DOSSIER
Avril 2006
8. L'homme de Néanderthal est une espèce distincte de l'homme moderneQui est vraiment l'homme de Néanderthal ? Un cousin lointain ou simplement un homme différent ? Les scientifiques sont partagés.
Un hominidé massif et robuste ( 90 kg et 1,65 m), au faciès marqué par un bourrelet sus-orbitaire, au front fuyant, sans menton et au cerveau volumineux : c'est le portait de l'homme de Néanderthal, ayant peuplé l'Europe durant 200 000 ans et rayé du globe il y a 30 000 ans. Pour certains, Homo sapiens et Homo neanderthalensis sont deux espèces distinctes. Pour d'autres ce ne sont que deux sous-espèces. Comment trancher ? Pour l'ADN : deux espèces différentesLes multiples études effectuées sur les os ne permettent pas de se prononcer clairement sur la classification de l'homme de Néanderthal. Pourtant, un squelette d'enfant découvert au Portugal a été présenté comme un hybride Néanderthal/sapiens. Cela impliquerait un mélange des populations et donc un patrimoine génétique métissé avec celui des Néanderthaliens pour l'homme actuel. Or, les analyses les plus récentes (l'étude de certains ADN, les ADN mitochondriaux), ne montrent aucune trace de Néanderthal dans notre génome. Cet ADN a la particularité de n'être transmis que par la mère, et possède des séquences caractéristiques à chaque espèce. Les scientifiques ont retrouvé de l'ADN mitochondrial de Néanderthal sur tous les fossiles de sa population mais aucun sur les échantillons d'hommes modernes. Il n'y aurait donc pas eu de croisement ? De récentes analyses d'ADN extrait d'ossements néanderthaliens indiqueraient même une séparation des lignées humaine et néanderthalienne pendant 500 000 ans. Il s'agirait donc bien de deux espèces différentes. Une possible hybridation à l'estAucun métissage entre ces deux espèces donc ? Pas sûr car survient une nouvelle hypothèse : les hommes de Néanderthal seraient apparus par spéciation à distance. Pour Jean-luc Voisin (de l'Institut de Paléontologie Humaine), Néanderthal est devenu Néanderthal en trois étapes : d'abord une première population humaine entre en Europe. Là, elle se spécifie : apparaissent les premiers hommes de Néanderthal, encore peu marqués. Puis l'homme moderne pénètre l'Europe à son tour. Au cours du temps, plus il avance vers l'ouest, plus il rencontre des populations aux caractères néanderthaliens de plus en plus marqués. En Europe centrale et au Proche-Orient, le métissage est encore possible. Mais en Europe occidentale, la différenciation avait dû atteindre un degré tel que l'hybridation n'était plus possible entre ces deux groupes humains.
Un argument en faveur de cette hypothèse : plus les populations néandertaliennes sont occidentales et plus elles présentent des caractères néanderthaliens prononcés. De plus, il semblerait que certains de ces caractères subsistent uniquement dans les populations post-Néanderthaliennes au Proche-Orient et en Europe centrale. La question n'est pourtant pas résolue car il est difficile de concilier la notion d'espèce biologique et paléontologique.
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