"Avec Baldur's Gate 3, nous voulions mettre en avant la diversité et l'accessibilité" (interview)

"Avec Baldur's Gate 3, nous voulions mettre en avant la diversité et l'accessibilité" (interview) Récompensés avec le titre de "meilleur jeu étranger de l'année" lors de la cérémonie des Pégases, les développeurs de Larian Studios ont pu s'entretenir avec nous sur l'impact de leur dernier titre phare : Baldur's Gate 3.

C'est sous un tonnerre d'applaudissements que nous avons pu retrouver trois membres de "Larian Studios" lors de la dernière cérémonie officielle des Pégases 2024. L'événement, qui se charge chaque année de récompenser les meilleures créations vidéoludiques, a notamment décerné le titre de "meilleur jeu étranger 2023" à Baldur's Gate 3. Une récompense amplement méritée pour le studio de développement qui, suite à la sortie du titre, s'est rapidement retrouvé sous le feu des projecteurs suite au succès de leur création.

Nous avons pu nous entretenir avec Edouard Imbert, designer en charge des combats de Baldur's Gate 3 pour aborder les différentes thématiques du jeu et son impact sur l'industrie du jeu vidéo aujourd'hui.

© Larians Studios
Tout d'abord, félicitations pour votre prix de "meilleur jeu étranger de l'année". Lorsqu'on pense à Baldur's Gate 3, beaucoup de joueurs évoquent d'abord ses personnages très diversifiés. Etait-ce quelque chose d'important pour le studio ?

"La représentation et la diversité sont des points qui ont été importants dès le début de la conception du jeu. On voulait que le titre mette vraiment l'accent sur la diversité et l'accessibilité. Nous voulions créer des personnages forts, des personnages différents et de tous les genres. Le but premier était de ne vraiment laisser personne en dehors de la création du personnage. A ce titre, nous avons notamment eu pas mal de discussions au sujet du lore de Donjons et Dragons (ndlr : univers de base dont est tiré Baldur's Gate 3) que nous avons dû adapter afin que tous les joueurs se sentent les bienvenus. Rien qu'au sein de notre studio, nous avons plus de 20 nationalités différentes et de multiples personnalités alors on ne plaisante pas là dessus."

"Dès le développement du jeu, on voulait que le titre mette l'accent sur la diversité"

Ces personnages aux multiples facettes et personnalités sont beaucoup appréciés aujourd'hui. Certains d'entre-eux comme Astarion, pour n'en citer qu'un, sont très représentés au travers de multiples créations originales des fans. Est-ce quelque chose qui inspire le studio ou qui peut même avoir un impact sur les futures créations ?

"Vous savez, dans nos locaux nous avons même une galerie de fan arts où nos escaliers sont recouverts des créations originales de nos joueurs. Si les aventures, mais également les douleurs et les peines de nos personnages peuvent servir de porte-parole ou de représentation à des joueurs qui traversent des choses difficiles, ça nous émeut. On sait que certains pans de Baldur's Gate 3, comme l'histoire d'Astarion que vous avez cité, ont pu aider certains à se sentir vus ou représentés. Quand des fans nous envoient des dessins, des lettres ou même des anecdotes personnelles, c'est là que l'on a l'impression d'avoir vraiment réussi."

Le personnage d'Astarion a touché de nombreux joueurs et joueuses dans Baldur's Gate 3. © Larians Studios
Baldur's Gate 3 a eu un gros impact sur le phénomène du Jdr (jeu de rôle sur table) comme a pu l'avoir également des oeuvres comme Stranger Things. Pensez-vous que le jeu est une bonne porte d'entrée sur cet univers ?

(rires) "complètement. Complètement. Pour ma part, je me suis notamment occupé des combats du jeu et du journal des combats qui retranscrit toutes les actions effectuées et le détails des calculs lors des affrontements. En développant ceci, je me suis justement dit que ce serait incroyable si on faisait un jeu tellement accessible, qu'une fois celui-ci terminé, les gens savent jouer à "Donjons et Dragons". C'est pour ça notamment que toute l'équipe a insisté sur l'accessibilité des combats et que les gens comprennent tout ce qui se passe et puisse aller lancer de véritables dés dans le monde réel."

"Ce serait incroyable si on arrivait à faire un jeu si accessible que les gens sauraient jouer à Donjons et Dragons une fois celui-ci terminé"

Le jeu a eu un succès fulgurant et, on peut le dire, assez surprenant. Comment Larian Studios a géré une telle renommée acquise en si peu de temps ?

"En panique (rires) oui en panique. Il y a aussi des écueils qui sont assez dangereux. Tout le monde veut un peu de vous après ça et on ne peut pas être partout en même temps ou faire exploser le studio en engageant 300 ou 400 personnes de plus pour, au final, créer une situation comme chez CD Projekt (ndlr : studio de développement des jeux The Witcher et Cyberpunk 2077 qui a dû licencier 9% de ses effectifs après avoir beaucoup recruté pendant l'épidémie de COVID-19). On gère donc du mieux que l'on peut et au jour le jour. On ne prend pas de décisions hâtives et on ne panique pas."

En étant auréolé du titre de "meilleur jeu de l'année" par de nombreux médias, on est certainement en droit de se poser la question ultime : pensez-vous qu'il y aura un avant et un après Baldur's Gate 3 comme on pu l'être des titres comme "The Elder Scrolls 5 : Skyrim" ou "The Legends of Zelda : Breath of the Wild" pour le monde du jeu vidéo ?

"Quand j'étais ado, j'ai joué à des titres incroyables comme "Vagrant Story", "Metal Gear Solid" ou encore "Final Fantasy VII". Dans tout ce que je réalise aujourd'hui, il y a un peu de ces jeux. Dans tout ce que je fais dans l'industrie, on retrouve un peu de ces titres iconiques du Jeu Vidéo, et je sais que c'est la même chose pour plusieurs personnes chez Larian Studios. Donc peut-être que dans 10 ou 15 ans, on verra une nouvelle génération qui se dit elle-même grandement influencée par Baldur's Gate 3. J'ignore s'il y a un "avant" ou un "après" BG3 bien que beaucoup pensent que oui. Moi, tout ce que je demande, c'est d'avoir pu rendre les joueurs heureux, que ce soit pour 2, 5 ou 100 heures."