Jean Béliveau Le marcheur planétaire

A 45 ans, Jean Béliveau s'est lancé dans une entreprise hors norme : 75 000 km, 64 pays, 11 ans... ce ne sont pas les chiffres spectaculaires qui manquent pour décrire son tour du monde à pied !

 L'Internaute Magazine : Comment vous est venue l'idée de réaliser ce tour du monde ?

Jean Béliveau : L'idée m'est venue après une crise existentielle. C'est arrivé après la tempête de pluies verglaçantes de janvier 1998 (en Montéregie au Québec), durant laquelle j'ai eu un revers de fortune. Je me devais de refaire ma condition physique et mentale en m'entrainant à la marche et à la course à pied. C'est venu soudainement en courant : à ce moment-là, j'étais sur le majestueux pont Jacques Cartier, je me suis dit "mais pourquoi pas aller plus loin, faire un tour du monde ?". Plus tard, quand j'ai annoncé mon départ à ma conjointe Luce, celle-ci m'a suggéré de dédier ma marche à la "paix au profit des enfants".

 L'Internaute Magazine : Dès le début, vous saviez que ça durerait 10 ans : est-ce que ça faisait partie du challenge ?

Jean Béliveau : Oui. En fait j'ai complété la boucle en 11 ans et 2 mois. J'avais réalisé un tracé sur la mappemonde traversant les 5 grands continents, après les estimations de kilomètres, cela me donnait théoriquement un trajet d'une décennie.

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Le chariot qui ne l'a pas quitté. © Jean Béliveau

 L'Internaute Magazine : Quelle préparation physique, matérielle ou linguistique a été nécessaire ?

Jean Béliveau : En fait, je considère que je n'étais pas préparé, mais bien décidé à y aller. Je m'étais bien entrainé physiquement, par contre au niveau matériel, quelques jours avant de partir j'ai acheté ce chariot et une tente, pour le reste j'ai pris des choses domestiques... Autrement je ne parlais que le français, je n'ai pas lu sur les pays avant, je me disais que les choses nécessaires viendraient en route.

 L'Internaute Magazine : Y a-t-il eu des moments où vous avez eu envie de laisser tomber ? Des moments où vous vous êtes senti en danger ?

Jean Béliveau : Il y a eu des moments passablement difficiles, surtout des défis lorsqu'il fallait passer au travers de déserts, de montagnes comme les Andes par exemple, subir des chaleurs extrêmes. J'ai rencontré des chocs culturels assez éprouvants, surtout pour pratiquer la tolérance avec les peuples. Des zones d'animaux sauvages en Afrique, de banditisme en Amérique Latine et en Afrique du Sud... Je peux dire que le plus difficile était de compléter cette marche comme il le fallait, fidèle au concept de départ.

 L'Internaute Magazine : Qu'avez-vous appris au contact des gens ?

Jean Béliveau : Je garde le souvenir de la simplicité de vie. Ces milliers de sourires d'hommes, femmes, grands-pères et grand-mères, enfants qui m'ont reçu avec amour dans leurs humbles demeures.

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Forrest Gump © UIP

 L'Internaute Magazine : Que pensez-vous de la comparaison qui a été faite par un peu tout le monde avec le personnage de Forrest Gump ?

Jean Béliveau : C'est drôle, cette comparaison fut faite dans plusieurs pays tout au long de ma marche. Quand l'idée m'est venue, je me suis dit : "Ah ! C'est comme Forrest Gump ". Bien sûr qu'il y a une certaine ressemblance sur le thème du questionnement existentiel au travers d'une longue course ou d'une longue marche.

 L'Internaute Magazine : Pas trop difficile de revenir chez vous ? Ces 11 ans de marche ne vous ont pas donné la bougeotte ?

Jean Béliveau : Il a certainement fallu que je m'adapte, ce que nous savions bien avant l'arrivée. Je peux dire que les 3e et 4e semaines après l'arrivée furent les plus difficiles. Pour ce qui est de la bougeotte comme vous le dites si bien, eh bien je fais quand même des marches journalières de une à deux heures, ce qui m'aide passablement à m'adapter à ma nouvelle vie.

 L'Internaute Magazine : Envisagez-vous un nouveau voyage ?

Jean Béliveau : Je n'envisage pas de nouveaux voyages en solo, c'était l'aventure de ma vie et maintenant je passe à autre chose, conférences, livre, philanthropie...  Luce fait toujours la blague : "Je l'ai enchaîné à la maison !"

"Il n'y a qu'à faire le premier pas"

 L'Internaute Magazine : Quel conseil donneriez-vous à quelqu'un qui voudrait se lancer dans un projet comme le vôtre ?

Jean Béliveau : J'aimerais lui dire : si il ressent réellement la force de faire quelque chose de différent et en grand (l'envergure étant relative à chacun) alors il n'y a qu'à faire le premier pas, et c'est là que comme par magie, les choses vont se précipiter pour la réalisation. Mes mots clefs: "Persévérance et Jouissance de la vie" !

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