Ecriture inclusive : qu'est-ce qu'a banni Edouard Philippe exactement ?

Ecriture inclusive : qu'est-ce qu'a banni Edouard Philippe exactement ? ECRITURE INCLUSIVE - Une langue "sans stéréotype de genre", tendant vers l'égalité des représentations entre les hommes et les femmes. Voilà comment est présentée l'écriture inclusive par ceux qui la défendent.

[Mis à jour le 21 novembre 2017 à 16h50] Edouard Philippe va faire distribuer une circulaire dans le Journal officiel, ce mercredi, interdisant l'usage de l'écriture inclusive. Dans ce texte, diffusé sur le site du Figaro, le Premier ministre indique que "les administrations relevant de l'Etat doivent se conformer aux règles grammaticales et syntaxiques". Tout en encourageant la féminisation totale des fonctions, il précise que "le masculin est une forme neutre qu'il convient d'utiliser pour les termes susceptibles de s'appliquer aussi bien aux femmes qu'aux hommes". Cette écriture inclusive est issue d'une volonté d'abolir la fameuse règle du masculin l'emportant sur le féminin, apprise par les élèves dès le plus jeune âge à l'école. Elle repose sur le renoncement du masculin générique et de la primauté du masculin sur le féminin dans les accords de genre. Cela suppose trois nouvelles conventions, selon le "Manuel d'écriture inclusive" :

Accorder en genre les noms en fonctions, grades, métiers et titres

Exemples : "présidente", "sénatrice", "directrice", "professeure", "chroniqueuse", "entrepreneure", "footballeuse", "programmeuse", ingénieure", "consommatrice", "agricultrice"...

User du féminin et du masculin par le point milieu

La règle est la suivante : pour écrire correctement de manière inclusive, il faut écrire la racine du mot + le suffixe masculin + le point milieu + le suffixe féminin. A cela s'ajoute un point milieu supplémentaire suivi d'un "s", si l'on veut indiquer le pluriel. Exemples dans une phrase où l'on parle de groupes de femmes et d'hommes : "des acteur.rice.s", des "ingénieur.e.s", "ceux.elles", "les candidat·e·s à la Présidence de la République".

Ne plus employer les antonomases du nom commun "Femme" et "Homme" (majuscules de déférence)

Est clairement ciblée la graphie "Homme" dans des expressions désignant les hommes et les femmes. Ainsi, les tenants de l'écriture inclusive préfèrent l'expression "droits Humains" à "droits de l'Homme". Mais l'écriture inclusive est aussi et avant tout une revendication politique - et non pas stylistique ou esthétique - pensée et défendue comme un instrument de déconstruction des mécanismes de domination masculine.

Les tenants de l'écriture inclusive considèrent que la primauté du masculin est inéquitablement retranscrit dans ce qui nous est de plus intime, dans ce qui nous permet de formuler et d'articuler notre vision du monde : la langue. "Le discours condense ainsi les transformations en cours au sein d'une société : il les reflète certes, mais les configure également. En ce sens, il témoigne et participe à la construction et la perpétuation d'inégalités et de stéréotypes de sexe", expliquent Raphaël Haddad et Carline Baric, dans leur "Manuel d'écriture inclusive". Nous parlons donc d'une forme de militantisme, à vocation égalitaire, contre les conventions intériorisées qui se manifestent dans l'écrit. 

L'écriture inclusive, une "complexité qui n'est pas nécessaire", pour le ministre de l'Education nationale 

Interrogé sur BFMTV sur la pertinence de l'insertion dans les apprentissages scolaires de l'écriture inclusive, Jean-Michel Blanquer avait fait part de ses grandes réserves : "On doit revenir aux fondamentaux, sur le vocabulaire et la grammaire, arriver à ce que les enfants aient une vision claire de la construction d'une phrase. Je trouve que cela ajoute une complexité qui n'est pas nécessaire", a-t-il fait savoir, évoquant des "confusions sur le langage qui abîme la cause". "La cause, celle de l'égalité hommes-femmes, elle est bonne", nuance-t-il, mais "ce n'est pas le juste combat".