Mobilisation des hôpitaux : les soignants manifestent contre le manque de moyens
[Mis à jour le 7 juin 2022 à 14h38] "Cet été on risque de compter les morts". Les professionnels de santé sont nombreux à répéter cet avertissement qui fait froid dans le dos et déjà martelé par les syndicats de soignants. Epuisés après deux ans de pandémie qui ont affaibli l'hôpital et montré toutes les failles du secteur hospitalier, en sous-effectif et en manque de reconnaissance, les soignants se mobilisent ce mardi 7 juin 2022 pour attirer l'attention sur l'hôpital "désespérément maltraité". Voilà plusieurs mois que le secteur médical tire sur la corde mais le fil est sur le point de casser. "On s'attend à un mois de juillet particulièrement difficile et un mois d'août horrible" dans les hôpitaux a indiqué l'urgentiste et syndicaliste de la CGT-Santé, Christophe Prudhomme sur RFI le 6 juin. Dans un communiqué commun, neuf syndicats et collectifs inter-hôpitaux et inter-urgences font remarquer avec regret et colère que "l'accès aux soins de premiers recours est de plus en plus compliqué et l'hôpital n'assure plus son rôle de service public d'accueil en dernier recours". Ces dernières semaines, 120 services d'urgences ont été contraints de fermer faute de moyens et surtout de personnels soignants selon le décompte réalisé fin mai par l'association Samu-Urgences. Si la tendance se confirme d'autres pourraient s'ajouter à cette liste déjà longue.
De nombreux enseignants ont répondu à l'appel à la mobilisation lancé par neuf syndicats dont la CGT, le SUD, la CFE-CGC. Dans au moins cinquante villes françaises comme Marseille, Grenoble, Toulouse, Nantes et d'autres localités, les professionnels de santé se rendent devant les hôpitaux pour manifester leur ras-le-bol et exiger des réponses de l'Etat. C'est à Paris que la plus importante mobilisation doit avoir lieu. Depuis 13h30, les professionnels de santé, les syndicats et d'autres professionnels du monde médical ou social s'agglutinent devant le ministère de la Santé, pancartes en main pour faire entendre leurs revendications.
Des dizaines de mobilisations de soignants, que demandent-ils ?
Les professionnels de santé alertent sur la situation de l'hôpital public depuis des années et la situation s'est encore tendue depuis la crise sanitaire du Covid-19. Plusieurs de leurs revendications sont les mêmes depuis trois ans : les soignants demandent une revalorisation de leur travail et de leur salaire mais aussi et surtout l'embauche de nouveaux personnels. Face à la pénurie de personnels, les services hospitaliers, les urgences notamment, sont obligés de revoir leur organisation et parfois de fermer faute de moyens. "Taux d'encadrement largement insuffisant, mauvaise couverture des besoins, plannings de travail éreintants, cumul d'heures, fuites de personnels, fermetures de lits" sont autant de conséquences du manque de professionnels de santé pointées par les syndicats de soignants dans leur tract.
Le gouvernement assure avoir déjà apporter des réponses aux soignants avec le Ségur de la Santé et plus récemment avec l'ouverture d'une "mission flash" d'un mois qui doit permettre "dès cet été [d']apporter des réponses très fortes pour consolider nos urgences dans cette période". Le président du syndicat Samu-Urgences de France (SUdF), François Braun, a été chargé de mener la mission et doit remettre un rapport le "1er juillet au plus tard à la ministre du Travail" pour détailler les manques "territoire par territoire" et "illustrer les premières pistes" d'amélioration selon les explications du chef de l'Etat. Un processus et des réponses jugés trop tardifs par les professionnels de santé.
"Mission flash", qu'est ce que c'est ?
Les cris d'alertes des professionnels prenant de l'ampleur - certains soignants ont interpellé le chef de l'Etat lors de ses sorties pendant et après la campagne présidentielle - le gouvernement a essayé d'apaiser la colère. Emmanuel Macron a annoncé le 31 mai le lancement d'une "mission flash" censée "passer en revue, territoire par territoire, les manques qu'il y a en termes de médecins généralistes et professionnels de santé spécialisés. [...] Nous allons aussi regarder hôpital par hôpital les difficultés constatées : fatigue des soignants, congés maladie à répétition, incapacité à recruter [...] pour avoir une cartographie complète au début de l'été". Le président de la République a ensuite promis de mobiliser les moyens nécessaires pour répondre aux besoins du secteur hospitalier et des professionnels de santé. Cette "mission flash" n'est pas à la hauteur des exigences des soignants, elle est même "une insulte pour nous" a déclaré Pierre Schwob-Tellier, membre du collectif Inter-Urgences, lors d'une conférence de presse jeudi 2 juin.
Quels services hospitaliers sont concernés ?
C'est tout l'hôpital public qui est sous tension à cause du manque de personnels. Les services d'urgences restent toutefois les plus touchés et sont obligés de jouer des coudes et de revoir leur organisation pour assurer un service minimum et accueillir les patients. Le système D et la bonne volonté des professionnels de santé ne sont pas toujours suffisants et plusieurs centaines de services ont dû fermer leur porte ou réduire les horaires d'ouverture. Les services de gynécologie et de maternité sont aussi concernés. Le jour de l'annonce du lancement de la mission flash, le principal syndicat des gynécologues a indiqué que lé pénurie de soignants avait "atteint un niveau critique" et point de créer des "fermetures estivales inopinées" des maternités. Depuis la mobilisation parisienne ce mardi 7 juin devant le ministère de la Santé, les représentants de la CGT vocifère : "C'est la crise partout, pas seulement aux urgences. C'est la crise en psychiatrie, dans les maternités", rapporte Franceinfo.