Assassinat de Samuel Paty : comment les six mineurs jugés sont impliqués dans l'affaire

Assassinat de Samuel Paty : comment les six mineurs jugés sont impliqués dans l'affaire Le premier procès sur l'assassinat de Samuel Paty s'ouvre ce lundi 27 novembre. Six mineurs impliqués dans le drame sont jugés et risquent jusqu'à deux ans et demi d'emprisonnement.

Il s'agit du premier procès de l'assassinat de Samuel Paty. Six mineurs sont jugés au tribunal pour enfants de Paris du lundi 27 novembre jusqu'à 8 décembre pour leur implication dans l'affaire de la mort du professeur d'histoire géographie survenue le 16 octobre 2020. Tous sont d'anciens élèves du collège du Bois d'Aulne de Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines, où enseignait Samuel Paty. Cinq d'entre eux sont comparaissent pour "association de malfaiteurs en vue de préparer des violences aggravées" et la sixième prévenue est jugée pour "dénonciation calomnieuse".

Actuellement en liberté, les six mineurs sont placés sous contrôle judiciaire. Ils risquent jusqu'à deux ans et demi d'emprisonnement à l'issue du procès qui se tient à huit clos, du fait de l'âge des prévenus au moment de l'assassinat de Samuel Paty. 

Le mensonge d'une adolescente à l'origine du drame

Agés de 13 à 15 ans aux moments des faits, les six mineurs sont d'une manière ou d'une autre impliqués dans l'assassinat de Samuel Paty. La plus jeune des prévenus est l'adolescente à l'origine de l'engrenage de violences qui s'est mis en place autour du professeur jusqu'à l'attaque terroriste. Jugée pour "dénonciation calomnieuse", elle avait accusé l'enseignant d'avoir diffusé des "caricatures obscènes" du prophète Mahomet en cours, après avoir demandé aux élèves musulmans de se signaler et de quitter la classe pour ne pas être choqué. L'enquête avait révélé qu'il s'agissait d'un mensonge et que l'élève n'avait pas assisté au cours qu'elle décrivait, car expulsée de l'établissement pendant deux jours.

L'adolescente avait colporté ce mensonge auprès de son père, Brahim Chnina, qui avait initié une campagne de dénigrement et de violence contre le professeur sur les réseaux sociaux. Une campagne à laquelle le militant islamiste Abdelhakim Sefrioui s'était joint et qui était parvenue jusqu'à Abdoullakh Anzorov, l'assaillant de Samuel Paty.

Me Mbeko Tabula, avocat de l'adolescente aujourd'hui âgée de 16 ans, assuré que sa cliente "n'aurait pu s'imaginer que les choses allaient dégénérer de cette manière". "La tragédie de la décapitation de Samuel Paty continue de la hanter. Elle se reconstruit et se prépare à affronter un jugement aux enjeux considérables", a-t-il ajouté.

Le rôle des adolescents dans l'assassinat de Samuel Paty

Quant aux cinq autres prévenus, ils avaient été approchés par l'assaillant de Samuel Paty le jour de l'attaque. L'un d'entre eux âgés de 14 ans, interpellé par Abdoullakh Anzorov, avait accepté de lui désigner l'enseignant en échange de 300€. L'adolescent avait également appelé la mineure auteure des accusations contre Samuel Paty pour confirmer le prétendu déroulé du cours sur les caricatures de Mahomet, à la demande de l'assaillant. Au cours des différentes auditions, le prévenu avait reconnu avoir compris de l'auteur de l'attaque voulait "frapper ou tuer" l'enseignant : "Je me doutais qu'il allait faire une grosse connerie, car on ne propose pas une grosse somme d'argent comme cela". Mais il avait ensuite déclaré croire que l'homme "allait se battre [contre Samuel Paty] [...] Au fond de moi, je ne croyais pas qu'il allait le tuer".

L'argent récupéré, l'adolescent avaient ensuite sollicité quatre de ses amis, les co-accusés, pour l'aider à faire le guet aux côtés de l'assaillant en attendant la sortie du collège de Samuel Paty. "Il est là-bas le prof !" avaient-ils informé l'assaillant une fois l'enseignant en vue, seulement quelques minutes avant l'assassinat. Durant leur garde à vue, ils avaient rapporté les déclarations de l'assaillant qui disait vouloir "forcer" le professeur à "s'excuser par rapport à ce qu'il a fait et l'humilier. [...] Il ne nous a pas dit qu'il voulait le tuer". Ils avaient toutefois reconnu avoir eu des doutes et avoir "imaginé des trucs, qu'il allait le tuer ou le kidnapper".

Le ministère de l'Education partie civile au procès

Le ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal, a annoncé dans un communiqué la constitution de son ministère en tant que partie civile au premier procès de l'assassinat de Samuel Paty, le 27 novembre, peu avant l'ouverture du procès. "Cela me semble indispensable pour réaffirmer avec force notre volonté de défendre les valeurs de la République que Samuel Paty incarnait. Mais aussi, pour exprimer mon soutien indéfectible à l'ensemble du corps enseignant, profondément meurtri par l'assassinat barbare de leur collègue" a-t-il ajouté.

Une douzaine de professeurs, anciens collègues de Samuel Paty se sont également constitués partie civile pour pouvoir assister au procès des six mineurs. Une enseignante faisant partie de ce petit groupe a expliqué au micro de franceinfo vouloir comprendre les agissements des élèves : "Qu'est-ce qui a fait qu'eux sont restés devant le collège, ont accepté de l'argent d'un inconnu pour montrer un professeur qu'ils connaissaient ? Comment on peut être amené à faire quelque chose d'aussi horrible ?" La professeure espère aussi observer une prise de conscience chez les prévenus : "Est-ce qu'ils ont pris conscience de la gravité de leurs actes ? Il y a de la colère, mais pas de volonté de vengeance."

Après le procès des six mineurs, un autre doit s'ouvrir aux Assises, du 12 novembre au 20 décembre 2024 pour juger huit adultes, dont le père de l'adolescente prévenue, Brahim Chnina, et le militant islamiste Abdelhakim Sefrioui.