Jawad Bendaoud : insultes, crachats, confusions... Un procès hors normes

Jawad Bendaoud : insultes, crachats, confusions... Un procès hors normes JAWAD - Le procès de Jawad Bendaoud a repris au palais de justice de Paris ce jeudi 29 novembre. L'accusé, le "logeur de Daesh", manifeste un comportement très exubérant.

[Mis à jour le 29 novembre 2018 à 18h55] L'audience s'annonçait délicate pour Jawad Bendaoud, elle ressemble à un show terriblement gênant, tant l'accusé se met en scène, multiplie les sautes d'humeur et se laisse aller à des moments de colère inattendus. Jugé en appel, au palais de justice de Paris, pour le rôle qu'il aurait pu tenir après les attentats du 13 Novembre, l'homme qui a hébergé les deux jihadistes qui ont perpétré les attaques s'est emporté très vivement en pleine audience, devant le président. Comme le rapporte France Info et LCI, Jawad Bendaoud s'en est pris aux journalistes mercredi 28 novembre, les qualifiant d'"enfants de putain", et s'est adressé au juge très violemment : "Vous me faites quoi là à dire que je suis un menteur ? [...} Je ne supporte plus vos piques", a-t-il dit, haussant le ton, crachant par terre : "Je suis seul. Je ne vois même pas un psy, j'ai même pas le RSA. Vous voulez quoi ? Mettez-moi six ans, mettez-moi six ans !".

Les magistrats ont ordonné une suspension de l'audience qui a duré plusieurs minutes, avec que le procès reprenne. Une journaliste de France Info rapporte que "deux gendarmes sont venus juste derrière lui pour tenter de le contenir" au moment où l'accusé a laissé explosé sa colère. "Il leur a lancé 'ils font quoi eux?!'".

"Il y a des gens ici qui sont très très louches"

Ce jeudi 29 novembre, le "logeur de Daech" est apparu à la cour de nouveau vêtu de son survêtement noir à bandes dorées. Suite à la question d'une avocate des parties civiles, Jawad a tout bonnement indiqué qu'il ne répondrait pas aux questions concernant le week-end du 13 novembre 2015, mais qu'il répondrait à celles qui concernent le 18 novembre, jour de l'intervention du RAID dans son appartement. Ainsi qu'à celles sur les deux jours ayant précédé cette intervention. Interrogé sur son accès à la télévision, il a déclaré qu'il n'avait pas regardé la télé du soir des attentats jusqu’à son interpellation. Une version qui dénote avec celle qu'il avait donnée hier. Jawad Bendaoud avait en effet expliqué "avoir vu sur BFMTV que les terroristes avaient des ceintures d'explosifs" avant de rectifier ses propos, disant l'avoir entendu. "C'étaient des gens qui parlaient dans la rue", s'était-il repris. Jawad Bendaoud s'est donc adressé au président en revenant sur cette question : "J'ai fait une petite maladresse hier, vous pensez que vous allez utiliser ça pour faire de moi un coupable ?"

Face au président, il s'est de nouveau emporté, son avocat a d'ailleurs tenté de le calmer : "Répondez simplement aux questions", a-t-il prévenu. "Mais je suis calme, là", avant de poursuivre : "Ma mère, elle m'avait dit de me cacher. Est-ce que je me suis caché ? Non je suis allé voir les flics ! Par contre j'ai des petits dossiers sur les avocats des parties civiles. Il y a des gens ici qui sont très très louches", a t-il menacé.

Un président de la Cour qui se "réveille pédophile" et des avocats "cons"

Après avoir été rappelé à l'ordre à de nombreuses reprises par son avocat pour ses critiques à l'encontre des avocats des parties civiles - dont Gerard Chemla, à qui il a "juré de ne plus répondre" parce qu'il "passait trop à la télé et seulement pour parler de lui", -  Jawad Bendaoud a répété qu'il s'est endormi un soir "comme un mec normal" et réevillé "en terroriste " le lendemain. Afin d'appuyer son argumenation, il a interpellé le président de la Cour : "Vous, vous êtes président, vous vous réveillez vous êtes un pédophile, vous vous imaginez ?", avant d'expliquer lorsqu'un avocat de l'association Life for Paris s'est présenté : "J'ai rien à voir avec Paris ! Comprenez moi ! Qu'est ce que j'ai fait pour en arriver là". L'homme de 32 ans a indiqué avoir passé hier une heure au téléphone avec des victimes du Bataclan un peu plus tôt.

Concernant Abdelhamid Abaaoud, terroriste qu'il a logé et dont il a dit qu'il "ne pourrait pas le reconnaître", Jawad Bendaoud a déclaré qu'il était "Jawad le logeur". "Mon interview a fait le tour des réseaux sociaux. Comment vous expliquez que j'ai rencontré une femme tel que je suis avec mes lunettes et mon dégradé... Elle croit toujours que je m'appelle Kamel ?", avant de suspendre la séance pour quelques minutes. Lorsque son audition a repris, "le logeur" s'est adressé de manière virulente aux avocats des parties civiles : "Le profil de Soumah et Hasna ne m'a inquiété à aucun moment. Hey monsieur faut vous faire un film pour que vous compreniez ou quoi? Vous comprenez pourquoi le soir quand je me couche je me dis que c'est vous le sketch ? C'est vous les cons !"

Jawad, "pas une ordure" et "pas un criminel" 

Jawad Bendaoud qui est apparu assez calme à la reprise de l'audience ce jeudi 29 novembre, a de nouveau haussé le ton face à un avocat des parties civiles. "Si j'avis su que les mecs étaient des terros, j'aurais appelé des proches pour savoir quoi faire", a t-il déclaré. "Je suis parfois con ouais, mais je suis pas un criminel, je suis pas une ordure". Pour appuyer son raisonnement, "le logeur de Daech" a évoqué la mort de son meilleur ami en 2006 pour laquelle il a été condamné à huit ans de prison en 2008. "C'était un accident", a t-il martelé, visiblement en colère avant de s'insurger contre Wikipédia qui le décrit comme "un criminel".

Enfin, les déclarations de l'ex-compagne de Jawad sont arrivées au centre des questions. Laura K avait en effet fait savoir que Jawad lui avait dit "qu'il avait niqué la justice une première fois" et qu'il comptait bien "la niquer une deuxième fois". Interrogé à ce sujet, Jawad Bendaoud a évoqué une vengeance de la part de son ex-compagne, à qui il avait envoyé la photo "d'une très jolie fille" en train de lui faire "un acte sexuel" dans un hôtel du 10ème appartement. "Une très jolie fille, Maître Seban. Si je vous montre vous allez avoir mal. Vous avez jamais couché avec une fille comme ça", a t-il poursuivi en sortant son portable de sa poche.

Jawad justifie la location de son appartement   

"J'ai loué 150 euros. J'ai pensé que c'était des mecs qui s'assumaient sans soucis mais après coup, je me suis souvenu qu'Hasna avait parlé parfois d'une personne, parfois deux. Elle m'a embrouillé. Mais j'ai pas vu que c'était chelou" avait-il déjà déclaré à la Cour, mercredi. Jawad Bendaoud a même poursuivi en déclarant que s'il avait "su que c'était des mecs qui avaient tué plus de 100 personnes", il n'aurais pas adopté le même comportement. "J'aurais fui l'appart et même j'aurais fui le 93". Interrogé sur ces "trucs louches", Jawad a poursuivi : "Je les ai trouvé louches parce que les mecs s'en foutaient d'avoir la télé. Ils voulaient juste dormir. Un peu louches oui, mais j'étais à 1000 lieues d'imaginer que c'était des terroristes".

Jawad Bendaoud est jugé pour "recel de malfaiteurs terroristes". En février 2018, en première instance, il avait bénéficié d'une relaxe, mais le parquet a fait appel de cette première décision de justice.