Loi Duplomb, pesticides... Pourquoi les agriculteurs sont de retour sur les routes
Les agriculteurs en colère. Ce lundi 26 mai 2025, ils vont manifester devant l'Assemblée nationale où doit débuter l'examen de la proposition de loi visant à "lever les contraintes" pour leur profession et favoriser l'accès à certains pesticides. Quelques opérations escargot et péages filtrants ont déjà été aperçus en région parisienne, sans le moindre débordement, dans le cadre de cette nouvelle vague de manifestations. La proposition de loi dite "Duplomb" - portée par le sénateur LR Laurent Duplomb - doit être débattue dans la chambre basse du Parlement ce jour. Adopté en première lecture au Sénat, le texte reprend plusieurs revendications du monde agricole.
"Ce texte est très important pour les agriculteurs parce qu'il propose de lever des freins à la production d'alimentation", assurait la semaine dernière la ministre de l'Agriculture Annie Genevard. Une position que ne partagent pas les députés Ecologistes et Insoumis, à l'origine de la majorité des près de 3 500 amendements qui ont été déposés jeudi dernier à l'Assemblée nationale. La proposition de loi contient notamment des sujets comme l'autorisation des pesticides, les réglementations environnementales sur le stockage de l'eau, ou encore l'agrandissement des élevages.
Le retour d'un pesticide interdit depuis 2018 ?
La notion la plus débattue, elle, pourrait concerner la possibilité de déroger durant trois ans à l'interdiction d'utiliser l'acétamipride, sous certaines conditions. Il s'agit d'un pesticide néonicotinoïde, nocif pour les pollinisteurs et interdit depuis 2018 en France. Les filières de la betterave et de la noisette réclament par exemple son retour, sans solutions face aux insectes ravageurs. Les apiculteurs, eux, redoutent un "tueur d'abeilles", sur France Info.
En raison des nombreux amendements déposés à l'Assemblée nationale par les députés positionnés à gauche de l'échiquier politique, les agriculteurs dénoncent un "détricotage" de cette proposition de loi. Problème, le retour des néonicotinoïdes apparaît comme une vraie ligne rouge pour certains parlementaires, pas forcément hostile à la proposition de loi de manière générale. "S'il n'y avait pas l'affaire de l'acétamipride, notre groupe aurait voté le texte à l'unanimité", a lancé l'ex-ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, désormais député MoDem du Loir-et-Cher.
Un "mépris profond" des agriculteurs
La FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA) dénoncent eux dans la presse une tentative "d'obstruction" du texte par LFI et les Ecologistes, et entendent bien exprimer leur "refus". "Malheureusement, il est aujourd'hui quasiment certain que la discussion de ce texte n'arrivera jamais à son terme". Les deux syndicats dénoncent une "atteinte au débat démocratique" et un "mépris profond" des agriculteurs, dans les colonnes de Midi Libre. Le texte est même considéré comme "vital" par la FNSEA. "Il est, pour nous, essentiel de revenir sur les amendements qui ont été validés en commission du développement durable", a déclaré Arnaud Rousseau, président du premier syndicat agricole français auprès du quotidien régional.
La loi dite "Duplomb" envisage également des changements sur les normes en matière de construction de bâtiments d'élevage en assouplissant la procédure d'autorisation environnementale. La taille des élevages a été revue à la hausse en commission pour certains élevages aux normes le plus strictes, cela concerne l'article 3. L'article 5 pourrait lui permettre de "faciliter les projets de stockage de l'eau présentant un intérêt général majeur". De plus, l'article suivant - le numéro 6 - vise à "apaiser les relations entre l'Office français de la biodiversité (OFB) et les agriculteurs". Autrement dit, inciter l'institution à éviter les procédures judiciaires vis-à-vis des agriculteurs, au profit de procédures administratives en cas de manquement aux lois environnementales en vigueur.
Attention, cette proposition de loi ne fait pas non plus l'unanimité dans le monde agricole. La Confédération paysanne rappelait en fin de semaine dernière son opposition à un texte "complètement rétrograde", qui ne profiterait "qu'à une petite partie de l'agro-business". "Cette loi, c'est se tirer une balle dans le pied", regrette Fanny Métrat, porte-parole de la Confédération paysanne dans Le Monde. Elle dénonce le "mythe de l'unité paysanne, censée parler d'une seule voix".