
le texte qui défile dessous. En plus,
j'étais terriblement impressionnée
par la prestation d'actrice de Noemie Watts
dont il a fallu que je me détache pour
parvenir à interpréter ses répliques.
Cela a vraiment été une expérience
très enrichissante, je ne sais pas
vraiment pourquoi je n'ai pas continué.
En fait, le milieu du doublage est un milieu
assez petit et il faut plutôt demander
pour obtenir des rôles. Je n'ai tout
simplement pas fait ces démarches parce
que j'étais prise ailleurs. Mais j'aurais
été très fière
d'être "la voix française"
d'une aussi grande actrice que Noémie
Watts.
Dans Mariages ! de Valérie Guignabodet,
vous êtes la mariée du film. Comment avez-vous
obtenu le rôle ?
Je tournais un téléfilm avec
Alexis Loret qui avait déjà
été choisi pour interpréter
le marié du film. Il m'a dit "la
mariée n'a toujours pas été
choisie", j'ai mis la robe de mariée
de ma mère, je me suis présenté
pour passer des essais et le lendemain, Valérie
Guignabodet m'a appelée pour me proposer
le rôle. Je l'ai accepté tout
de suite !
L'ambiance du film est assez particulière
: elle balance en permanence entre fête
et règlement de compte. Est-ce que
l'ambiance du tournage s'en est ressenti ?
Pas du tout ! L'ambiance du film a été
très heureuse : vous savez un tournage,
c'est comme une fête, ça prend
ou ça ne prend pas. Et pour Mariages
! , l'ambiance a été bonne
tout de suite. On s'est tous beaucoup amusés
au bout de 2-3 jours. Il y a aussi eu des
moments d'émotion. Par exemple quand
je suis rentrée dans l'Eglise pour
le mariage, c'était bizarre parce que
pourtant deux minutes avant, Didier Bezace
et moi, on riait, et puis l'Eglise était
vide, y avait des techniciens un peu partout,
eh bien pourtant on a été un
peu émus. Il faut dire qu'une mariée,
c'est vraiment un symbole très fort.
Je n'ai jamais vu une telle différence
entre moi en costume et moi sans costume.
En fait, j'ai réalisé le fantasme
de la petite fille qui se balade toute la
journée en robe de mariée et
à qui personne ne demande de l'enlever.
Et ça change le regard des gens. Il
y avait une petite fille de 4 ans sur le tournage,
dès lors qu'elle m'a vue avec ma robe,
elle ne m'a plus quittée, à
un moment, je la portais dans les bras, nous
avions vue sur la vallée, de son doigt,
elle a montré une montagne au loin
et elle m'a demandé : "La montagne
aussi, elle est à toi ?". C'est
un peu ça l'impression que cela fait,
d'être la "reine du monde"
le temps d'une journée.
Johanna est un personnage plus complexe
qu'il n'y parait de prime abord, elle se révèle
au fur et à mesure du film : la jeune
fille un peu effacée du début
devient une femme de caractère. Comment
avez-vous aborder ce rôle ?
C'est exactement cet aspect qui m'a plu dans
le personnage. C'est aussi la première
indication que m'ait donnée Valérie
Guignabodet, dès les essais : cette
jeune fille doit apprendre beaucoup en une
journée, parfois plus que ceux que
d'autres apprennent en une vie : elle avance,
elle apprend, elle grandit.
En ce qui concerne mon travail de comédienne,
je dirais que les choses sont assez claires
: ce sont les situations qui définissent
les personnages, mieux le texte est écrit,
plus les enchaînements sont logiques,
plus la façon d'appréhender
le rôle s'éclaire. Après,
on peut toujours se donner les raisons psychologiques
qui font agir un personnage, dans le cas de
Johanna, je pense qu'elle met toute la journée
de son mariage à se rendre compte que
si elle se marie, ce n'est pas pour retrouver
son père mais au contraire pour le
quitter. Au début du film, elle est
dans une sorte d'innocence qui consiste à
refuser de voir les évidences qui sont
devant elle. Et ensuite elle va droit dans
le mur, elle se prend une gifle, puis deux,
puis trois jusqu'à ce qu'il y en ait
une suffisamment forte pour la faire réagir.
Je crois que l'on a tous déjà
vécu cela. En tout cas, moi oui !
C'est ce qui l'incite à faire un choix,
à accepter et à être capable
de renoncer à ses illusions, mais renoncer
à certaines choses, cela signifie aussi
pouvoir en vivre beaucoup d'autres. C'est
d'ailleurs ce que lui dit sa tante à
la fin du film, c'est lorsque l'on se libère
de tout que l'on peut aimer.
En fait, si je dois aller jusqu'au bout de
ma pensée, je crois que le mariage
doit véritablement être considéré
comme un rite initiatique, et c'est la raison
pour laquelle j'ai choisi et j'ai aimé
tourner dans ce film : parce que je trouve
qu'il rend très bien compte de l'aspect
initiatique du mariage.
Pour en savoir
sur Chloé Lambert, vous pouvez consulter
sa fiche artistique : ici
FILMOGRAPHIE
Cinéma
Mariages ! (2003)
24h de la vie d'une femme (2001)
Chaos (2000)
Le Prof (1999)
Confession d'un dragueur (2000)
Théâtre
L'Ouest solitaire (2002-2003)
Marie Hasparren (2001-2002)
Le Roi Cerf (1998-2000)
L'Alouette (1999)
Il est important d'être fidèle
(1998)
Elle est là (1997)
L'épreuve (1997)
On ne badine pas avec l'amour (1997)
Dehors devant la porte (1996)
Shakes Peace and love (1996)
Le retour sans retard de Martin Tammard
(1995)
Télévision
La Bonté d'Alice (2004)
Maigret et le clochard (2003)
Jugement dernier (2003)
Pierre et Jean (2003)
Trop d'amour (2002)
Fiche artistique de Chloé Lambert
: ici
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