Migrants écrasés par un train à Saint-Jean-de-Luz : des explications sur le drame
[Mis à jour le 14 octobre 2021 à 12h49] Un accident tragique a eu lieu mardi 12 octobre 2021 sur la voie ferrée située entre Saint-Jean-de-Luz et Ciboure. Quatre personnes ont été percutées par le TER866460 aux alentours de 5 heures du matin, à quelque 500m la gare. Le convoi avait quitté la gare d'Hendaye en direction de Bordeaux à l'aube. Peu de temps après, les autorités avaient dressé un bilan faisant état de trois morts et d'une quatrième personne grièvement blessée, dans un état d'urgence absolue.
Jérôme Bourrier, procureur de Bayonne, avait expliqué dans la journée que les victimes étaient "des migrants algériens âgés de 21 à 40 ans". La personne blessée aurait, quant à elle, déclaré aux secours avoir 28 ans. Le mercredi 13 octobre au soir, il a ajouté que le rescapé de l'accident avait éclairci plusieurs points depuis son lit d'hôpital. Le groupe de migrants fauchés cherchait à échapper à d'éventuels contrôles de police, a-t-il expliqué. S'étant arrêtés sur cette portion de rails pour se reposer, les quatre hommes s'étaient endormis et n'ont pas vu le train arriver. Le survivant n'a cependant pas été en mesure de donner les identités des trois victimes : le procureur a expliqué que "le petit groupe s'était constitué un peu plus tôt en Espagne et ils ne se connaissaient pas les uns les autres".
Un hommage aux victimes
Mercredi 13 octobre, un rassemblement d'environ 300 personnes pour rendre hommage aux victimes s'est tenu devant la gare de Saint-Jean-de-Luz, à l'appel d'associations locales d'aide aux migrants. Les participants ont déposé une gerbe de fleurs devant l'entrée de la gare, avant d'entamer une minute de silence. Selon Amaia Fontang, présidente d'Etorkinekin, collectif fédérant 13 groupes d'accompagnement de migrants au Pays basque, interrogée par l'AFP mardi 12 octobre, le drame est survenu après "une journée de pression policière importante dans plusieurs points du Pays basque", qui "pourrait expliquer que ces migrants aient cherché à se réfugier à un endroit pour être tranquilles". "On ne peut pas faire comme la Méditerranée, on ne peut pas devenir le futur cimetière" a estimé Christelle, membre de l'association bayonnaise d'aides aux migrants Diakhité, qui participait au rassemblement en l'hommage des migrants frappés par le train. Selon elle, les migrants arrivés depuis la frontière espagnole cherchant à rentrer en France "sont pourchassés" dans "trente kilomètres de no man's land" avant d'atteindre un centre d'accueil situé à Bayonne. Avec ces trois décès, ce sont au total six migrants qui sont morts sur leur chemin d'exil depuis le mois d'avril.
Qui sont les victimes percutées par le TER ?
Les victimes, allongées sur les voies, sont toutes majeures. Une affirmation pas confirmée par le procureur lors d'une conférence de presse, mardi. "Manifestement, l'ensemble des victimes serait de nationalité algérienne et trois d'entre elles auraient fait l'objet d'une procédure au titre de l'irrégularité de leur séjour sur le territoire espagnol." Le survivant de l'accident, âgé de 28 ans, est toujours grièvement blessé et hospitalisé mais son pronostic vital n'est plus engagé.
Une enquête sur l'accident de train
Selon les informations communiquées par le parquet, les autorités ont rapidement déployé un dispositif complet pour faire la lumière sur cet événement tragique : une enquête en flagrance est en cours ; celle-ci est dirigée par la police judiciaire de Bayonne, avec la collaboration active des agents du commissariat de Saint-Jean-de-Luz. Jérôme Bourrier a évoqué en conférence de presse un lieu "dépourvu d'éclairage et difficile d'accès par la route. Selon les premières constatations, se basant notamment sur le témoignage du chauffeur, ce dernier n'a vu qu'au tout dernier moment les victimes, probablement allongées sur les voies. Il a alors actionné le bouton d'urgence. En vain. Le train, qui roulait à 92 km/h, n'a pu s'arrêter que 310 mètres plus loin. Même si des vérifications techniques sont encore en cours, le procureur a affirmé qu'il était impossible d'éviter l'impact entre le TER et les personnes".
Dans la journée, de nombreuses réactions se sont fait entendre. Effectivement, ce n'est pas la première fois que le pays basque est le terrain de drames où des vies de migrants sont prises. En mai dernier, Yaya Karamoko, un migrant Ivoirien de 28 ans, était retrouvé dans la Bidassoa, fleuve frontière entre la France et l'Espagne. En juin, ce fleuve causait la mort d'une autre jeune migrante. En août, c'était le corps d'Abdoulaye Koulibaly, migrant Guinéen de 18 ans, qui y était retrouvé.
Face à un " bilan humain qui ne cesse de s'alourdir ", EH Bai dit vouloir "en terminer avec la répression persistante qui persécute sans cesse les migrants". La CGT Cheminots, remerciant la réactivité des salariés intervenus sur les lieux du drame de ce mardi matin, a également souligné que "que chaque jour, des femmes, des hommes, parfois des enfants, perdent la vie pour fuir les persécutions, les guerres, la famine, les régimes totalitaires ou les crises", a noté Sud Ouest. Le journal souligne aussi la réaction d'Herri Berri, groupe d'opposition municipal de Saint-Jean-de-Luz : rappelant que le drame devait être "placé dans son contexte", il a exprimé toute "son horreur devant la mort de [ces] trois migrants". "Voici, s'il en était encore besoin, une nouvelle illustration de la situation de détresse extrême dans laquelle se trouvent aujourd'hui tant de populations", a-t-il ajouté.