Affaire Hedi : une nouvelle vidéo montrant les violences remet en cause la défense des policiers

Affaire Hedi : une nouvelle vidéo montrant les violences remet en cause la défense des policiers Les images des violences policières menées contre d'Hedi par des membres de la BAC survenues à Marseille en juillet viennent d'être diffusées par Médiapart. La vidéo pointe des incohérences entre la version des faits des policiers et les images de la scène.

Ce sont des images glaçantes, celles des violences policières visant le jeune Hedi en marge des nuits d'émeutes de juillet. La vidéo de la scène, survenue le 2 juillet à Marseille, est diffusée par Médiapart trois mois après les faits, ce mardi 3 octobre 2023. L'enquête sur ces violences qui ont conduit à l'amputation d'une partie du crâne du jeune homme de 22 ans après un tir de LDB est toujours en cours, et quatre policiers de la BAC marseillaise ont été mis en examen pour "violences volontaires aggravées". Si l'un d'entre eux, l'auteur du tir de LDB, a été incarcéré pendant 40 jours, il a depuis été remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire à l'instar de ses collègues.

Les images de vidéosurveillance qui ont filmé la scène révèlent "l'extrême violence des coups portés et leur gratuité" et "accablent les policiers" selon le journal d'investigation. La vidéo, jamais diffusée jusqu'à présent, montre la scène sous deux angles de vue : ceux des caméras de la rue du Commandant Imhaus et de la rue d'Italie à l'angle desquelles l'agression a eu lieu.

Les images contredisent les dépositions des policiers

La scène commence à l'angle d'une rue lors qu'Hedi et son ami croisent le groupe de policiers de la BAC habillés en civil. Très vite, les deux jeunes hommes prennent la fuite et les policiers immobilisent Hedi contre un mur. C'est alors que l'auteur du tir de LDB, posté de l'autre côté du trottoir, tire sur Hedi qui lui tourne le dos. Le policier a indiqué avoir tiré alors qu'il se trouvait à "10-15 mètres, peut-être 15-20 mètres" de la victime auprès des enquêteurs de l'IGPN, mais la distance aurait été de 5 et 8,15 mètres selon les calculs de Médiapart. La Direction générale de la police nationale n'apporte pas de précisions sur les distances à respecter lors d'un tir de LDB et proscrit simplement de viser la tête. 

Touché au niveau du crâne, le jeune homme s'effondre sur la route, tandis que son ami continue de courir pour fuir la scène. Un des policiers prend à nouveau Hedi par le bras et le ramène sur un coin du trottoir, dans la pénombre, c'est alors que plusieurs policiers assènent des coups de pied à Hedi. La scène dure 44 secondes.

La question de la légitime défense

Sur la vidéo, Hedi ne semble pas avoir un comportement menaçant pour les policiers. Il n'apparait pas non plus un projectile à la main prêt à viser un membre des forces de l'ordre, comme indiqué par l'auteur du tir de LDB et ses collègues lors de leurs auditions. Tous ont d'ailleurs invoqué la légitime défense pour justifier le tir et les coups. Mais l'argument ne semble pas pouvoir être utilisé au vu des images. La vidéos montrent aussi que les quatre policiers mis en examen sont impliqués, or deux d'entre eux nient avoir assisté ou participé aux violences.

L'avocat d'Hedi, Jacques-Antoine Preziosi, a réagi aux images qu'il avait déjà vu dans le cadre de l'enquête. "Je dis depuis le début que ces policiers ont menti et mentent encore, il faut qu'ils soient en présence d'images pour avouer la vérité", a-t-il déclaré auprès de France 3. L'avocat qui réfute l'argument de la légitime défense des policiers campe sur sa position : "On le voit ici, Hedi est une victime innocente qui a été rouée de coups sans raison, contre laquelle on a tiré au LBD sans raison hors cadre légal, c'est une violence illégitime".

Quant à la réaction de la police, également recueillie par France 3 auprès de Bruno Bartocetti, le secrétaire national du syndicat Unité SGP-FO Police, elle est en demi-teinte. Le policier continue de considérer la possible légitime défense des membres de la BAC mis en cause : "Un individu peut être menaçant en tournant le dos". Concernant le tir au niveau de la tête, il explique que la tête n'était peut-être pas directement visée, "que dans l'action, la cible est en mouvement [et] il est impossible d'être aussi précis". L'homme reconnaît toutefois des images "choquantes" sur le passage à tabac d'Hedi. Refusant de se fier à une seule vidéo pour porter un avis, il appelle à "regarder l'ensemble des éléments constitutifs de l'enquête".