Enlèvement Mia : Rémy Daillet s'exprime sur l'affaire, que sait-on de cet homme ?

Enlèvement Mia : Rémy Daillet s'exprime sur l'affaire, que sait-on de cet homme ? ENLÈVEMENT MIA - Il est considéré comme l'homme aux manettes de l'enlèvement de la petite Mia. Visé depuis dimanche par un mandat d'arrêt international, Rémy Daillet-Wiedemann donne sa version des faits dans un entretien accordé au Parisien.

[Mis à jour le 20 avril 2021 à 18h07] "Il ne s'agit pas d'un enlèvement, mais d'une restitution d'un enfant à sa maman à sa demande". Voici les mots utilisés par Rémy Daillet-Wiedemann pour se défendre du rôle endossé lors du rapt de la petite Mia, enlevée chez sa grand-mère la semaine dernière. Si depuis la petite fille a été retrouvée, le rôle joué par Rémy Daillet-Wiedemann reste encore trouble. Connu pour sa proximité avec la sphère complotiste, l'homme de 55 ans vit aujourd'hui en Malaisie. Depuis dimanche 18 avril, il est visé par un mandat d'arrêt international.

Mais ce mardi, il a souhaité raconter sa version des faits dans une interview accordée au Parisien. "Pour ma part, je n'ai pas eu de contact direct avec la maman de Mia, mais il est vrai que j'encourage vivement la restitution de tous les enfants kidnappés en France, c'est-à-dire placés de façon indue, en violation du droit, assure Rémy Daillet-Wiedemann. Il y en a, paraît-il, 57 000 chaque année. Donc, l'État kidnappe, puis nous accuse, nous, de commettre des enlèvements d'enfants".

Dans l'entretien, l'homme suspecté et la mère de Mia, Lola Montemaggi semblent partager des valeurs communes : une opposition forte à l'autorité et à la scolarisation obligatoire, mais aussi une remise en question des décisions de justice. "Je ne reconnais aucune légitimité à une justice qui se permet d'émettre un mandat d'arrêt contre moi compte tenu des circonstances , peut-on notamment lire dans les colonnes du quotidien, avant de décrire son mandat d'arrêt international comme participant à une "opération de terreur" de l'État.

L'homme aurait-il manipulé les autres suspects ? Selon BFMTV, son nom ressort à plusieurs reprises lors des différentes gardes à vue des suspects déjà interpellés, ce à quoi Rémy Daillet-Wiedemann répond dans le Parisien : "Ils me font beaucoup d'honneur". Rémy Daillet-Wiedemann pourrait avoir directement ou indirectement encouragé les hommes soupçonnés d'avoir enlevé la petite Mia dans les Vosges la semaine dernière, rapporte lundi 19 avril Le Parisien. Il faut dire que parmi ses mille et un combats mentionnés sur son site internet, Rémy Daillet-Wiedemann évoque notamment le projet de "stopper les placements abusifs d'enfants". Mieux encore, au travers d'un site dédié, il va jusqu'à prôner l'idée d'une éducation à la maison et en rupture assumée avec l'Éducation nationale, soit une vision similaire à celle de la mère de Mia, Lola Montemaggi. Sur ce même site, il propose, moyennant finance, d'expliquer à ceux qui seraient intéressés comment partir à l'étranger, pour, dit-il, fuir la "dictature".

Mais une source proche de l'enquête tempère toutefois : "rien ne permet [d'établir] à ce stade" que Rémy Daillet-Wiedemann a fomenté l'opération "Lima", nom de code donné à l'enlèvement de Mia par ses auteurs. Toutefois, d'après de nouvelles informations révélées lundi soir par BFMTV, l'un des suspects aurait affirmé en garde à vue que Rémy Daillet-Wiedemann avait initialement été contacté via Internet par la mère de Mia pour l'aider dans sa volonté de récupérer sa fille et fuir avec elle à l'étranger. Il aurait ensuite confié le dossier à son bras-droit "Bouga". Un second suspect va plus loin encore, estimant que Rémy Daillet-Wiedemann aurait intégralement financé l'enlèvement grâce à un compte offshore. Coût de l'opération ? 3 000 euros, affirme-t-il. Quoi qu'il en soit, la piste semble prise très au sérieux par les autorités compétentes puisqu'un mandat d'arrêt international a été lancé à son encontre dès dimanche, nous apprend Le Parisien.

Opération "Lima"

Après l'enlèvement de la petite Mia mardi 13 avril, la petite fille a été retrouvée avec sa mère, dimanche 18 avril, dans le village de Sainte-Croix, en Suisse. Elles étaient réfugiées dans un squat, où personne ne semblait connaître leurs identités. La mère, Lola Montemaggi, a depuis été écrouée et placée dans la prison du canton de Vaud, en Suisse. Parmi les six  autres suspects, quatre sont désormais en détention provisoire. Le cinquième, le dénommé "Jeannot", est placé sous contrôle judiciaire. Enfin, le dernier homme, Roméo, est également incarcéré et devrait être extradé dans les semaines à venir. Ce dernier aurait joué un rôle important en servant de chauffeur à la mère lors de l'enlèvement de sa fille. Qu'en-est-il de Mia ? La fillette de 8 ans a pu retrouver sa grand-mère.

Dans sa conférence de presse, le procureur de la République de Nancy, François Perain, a détaillé une "opération de type militaire". Ce sont cinq hommes qui sont suspectés d'avoir préparé et réalisé l'enlèvement de Mia, qui logeait chez sa grand-mère. Une sixième personne, un ressortissant français surnommé Roméo aurait pris en charge la mère et la fille du côté suisse. Il est également en garde à vue. "Il s'agit d'une action extrêmement bien préparée, baptisée par leurs auteurs 'Opération Lima'", a-t-il ajouté. 

Le magistrat a donné des détails sur l'organisation de l'enlèvement. Les suspects sont des "hommes plutôt insérés socialement" et qui ne sont "pas connus de la justice". Ils se sont rencontrés sur les réseaux sociaux, et "partagent une même communauté d'idées", notamment une opposition à l'État et une mobilisation "contre la dictature sanitaire". François Perain réfute toutefois l'appartenance à une mouvance survivaliste, comme cela a pu être décrit auparavant. "C'est beaucoup plus compliqué", a-t-il déclaré. Ce qui a rassemblé ces hommes pour aider la mère de Mia dans son enlèvement, c'est la conviction "que les enfants placés dans le cadre de la protection de l'enfance sont enlevés injustement à leurs parents" et qu'il fallait "agir pour restituer les enfants placés à leurs parents". Lola Montemaggi a pris contact via les réseaux sociaux avec l'un de ces hommes.

Comment la mère de Mia a-t-elle réussi à échapper aux radars du renseignement ?

La réponse tient principalement dans le lieu où elle avait décidé d'emmener sa fille : un squat occupé par une communauté autonome dans le village suisse de Sainte-Croix. Autour de cette ancienne usine désaffectée, les riverains l'assurent : ils n'étaient pas au courant que les nouvelles voisines étaient alors recherchées. Loin de la civilisation et refuge discret, le squat est considéré comme une ZAB, Zone à bâtir, où les habitants partageaient des valeurs communes avec la maman de Mia : rejet de la société de consommation et refus de l'autorité. Reste à savoir si les habitants ignoraient réellement l'identité de Mia et sa mère.  

Où a été retrouvée Mia après son enlèvement ? Quel a été le parcours de la mère ? 

La petite Mia a été retrouvée cinq jours après son enlèvement, dimanche 18 avril. Elle était en compagnie de sa mère, Lola Montemaggi, 28 ans, dans un immeuble squatté du village de Sainte-Croix, dans le canton de Vaud, à l'ouest du pays. La police fédérale helvétique ainsi que la police cantonale ont procédé aux recherches, aidées par deux gendarmes français, à la demande du parquet de Nancy. En tout, 200 gendarmes ont été mobilisés pour retrouver la petite fille. Une fois que Mia a été enlevée au domicile de sa grand-mère et remise à sa mère par les ravisseurs sur un parking à quelques kilomètres des Poulières, dans les Vosges, l'équipe a pris la route en direction de la frontière suisse. De l'autre côté, un autre homme, nommé Roméo, a récupéré Lola et Mia dans sa voiture. Il les a déposées dans un hôtel pour la nuit du 13 au 14 avril. Les trois ont pris un taxi et se sont rendus à Neuchâtel, "où une sympathisante du mouvement" a hébergés Mia et sa mère, du 14 au 15 avril, "avant qu'elle les conduise au squat", a indiqué le procureur, dimanche. 

Comment s'est déroulé l'enlèvement de la petite Mia dans les Vosges ?

L'enlèvement a été "extrêmement bien préparé", selon le procureur François Perain, et baptisé 'Opération Lima'. Un homme, surnommé Bouga, a préparé l'action, tandis que quatre autres suspects ont participé activement à l'enlèvement. Après des contacts sur les réseaux sociaux, les cinq hommes ont mis en place l'expédition, ont acheté du matériel de camping, des téléphones portables et des talkies-walkies, avec un budget de 3 000 euros. Un script a notamment été trouvé au domicile de l'un des suspects, nommé Pitchoun. Les ravisseurs présumés ont passé deux nuits en camping sauvage dans les Vosges, le dimanche 11 et le lundi 12 avril. Répartis dans trois véhicules, les hommes ont retrouvé la mère de Mia dans un parking, non loin des Poulières. Trois d'entre eux se sont rendus au domicile de la grand-mère, dans le village. "Deux vont jouer le rôle de faux éducateurs", a raconté François Perain. "L'enfant est remise sans difficulté, et les faux éducateurs et le transporteur rejoignent les autres membres du groupe et la mère", a poursuivi le magistrat. L'équipe de l'enlèvement s'est retrouvée sur le parking. Quatre membres ainsi que la mère et la fille se sont répartis dans des véhicules et se sont dirigés vers la frontière suisse. 

Qui sont les ravisseurs ?

Cinq hommes sont en garde à vue, dimanche et doivent être mis en examen pour "enlèvement en bande organisée sur mineure de 15 ans". Ils ont été arrêtés mercredi 14 et jeudi 15 avril. Les suspects, surnommés Jeannot, Pitchoun, le corbeau, Bruno et Bouga, sont décrits comme "plutôt insérés socialement" et ne sont "pas connus de la justice". Ils ont mis au point une "opération de type militaire", selon le procureur de la République de Nancy. François Perain ne les considère pas comme appartenant à la mouvance survivaliste. "C'est une communauté d'idées, avec des points communs sur des idées dures telles qu'un discours anti-étatique, la dénonciation de la dictature sanitaire", a-t-il précisé, dimanche.

En aidant Lola Montemaggi, avec qui les contacts se sont établis sur les réseaux sociaux, leur objectif était d'"agir pour restituer les enfants placés à leurs parents". Ils considèrent en effet que les enfants sont "enlevés injustement à leurs parents". Un autre homme, nommé Roméo par le procureur, aurait récupéré la mère et la fille de l'autre côté de la frontière suisse. Ce dernier a été interpellé par les autorités helvétiques. Un mandat d'arrêt européen a été délivré à son encontre. Des investigations sont en cours pour en savoir plus sur le fonctionnement du groupe. Le procureur de la République de Nancy n'a pas exclu de nouvelles interpellations. 

Qu'est ce que le survivalisme ?

D'après Le Parisien, ces individus seraient des survivalistes qui étaient déjà suivis par la DGSI avant l'affaire Mia. Une source proche du dossier a indiqué au Parisien que les suspects étaient surveillés par les services de renseignement, car "jugés potentiellement dangereux" et "proches des thèses de l'ultra-droite". Dans l'appartement parisien (XIXe) de l'un des suspects, âgé de 58 ans, les gendarmes ont mis la main sur l'une des voitures recherchées. Des explosifs " de type militaire " ont également été retrouvés chez le suspect de 23 ans interpellé en Seine-et-Marne. 

Mouvance d'extrême droite, le survivalisme de façon "simple" signifie se préparer au pire et apprendre à vivre malgré une éventuelle attaque nucléaire, pandémie ou autre. Si certains apprennent à vivre dans la nature, à cacher des provisions, plusieurs d'entre eux apprennent à manier les armes et peuvent être potentiellement dangereux comme les trois suspects arrêtés qui étaient surveillés par la Direction générale de la sécurité intérieure.

Qui est Lola Montemaggi, la mère de la fillette ?

Âgée de 28 ans, la mère de Mia ne se trouve plus à son domicile depuis plus de 48h, date de l'enlèvement. Elle mesure 1m70, est très mince, ses cheveux sont châtains clair mi-longs et elle présente deux tatouages " étoiles " à l'intérieur d'un poignet. Selon l'alerte, elle est susceptible de circuler à bord d'un véhicule Peugeot 207 noir, immatriculé BZ 370 GZ. Selon un automobiliste cité par Vosges matin, elle aurait été prise en stop mardi matin, dans un village à seulement une quinzaine de kilomètres des Poulières, lieu de l'enlèvement. Elle aurait confié vouloir se rendre à l'étranger. Selon le procureur de la République de Nancy, Lola Montemaggi ne connaissait pas "a priori" les ravisseurs présumés. Elle a échangé avec l'un des membres de cette mouvance, surnommé Bouga, sur les réseaux sociaux et ce dernier "a décidé qu'il fallait aider cette mère", a indiqué le magistrat, dimanche. 

Lola Montemaggi a déjà eu affaire aux autorités locales, pour sa "marginalité", son "attitude antisociale", mais également pour "violences sur conjoint" et "violences sur la voie publique", rapporte Le Figaro. Un "geste d'amour", voilà comment le père de Lola Montemaggi a décrit les actions de sa fille, samedi, lors d'un entretien au micro de Vosges FM. "On n'avait pas à lui retirer la garde de sa fille, c'est profondément injuste", a poursuivi Claude Montemaggi. Selon les autorités, la mère ne répondait à aucune convocation des services de la protection l'enfance depuis plusieurs mois. Lola Montemaggi qui n'avait plus la garde depuis décembre 2020, a "adopté devant le juge des enfants le 11 janvier une posture préoccupante, elle se disait malade, ne pas souhaiter que l'on s'immisce dans sa vie ni dans celle de de sa fille en arguant une position de rejet de la vie en société". La mère avait fait savoir qu'elle souhaitait  vendre son appartement et ses biens pour partir en camping-car avec sa fille, pour passer "sous les radars de la société".

Selon une amie, interrogée par Le Parisien, Lola Montemaggi est "une bonne femme pleine de convictions, souriante et gentille, mais qui s'enflamme vite. Elle ne fait pas les choses à moitié, elle les fait même à 200%." Interrogée sur ses convictions, "Julie" explique que la mère de Mia a "immédiatement adhéré au mouvement des Gilets jaunes dans l'aspect du rejet de la société. Je pense qu'elle a trouvé sa cause à ce moment-là". Alors que le procureur a indiqué que Lola Montemaggi voulait déscolariser sa fille, son amie préfère nuancer : "Elle ne refusait pas que sa fille ait un enseignement scolaire, bien au contraire, mais elle voulait mieux pour sa fille. L'école publique ne lui plaisait pas, c'est pour cela qu'elle a demandé une scolarisation à domicile. Elle était beaucoup dans la recherche du bien-être."

Pourquoi le dispositif alerte enlèvement avait été levé avant que Mia soit retrouvée ?

Le procureur de la République d'Epinal, Nicolas Heitz, joint par France Bleu Sud Lorraine mercredi matin, avait expliqué que cette décision avait été prise car la petite pouvait être en "danger". "Compte tenu du contexte, on peut craindre qu'elle soit en danger. J'estime qu'il y a un risque pour son intégrité physique."