Vidéo de viol présumé sur Facebook et Snapchat : les suspects écroués, la victime désemparée

Vidéo de viol présumé sur Facebook et Snapchat : les suspects écroués, la victime désemparée Les deux jeunes hommes impliqués à Perpignan dans l'affaire de la vidéo de viol présumé ont été mis en examen pour "viol en réunion" et placés en détention. La vidéo avait été postée sur Snapchat et Facebook, provoquant l'indignation des internautes. La victime a indiqué ne pas vouloir porter plainte, lors de son témoignage.

[Mis à jour le 6 janvier à 9h23] L'affaire du viol présumé de Perpignan, montré dans une vidéo postée sur Snapchat et Facebook est dans les mains de la justice. Les deux jeunes suspects ont été mis en examen puis écroués mardi vers 17h30. Le procureur de la République de Perpignan, Achille Kiriakides, a annoncé hier soir leur "placement en détention provisoire". Plus tôt dans la journée, une information judiciaire pour "viol en réunion, enregistrement d'images d'un viol en réunion et atteinte à la vie privée" a été ouverte. Les deux suspects sont mis en examen pour "viol et diffusion de ce viol sur les réseaux sociaux".

La vidéo du viol présumé d'une jeune femme, mise en ligne sur les réseaux sociaux ce week-end, a d'abord révolté les internautes. Elle a de quoi aujourd'hui secouer les services de police et les juges en charge du dossier. L'indignation suscitée est assez compréhensible : le film montre assez clairement, pendant plusieurs minutes, une jeune femme qui semble être agressée sexuellement par deux hommes dans un domicile. La scène qui ressemble manifestement à un viol (la jeune femme semble inconsciente sur les images) a été filmée avec un smartphone et la vidéo a été mise en ligne par les auteurs présumés.

Le procureur de la République a tenu une conférence de presse hier matin pour donner les premiers éléments de l'enquête : les trois individus se sont retrouvés "selon leurs dires, pour faire la fête". "A un moment donné, la jeune fille a subi des rapports sexuels qui ont été filmés avec un téléphone portable", a-t-il exposé, rappelant plusieurs fois le "contexte d'alcoolisation" dans lequel se sont déroulés les faits.

Pas de plainte "pour le moment"

La victime serait dans l'impossibilité d'affirmer si l'acte sexuel était consenti ou non, mais aurait déclaré aux enquêteurs que l'un des garçons était son "petit-ami". Les jeunes hommes auraient reconnu les faits mais assurent, eux, qu'elle était consentante. Ce qui est certain, en revanche, c'est que la jeune femme - âgée de 18 ans - et les deux garçons se connaissaient avant que n'ait eu lieu le crime présumé et la diffusion des images sordides. Le procureur a précisé mardi matin que la victime n'a pas déposé plainte "pour le moment", ajoutant que "les expertises médicales, informatiques, toxicologiques et psychologiques" qui vont avoir lieu détermineront si "ces relations ont été intégralement et librement consenties".

Que s'est-il passé ? Que voit-on sur la vidéo ?

Les faits, d'abord évoqués à Grigny par France Info, se sont en réalité déroulés dans le sud-ouest de la France, à Perpignan, samedi soir. D'après les derniers éléments de l'enquête, la jeune femme serait restée au domicile de l'un des agresseurs jusqu'à la nuit de dimanche à lundi. Une source policière a décrit la scène filmée auprès des journalistes de la radio publique : on voit ainsi sur la vidéo diffusée sur les réseaux sociaux "des jeunes qui partent en scooter avec une fille dans une maison. Ils la font boire, ils la droguent et ils la violent avec une bouteille de whisky". Le journal local L'Indépendant parle d'images montrant "une relation sexuelle dans des conditions particulièrement brutales". Aussi sordide et incompréhensible que cela puisse paraître, le film, insupportable, sur lequel on voit la jeune femme être déshabillée et demeurant apathique, a été massivement partagé sur les réseaux sociaux, et très commenté. Le crime présumé aurait eu lieu au domicile de l'un des deux suspects, situé dans le quartier sud de Perpignan.

Viol ou "libertinage poussé" ?

Pour l'avocate de l'un des individus mis en examen, Me Françoise Nogues, les actes sexuels survenus dans la nuit de samedi à dimanche relève du "libertinage poussé sur fond d'alcool". "Il ne s'agit absolument pas d'un viol, ces faits ne sont pas répréhensibles au sens juridique du terme" a-t-elle argumenté avant la déclaration du procureur de la République de Perpignan, ajoutant que "la victime est la petite amie de [s]on client depuis 5 ans". "Quant au délit de diffusion d'images à caractère pornographique, le film n'a pas été fait avec le téléphone de mon client. Ce n'est pas lui qui a filmé. Le film a été diffusé sur Snapchat à un cercle restreint de personnes. Il n'avait pas la vocation à être diffusé sur Facebook. On fait de mon client le bouc émissaire d'un disfonctionnement d'internet" a-t-elle considéré.

Plusieurs médias ne prennent pas de pincette et parlent ouvertement de "viol" pour qualifier les actes commis par les deux hommes, comme notamment le journal Le Monde. Le quotidien n'hésite pas à donner des détails de la vidéo, insistant sur l'état de semi-inconscience de la victime : "Elle est d'abord assise sur les genoux de l'un des hommes, et parvient à peine à protester lorsqu'il lui donne de petites tapes sur les fesses. [...] L'un des hommes tente de la forcer à saisir un verre. Elle en est incapable". La vidéo s'achève sur une longue minute de rapports sexuels, alors que la victime est inerte, affalée sur une table.

Selon les informations de M6, la jeune femme qui a subi les actes sexuels manifestement dégradants se présenterait bien comme la "petite-amie" de l'un des deux individus mis en examen. Elle aurait d'abord évoqué une forme d'acte sexuel "consenti". D'après les informations de La Depêche, la victime a été entendue par la police après dégrisement mais n'a pas été en mesure de décrire les circonstances de l'acte sexuel ni d'affirmer si elle était consentante ou pas. Si elle refuse encore de porter plainte, c'est, dit-elle, "pour ne pas faire de tort à (son) ami". Les deux jeunes hommes auraient également livré leur version selon le journal. Tout en reconnaissant les faits, ils asssureraient que la jeune femme était bien consentante. Selon une source policière interrogée par BFMTV, les suspects auraient dit "avoir des remords" et ils reconnaîtraient la gravité des faits.

Sur les images, la jeune femme apparaît toutefois dans un état d'alcoolémie très avancé. Par ailleurs, elle ne donne pas l'impression de savoir qu'elle est filmée par un téléphone portable et rien n'indique qu'elle ait pu donner son accord pour que le film de 5 minutes soit mis en ligne sur Internet. Les enquêteurs doivent déterminer dans quelles circonstances exactes ont été tournées les images et quelle est la nature précise de la relation entretenue entre la jeune femme et les deux hommes. "Lorsque les faits sont établis, on peut se passer de la plainte de la victime", a assuré un proche du dossier à La Dépêche. "Il convient de prendre la qualification de viol avec beaucoup de prudence", a par ailleurs rappelé lundi le commissaire Yannick Janas.

Viol présumé sur Facebook : la victime en "état de choc"

La police nationale a rapidement été informée dimanche, via la sous-direction de lutte contre la cybercriminalité, grâce à la plateforme de signalement Pharos. Les deux jeunes suspects ont été arrêtés dans la nuit de dimanche à lundi, selon les informations de Midi Libre, suite à un autre signalement effectué auprès du commissariat de Perpignan. Ils ont été arrêtés vers 4 heures du matin et placés en garde à vue pour "viol aggravé". Leur garde à vue a été prolongée lundi soir d'après La Dépêche. Il devraient être présentés à un juge d'instruction mardi matin pour divulgation de documents à caractère pornographique sur internet et également pour viol. Deux circonstances aggravantes pourraient être retenues, d'après le journal : "agression commise en réunion et alors que la victime est en état de faiblesse". Sur ce qui semble être la page Facebook de l'un des suspects présumés, on découvre une vidéo dans laquelle il affirme avec satisfaction que son bracelet électronique lui a été retiré le 10 novembre 2015. L'homme est donc connu de la justice et de la police.

La sûreté départementale des Pyrénées orientales est en charge de deux enquêtes qui concernent cette affaire sordide. La première pour "diffusion d'images pornographiques sur Internet", la seconde pour "suspicion de viol aggravé". Les services chargés de l'enquête doivent désormais établir si les actes sexuels filmés et mis en ligne revêtent un caractère consenti ou non, comme l'affirme la jeune femme. "Il faudra déterminer la part de contrainte de la relation sexuelle entre ces deux hommes, placés en garde à vue, et une femme elle aussi majeure, sur fond d'alcool", a ainsi déclaré le directeur départemental Yannick Janas. 

"Violée" puis "séquestrée" ?

Le quotidien Midi Libre rapporte que "la jeune fille, âgée de 18 ans, a également été découverte" dans l'appartement de l'un des suspects, là où a eu lieu l'interpellation, "en état de choc extrême" dans la nuit, puis hospitalisée. Selon France Bleu Roussillon, lorsque les policiers sont entrés en pleine nuit dans l'appartement de l'un des suspects, le lieu du viol présumé, les deux agresseurs présumés étaient devant leur ordinateur, toujours en train de commenter leur vidéo sur les réseaux sociaux. La jeune victime était elle prostrée dans une pièce, dans un état second, ce qui laisse les enquêteurs perplexes sur la version d'un acte sexuel "consenti". La Depêche livre une version légèrement différente. D'après le journal, l'un des jeunes hommes a été surpris vers 6h du matin dans le couloir de l'immeuble à l'arrivée des policiers alors qu'il entendait sortir se dégourdir les jambes. La victime était effectivement "allongée sur le lit, habillée, ivre et visiblement en état de choc".

"Vidéo d'un viol diffusé sur les réseaux : les deux suspects arrêtés"

Qui sont les agresseurs présumés ?

Les deux agresseurs présumés, tous deux majeurs, risquent une peine de 20 ans de prison. On sait en réalité encore peu de choses sur les auteurs du viol présumé de Perpignan. L'un d'eux habite dans un appartement situé dans le "quartier sud" de la ville. Selon le journal La Dépêche, il s'agit d'une "résidence qui héberge à la fois des étudiants et des cas sociaux dans un contexte parfois difficile". Le quotidien affirme par ailleurs que l'un des deux garçons est originaire de Grigny, dans le département de l'Essonne. Les journalistes de L'indépendant affirment quant à eux avoir consulté les pages Facebook des deux mis en examen. Tous deux semblent vouer une fascination à l'argent et manifestent des attitudes de provocation quasi permanentes sur les photos mises en ligne. Le premier s'exhibe par exemple, le 2 janvier, "devant un étalage de billets de 50 euros, de téléphones portables, de papier à rouler et de cannabis", écrit L'indépendant. Son ami, lui, "publiait une photo de lui en train de violenter une jeune fille" le 20 décembre dernier.

Facebook s'attire la colère des internautes

Si de nombreux internautes ont contacté directement la police, la vidéo a également été signalée par de nombreux utilisateurs de Facebook directement via l'outil prévu à cet effet par le réseau social. La vidéo, mise en ligne dimanche soir, n'a été retirée de Facebook que lundi matin. L'Express publie ainsi les réponses de Facebook après le signalement de la vidéo "pour nudité". Réponse du réseau social ? "Merci d'avoir pris le temps de signaler quelque chose qui, d'après vous, pourrait enfreindre nos standards de la communauté. Ces signalements comptent pour beaucoup dans nos efforts pour faire de Facebook un environnement sûr et accueillant. Nous avons examiné la vidéo que vous avez signalée pour nudité et avons déterminé qu'elle n'allait pas à l'encontre de nos standards de la communauté". Rien de choquant donc pour les modérateurs de Facebook. Une réponse qui laisse à penser que les modérateurs ont axé leurs vérifications sur l'apparition ou non de corps ou parties du corps nue de la vidéo et non sur le caractère violent du film. Ces dysfonctionnements seraient dus, selon L'Express au fait que la modération est "largement sous-traitée à bas coûts dans les pays asiatiques".

Sur Twitter et Facebook, les commentaires d'indignation sont légion. Plusieurs internautes se sont montré lundi extrêmement actifs pour identifier eux-mêmes les coupables : certains ont même posté sur leurs réseaux publics et sur leurs blogs des photos sur lesquels posent - supposément - les deux suspects habillés en jogging. D'autres appellent même à la vengeance en donnant des informations sur la domiciliation des deux agresseurs présumés. La police appelle pourtant officiellement à ne pas "participer à la diffusion d'éléments pouvant perturber l'enquête en cours".

La vidéo du viol présumé aussi sur Youtube

Depuis dimanche soir, les images du supposé crime circulent sur Internet, elle a rapidement été copiée et mise en ligne sur d'autres plateformes par des internautes, notamment sur Twitter. LeMonde.fr révèle que la vidéo, coupée et diffusée sur un compte "populaire" de Facebook a été vue 340 000 fois avant que l'entreprise américaine ne la supprime. Sur ledit compte, son auteur expliquait qu'il souhaitait propager la vidéo pour que soient rapidement reconnus les violeurs présumés. Des versions ont aussi été mises en ligne sur Youtube. Reppelons que relayer une vidéo d'agression est puni par la loi.

Que risquent les internautes qui ont partagé la vidéo du viol présumé sur les réseaux sociaux, Snapchat, Facebook ou Twitter ? Si le viol est avéré, les internautes qui ont partagé la vidéo peuvent être reconnus coupables de complicité d'atteinte à l'intégrité de la personne. En diffusant ces images, ils engagent leur responsabilité. Ceux qui ont diffusé la vidéo, sur Facebook, Snapchat ou n'importe quel autre support, tombent sous le coup de l'article 222-33-3 du Code pénal. Ils encourent une peine de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75 000 euros d'amende.