Fleur Pellerin : de quoi est vraiment soupçonnée l'ancienne ministre ?

Fleur Pellerin : de quoi est vraiment soupçonnée l'ancienne ministre ? L'ancienne ministre de la Culture a-t-elle profité illégalement de sa place au gouvernement pour développer son entreprise privée ? De quoi est-elle soupçonnée ?

[Mis à jour le 19 décembre 2018 à 13h05] Après avoir été ministre, de nombreux politiques choisissent de se reconvertir dans le privé. Il arrive que ces reconversions puissent faire l'objet d'un manquement à la déontologie et d'un rappel à l'ordre de la Haute autorité pour la Transparence de la vie publique, ou bien même faire l'objet de manquement à la législation. Après avoir été ministre du Numérique, du Commerce extérieur, puis de la Culture, Fleur Pellerin s'est reconvertie a pris la tête d'une société, Korelya Consulting. ET afin d'assurer le développement de sa société, Fleur Pellerin a fait appel à Naver Corp, entreprise sud-coréenne, avec qui qui elle a eu affaire lorsqu'elle était ministre. Naver Corp est aujourd'hui devenu le principal partenaire en affaires de Korelya Consulting. Les liens qu'elle a tissés avec l'entreprise sud-coréenne sont aujourd'hui dans le viseur de la HATVP. L'autorité a par ailleurs saisi la parquet national financier (PNF) selon les informations du Monde. C'est maintenant aux juges de décider ou non d'ouvrir une enquête judiciaire.

Les deux soupçons qui pèsent sur Fleur Pellerin

La HATVP indique dans son rapport que lorsqu'elle était ministre, Fleur Pellerin avait signé une "lettre d'intention" avec Naver Corp pour l'hébergement de contenus vidéo, pour le gouvernement. "Sur la base de cette lettre, une convention de partenariat sur le service vidéo" a été effectivement établie le 17 mars 2016 entre l'institut français de Corée du sud et l'entreprise Naver Corp, alors que Fleur Pellerin n'était plus ministre.

La HATVP soupçonne notamment à Fleur Pellerin de "prise illégale d'intérêts". Selon l'article 432-12 du Code Pénal, il y a "prise illégale d'intérêts" lorsqu'"une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public prend, reçoit ou conserve, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération". La prise d'intérêts illégale est effective à partir du moment où "elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement". Quelques mois après avoir quitté son poste de ministre, la société de Fleur Pellerin, Korelya Consulting a levé plusieurs dizaines de millions d'euros auprès de Naver Corp. Sa société gère un fonds "intégralement doté par la société Naver Corp", indique la HATVP.

De plus, la HATVP reproche à Fleur Pellerin de ne pas avoir tenu compte de son avis de comptabilité assorti de réserves. L'autorité avait émis ces réserves au sujet de sa reconversion dans le privé dès le mois de juillet 2016. Elle avait alors alerté la ministre de la Culture des risques qu'elle prenait "en prenant pour client une entreprise privée avec laquelle elle avait conclu un contrat ou formulé un avis sur un contrat ". En mai 2018, Fleur Pellerin avait indiqué que la lettre d'intention qu'elle avait signée lorsqu'elle était ministre "ne présentait en aucune façon le caractère d'un contrat", ajoutant que "ce document ne présentait aucun caractère contraignant pour les signataires". Pour l'ancienne ministre, les discussions entre l'Etat et Naver Corp "se seraient poursuivies quand bien même aucune lettre d'intention n'aurait été signée".