Procès de l'attentat de Romans-sur-Isère : comment l'accusé peut voir sa peine allégée avec une expertise
Ce lundi 27 octobre, s'ouvre devant la cour d'assises spéciale de Paris le procès d'un réfugié soudanais souffrant de troubles psychiatriques, Abdallah Osman Ahmed. L'homme avait tué deux hommes - Thierry N., client d'une boucherie âgé de 54 ans, et Julien V., un commerçant de 43 ans - et blessé cinq personnes à Romans-sur-Isère (Drôme) le 4 avril 2020.
L'accusé doit répondre d'assassinats et tentatives d'assassinats terroristes, des infractions pour lesquelles il comparaît devant une juridiction criminelle "spécialement composée", sans jurés populaires. Le procès doit durer jusqu'au 7 novembre. À l'époque, selon les témoins de l'attaque, il avait agi sans prononcer "la moindre parole", "le regard vide", et avait "l'air hypnotisé" et "possédé", restant "très calme". Son état psychologique avait été au cœur des investigations menées lors de l'instruction au pôle antiterroriste du tribunal de Paris. Il sera également un sujet central lors du procès.
Quelle peine pour Abdallah Osman Ahmed ?
Pendant l'instruction, Abdallah Osman Ahmed a reconnu avoir porté les coups de couteau, tout en assurant ne plus se souvenir de rien. Il dit avoir été guidé par "des voix". Depuis les faits, trois expertises psychiatriques ont été réalisées. Entre 2020 et 2023, la première et la troisième des expertises psychiatriques avaient conclu à "l'altération"
du discernement de l'homme aujourd'hui âgé de 38 ans.
La deuxième expertise, elle, en date du 7 novembre 2022, avait au contraire établi "l'abolition"
de son discernement - c'est-à-dire une irresponsabilité pénale - car il "présentait, depuis des semaines avant les faits, un tableau psychiatrique associant des symptômes délirants de persécutions, une anxiété massive, un sentiment dépressif"
. Abdallah Osman Ahmed encourt la réclusion criminelle à perpétuité ou 30 ans de prison maximum si une altération de son discernement au moment des faits est retenue. À l'avenir, il pourrait alors espérer une remise de peine.
La défense va plaider l'abolition du discernement
"Il n'est néanmoins pas avéré (que ce trouble mental) ait été le seul élément à l'origine du déclenchement du passage à l'acte"
, avaient noté les deux juges d'instruction dans leur ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises spéciale, au printemps 2024. "Ce trouble associé au déracinement et à l'isolement dont souffrait M. Osman Ahmed, accentué par le début du premier confinement sanitaire, ont fait partie des éléments déclencheurs du périple". De plus,
l'assaillant avait "posté des écrits en lien avec l'idéologie de l'islam radical et justifié ainsi l'acte qu'il s'apprêtait à commettre" la veille des faits.
De leur côté, les deux avocats de l'accusé, Dimitri Grémont et Antoine Ory, vont "plaider l'abolition du discernement" d'Abdallah Osman Ahmed, le jour de l'attaque, indique France Info. La frontière entre abolition et altération du discernement "sera un débat très technique", précise Me Grémont.
Face aux qualifications terroristes retenues dans ce dossier, ce dernier assure "qu'aucune radicalisation antérieure" n'a été repérée et que le passage à l'acte de son client est "une décompensation d'un délire qui s'est appuyé sur de la religion". Selon les juges d'instruction, l'accusé a "toujours vécu selon les 'préceptes de l'islam' sans jamais pour autant se situer dans une démarche islamiste". Bénéficiaire du statut de réfugié depuis le 29 juin 2017, il n'était pas connu pour appartenir à une organisation terroriste.