Bayrou réunit Le Pen et Bardella dans son bureau, un bouleversement politique à la clé ?

Bayrou réunit Le Pen et Bardella dans son bureau, un bouleversement politique à la clé ? François Bayrou a convié Marine Le Pen et Jordan Bardella à Matignon ce mercredi 30 avril avec une idée en tête : trouver une entente pour modifier le mode de scrutin de certaines élections.

Marine Le Pen et Jordan Bardella conviés à Matignon. Le Premier ministre s'est entretenu pendant 45 minutes avec les chefs de file du Rassemblement national (RN) ce mercredi 30 avril pour discuter d'une éventuelle cause commune au MoDem, parti de François Bayrou, et à l'extrême droite. Le chef du gouvernement, menacé par une censure, a tout intérêt à trouver des points d'entente avec le parti lepéniste qui évoque régulièrement la possibilité de déposer et de soutenir une motion de censure pour faire tomber le gouvernement.

C'est donc avec une idée précise en tête que François Bayrou a organisé sa réunion avec les dirigeants du RN : trouver un accord pour défendre l'instauration d'un mode de scrutin proportionnel pour les élections législatives. Le MoDem milite de longue date pour remplacer le scrutin majoritaire à deux tours en place pour les législatives par un scrutin à la proportionnelle intégrale. Un combat que mène également Marine Le Pen depuis quelques années : l'une de ses promesses de campagne présidentielle en 2022 était l'instauration de ce mode de scrutin pour l'élection des députés. Ce mode de scrutin serait avantageux pour le RN qui apparaît déjà comme le groupe le plus nombreux à l'Assemblée.

Les deux forces ont toutefois des idées légèrement différentes puisque le RN demande une élection proportionnelle avec, en plus, une prime majoritaire pour le parti arrivé en tête. Un détail qui ne figure pas dans l'idée que François Bayrou se fait d'un nouveau mode de scrutin aux législatives, mais qui s'impose aux yeux de Marine Le Pen : "La tripolarisation de la vie politique entraîne une absence de majorité", a-t-elle insisté le mardi 29 avril. Et l'élue du Pas-de-Calais "n'imagine pas que le Premier ministre [...] puisse reculer sur ce sujet" de la proportionnelle uniquement pour une histoire de prime majoritaire. Pourtant, à l'issue de la rencontre, c'est bien Marine Le Pen qui a semblé prête à faire des concessions en renonçant à une prime majoritaire. "La proportionnelle intégrale par département" comme en 1986 "nous apparaît être un moindre mal par rapport à un système majoritaire qui aujourd'hui ne permet pas que chaque voix des Français soit entendue", a affirmé la députée après son entretien à Matignon.

Le Premier ministre et le RN ont-ils accordé leurs violons en vue d'une éventuelle réforme législative ? Ils ont encore quelques mois devant eux pour discuter puisque le chef du gouvernement souhaiterait légiférer ce point à l'automne, "avant la fin de la session parlementaire si le débat est mûr" a précisé sa porte-parole à l'issue du Conseil des ministres le 28 avril. Un proche de François Bayrou soutenait une semaine plus tôt que "tout le monde ou presque est d'accord sur le principe [qu']il faut plus de proportionnelle" et qu'il suffisait de s'accorder sur les formalités : "Reste à déterminer la forme : régionale ? Départementale ? Mixte ? Nous aurons ce débat".

Bayrou et Le Pen contre le reste de l'hémicycle ?

Le débat commence donc avec le RN ce mercredi 30 avril, mais va se tenir avec les chefs de file de l'ensemble des forces présentes à l'Assemblée par ordre d'importance numérique dans l'hémicycle. L'extrême droite est logiquement la première à passer et sera suivie des forces macronistes représentées par Gabriel Attal, président du groupe Ensemble pour la République (EPR), et par le député Pierre Cazeneuve. Ceux-là devraient faire de la résistance face à François Bayrou, estimant que le mode de scrutin majoritaire actuellement en place est le plus adapté ou le "moins pire". Les élus macronistes entendent recentrer le débat sur "l'efficacité de l'action publique" en s'attardant sur la réduction du nombre de parlementaires et sur la "simplification du millefeuille administratif", plutôt que sur le mode de scrutin.

Le Premier ministre et le RN risquent de rencontrer d'autres oppositions à la proportionnelle. Chez Horizons, Edouard Philippe est opposé à l'idée, mais pourrait la soutenir "si était rétablie la possibilité de cumuler un mandat exécutif local et le mandat parlementaire", rappelle BFMTV. Or, François Bayrou est aussi favorable au cumul des mandats. A droite, le camp des Républicains refuse catégoriquement de changer le mode de scrutin qui entraînerait une "institutionnalisation du chaos politique qu'on connaît en ce moment" selon Laurent Wauquiez.

A gauche, les insoumis, les écologistes et les communistes se disent favorables à l'instauration de la proportionnelle aux législatives. Les socialistes sont, eux, divisés sur la question : l'actuel patron du parti Olivier Faure y est opposé, quand d'autres fortes têtes comme François Hollande défendent l'idée. Des dissensions avec lesquelles le Premier ministre va devoir composer.

Dernières mises à jour

17:38 - Le Pen prête à faire des concessions face à la proposition de Bayrou

Si Marine Le Pen et François Bayrou partagent la volonté d'instaurer un mode de scrutin proportionnel pour les élections législatives, ils ont tout de même des projets différentes. La première souhaite agrémenter la proportionnelle d'une prime majoritaire pour le parti arrivée en tête, tandis que le second milite depuis des années pour une proportionnelle intégrale comme celle de 1986. Cette divergence pourrait toutefois être surmontée puisque Marine Le Pen a semblé être prête à renoncer à une prime majoritaire si le scrutin majoritaire était remplacé par un vote proportionnel comme elle l'a indiqué après sa réunion à Matignon : "La proportionnelle intégrale par département nous apparaît être un moindre mal par rapport à un système majoritaire qui aujourd'hui ne permet pas que chaque voix des Français soit entendue", a-t-elle affirmé.