Variant anglais du Covid : nouvelles études sur la souche britannique
VOC-202012/01. Deux études publiées le 12 avril dans la revue scientifique The Lancet démontrent que le variant britannique n'est, finalement, pas "plus dangereux" que la souche originelle du Covid-19, mais toutefois plus "contagieux".
[Mis à jour le 13 avril à 17h29] Le variant anglais ne serait finalement pas plus mortel intrinsèquement que la souche historique du Covid-19. Tel est le constat de deux études publiées ce 12 avril dans les revues The Lancet Infectious Disease et The Lancet Public Health. La première s'appuie sur les données de 341 malades londoniens du coronavirus, infectés entre le 9 novembre et le 20 décembre, et répartis en deux groupes : une grosse moitié (58%) ayant contractée le variant britannique et le reste (42%) contaminé par une autre souche. L'étude révèle que dans le premier groupe 36% ont développé des formes graves de la maladie contre 38% dans l'autre moitié. Les conclusions sont sans appel et démontrent que le virus anglais n'entraîne pas davantage de formes sévères, ni de symptômes prolongés de "Covid long". Cependant, les recherches confirment le caractère plus contagieux de la souche britannique. Les chercheurs y expliquent qu'avec un taux de reproduction de 1,35, un malade infecté au variant britannique contamine en moyenne 35% de personnes en plus par rapport aux autres souches.
Ces nouvelles informations contredisent les études publiées le 10 mars dans le British Medical Journal (BMJ). Les chercheurs des universités Exeter et Bristol indiquaient sur le variant anglais augmentait de 64% le risque de mortalité à 28 jours. Le lendemain, l'université d'Oxford publiait le site MedRxiv, une autre étude qui estimait à 60% l'augmentation du risque de mortalité. L'hypothèse avancée par l'Inserm, le 11 janvier partage les conclusions des deux dernière études. Elle explique dans son verdict du début d'année : "les données cliniques recueillies jusqu'ici confirmeraient que ce variant possède une capacité accrue de transmission (de 50 à 70% supérieure aux SARS-Cov-2 'classiques') sans modification significative de sa virulence".
Variant dit "anglais", puis variant sud-africain, variant brésilien et, plus récemment, variants californien, bavarois, new-yorkais... De nombreuses mutations ont fait apparaitre, depuis la fin de l'année dernière, des nouvelles souches du coronavirus à travers le monde. Toutes ou presque ont un point commun : une propagation visiblement très rapide dans les régions touchées avec parfois des conséquences sanitaires désastreuses. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a plusieurs fois appelé les gouvernements à étendre le séquençage du génome, tout en accélérant les campagnes de vaccination pour prendre de vitesse ces nouvelles souches. Le 5 février, Hans Kluge, le directeur de l'Organisation Mondiale de la Santé pour l'Europe, a notamment alerté dans un entretien à l'Agence France Presse : "Nous devons nous préparer" à d'autres mutations du virus selon lui.
Mais comment ont émergé ces nouveaux variants du Covid ? A quoi correspondent ces mutations ? Ces nouvelles souches circulent-elles en France et avec quelle intensité ? Voici les principales questions qui se posent sur ces variants et les réponses qu'on peut y apporter à ce stade.
Que sait-on sur le variant anglais du coronavirus ?
La stupeur a saisi le monde entier le samedi 19 décembre 2020, quand les autorités britanniques ont décidé de reconfiner Londres et le Sud-est du pays en urgence, avec déplacements interdits. En cause : la propagation d'une variante du Covid en Angleterre qui a d'emblée préoccupé les organismes scientifiques et sanitaires du pays. Les virologues britanniques ont rapidement estimé que cette mutation du virus, baptisée VOC-202012/01 (précédemment VUI-202012/01) ou plus simplement B.1.1.7, est apparue mi-septembre à Londres ou dans le Kent. Les premières estimations indiquaient que la mutation aurait été à l'origine de 62% des contaminations survenues à Londres en décembre et de 43% dans le sud-est, bien plus qu'à la mi-novembre. On parle désormais de 90% des cas positifs analysés outre-Manche et le Royaume-Uni a depuis été confronté à de grosses difficultés dans ses hôpitaux, qui ont enregistré des pics de 1500 à 1800 décès quotidiennement. A tel point qu'un reconfinement strict du pays a finalement été décidé.
Cette mutation du virus est qualifiée "d'anglaise" car elle a été identifiée sur le sol britannique, mais elle a pu avoir lieu dans un autre pays. L'émergence de cette nouvelle souche n'est d'ailleurs pas encore expliquée avec précision. Selon les premières hypothèses, le variant VOC-202012/01 aurait pu naître chez un ou plusieurs patients immunodéprimés, autrement dit dont les défenses immunitaires sont insuffisantes. Chez certains de ces malades, le système immunitaire est assisté par une transfusion d'anticorps extraits chez des patients guéris. Dans le cas où le coronavirus provoquerait une infection longue, ce traitement peut provoquer des résistances et donc des variations du virus, notamment au niveau de son ARN. En novembre et décembre 2020, les revues scientifiques New England Journal of Medicine et Cell ont rapporté l'existence de deux patients, l'un atteint d'un syndrome des anticorps antiphospholipides et l'autre d'un cancer, infectés par le SARS-CoV-2 pendant une longue durée et traités par transfusion sanguine d'anticorps.
Le 10 mars, une étude britannique des universités d'Exeter et Oxford décrivait la souche britannique comme plus contagieuse et surtout plus léthale de 64% par rapport aux autres variants. Un mois plus tard, deux autres études publiées dans The Lancet Public Heath et The Lancet Infectious Diseases, ce 12 avril, réfutent la dangerosité du variant expliquant qu'il n'entraîne pas davantage de formes graves ou de Covid long. En revanche, elles confirment sa contagiosité élevée et estiment qu'un patient présentant le virus anglais contamine 35% de personnes en plus qu'avec une autre souche.
Que sait-on du variant sud-africain du coronavirus ?
Une autre variante très proche de la nouvelle souche anglaise, mais vraisemblablement sans rapport, a été observée à peu près au même moment en Afrique du Sud. Cette variante, baptisée quant à elle 501.V2, n'a d'abord été décrite que comme "une variante similaire" à la souche B.1.1.7 par le ministre de la Santé sud-africain Zwelini Mkhize, dans un communiqué cité par Le Point. Néanmoins, dès le mercredi 23 décembre, le Royaume-Uni a tiré la sonnette d'alarme. "Ce nouveau variant est hautement préoccupant, parce qu'il est plus contagieux et semble avoir muté davantage que le nouveau variant qui a été identifié au Royaume-Uni", a ainsi annoncé le ministre de la Santé Matt Hancock. Des restrictions de voyages ont donc été "immédiatement" prises outre-Manche.
Sur France Info le 13 janvier, Jean-François Delfraissy a indiqué que le variant sud-africain pourrait avoir suivi le même type de mutation que le variant britannique. "Il n'y a pas d'explication pour l'instant. L'une des hypothèses avancées est que l'Afrique du Sud est l'un des pays les plus touchés par le VIH, donc avec davantage de patients immunodéprimés", a-t-il déclaré. Une hypothèse corroborée par les propos de Houriiyah Tegally à l'AFP le 12 janvier. Celle-ci est bio-informaticienne, membre de l'équipe de pointe qui a identifié le variant en Afrique-du-Sud : "La théorie la plus probable est qu'il soit venu de patients immunodéprimés, dont le système immunitaire a plus de mal à supprimer les infections".
Que sait-on du variant brésilien du coronavirus ?
Alors que ces deux variants du coronavirus préoccupaient déjà les autorités sanitaires, une nouvelle souche du Covid a été rapportée au Japon le 11 janvier. C'est l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) qui a fait cette annonce, lors d'une conférence de presse, suivie par des déclarations des autorités de santé japonaises. On parle aussi d'un variant "brésilien" ou "Manaus", puisqu'il a été détecté en premier lieu chez quatre voyageurs venus de l'Etat de l'Amazonas, au Brésil, selon le ministère de la Santé japonais. Nous y avons consacré un article complet :
Ce nouveau variant présenterait "des similitudes avec ceux identifiés au Royaume-Uni et en Afrique du Sud" en fin d'année 2020, selon l'Institut national japonais des maladies infectieuses, repris par l'AFP. Mais plus de détails ont été apportés par une étude publiée dans le magazine Virological.org et co-signée par des chercheurs britanniques et brésiliens le 12 janvier. Le variant "Manaus", du nom de la capitale de l'Amazonas, d'où il serait parti, présenterait "des taux d'attaque très élevés" avec 42% des tests positifs RT-PCR recueillis entre le 15 et le 23 décembre, soit une augmentation "soudaine" et "récente" écrivaient alors les scientifiques, se traduisant par une "augmentation rapide du nombre de cas et d'hospitalisations".
Cette "nouvelle lignée, nommée P.1 (descendant de B.1.1.28)", contient "une constellation" ou "un cocktail" de mutations "dont plusieurs mutations d'importance biologique", indiquait encore l'étude, qui mentionnait "une signature génétique unique". Les scientifiques citaient notamment "17 changements uniques d'acides aminés, 3 délétions et 4 mutations synonymes, ainsi qu'une insertion 4nt par rapport à la séquence non P.1". Traduction : cette nouvelle souche a muté de manière très nette par rapport aux anciennes souches du Covid. Certaines de ces mutations sont similaires aux souches identifiées au Royaume-Uni et en Afrique du Sud (mutations N501Y, K417N/T, E484K), mais elles "semblent être apparues de manière totalement indépendante". "Il est donc essentiel d'examiner rapidement s'il existe un taux accru de réinfection chez les personnes précédemment exposées", écrivaient les scientifiques laissant planer le doute sur les vaccins.
Que sait-on sur le variant californien du coronavirus ?
Un quatrième variant du Covid a été rapporté en Californie mi-janvier. Faisant l'objet d'un premier article alarmiste du New York Time, ce nouveau mutant, baptisé L452R, serait passé en quelques semaines de 3,8% des cas en décembre à 25% en janvier selon les échantillons séquencés. Ce variant, particulièrement actif dans le comté de Santa Clara, a aussi été rapproché de la flambée des cas qui a frappé Los Angeles après les fêtes et a fortiori au début de l'année. Le variant L425R "pourrait être hautement transmissible", indiquaient donc des experts dans le quotidien américain. "Il est trop tôt pour savoir si cette variante se répandra plus rapidement que les autres, mais elle renforce certainement la nécessité pour tous les Californiens de porter des masques et de réduire le mélange avec des personnes extérieures à leur foyer immédiat pour aider à ralentir la propagation du virus. Nous demandons également à toute personne ayant été exposée au virus de s'isoler des autres pour se protéger et protéger ses proches", a déclaré le Dr Erica Pan, épidémiologiste d'Etat au sein du département de la santé publique de Californie (CDPH), dans un communiqué publié dès le 18 janvier.
Si les informations sur ce nouveau variant sont encore parcellaire, ce dernier s'avère "différent de la variante B.1.1.7 détectée pour la première fois au Royaume-Uni", indique le même document du CDPH. Le variant L452R ne serait pourtant pas récent. Il aurait été détecté au Danemark dès le mois de mars 2020 et son premier cas en Californie apparu dès le mois de mai dernier. "Cette variante porte trois mutations, dont la L452R", touchant la protéine Spike, "que le virus utilise pour s'attacher aux cellules et y pénétrer, et qui est la cible des vaccins qui sont actuellement disponibles aux États-Unis", a déclaré le Dr Chiu, virologue et professeur de médecine de laboratoire à l'Université de Californie San Francisco.
Une poignée d'études s'est depuis penchée sur ce nouveau variant californien. L'une d'elle, publiée dans la revue scientifique américaine JAMA le 11 février, juge que "l'effet fonctionnel de cette souche sur l'infectiosité et la gravité de la maladie reste incertain".
Que sait-on sur le variant bavarois du coronavirus ?
Le 18 janvier 2021, un nouveau variant a été rapporté dans le Land de Bavière, en Allemagne, où il aurait infecté au moins 35 personnes sur les 73 nouveaux cas enregistrés dans un hôpital de Garmisch-Partenkirchen. Des échantillons ont été envoyés à l'hôpital universitaire de la Charité à Berlin pour analyse. Mais selon des responsables locaux, cette variante du Covid serait bel et bien différente des variantes récemment découvertes au Royaume-Uni et en Afrique du Sud.
Le directeur adjoint de l'hôpital de Garmisch-Partenkirchen, Clemens Stockklausner, a déclaré lors d'un point presse le 18 janvier qu'on ne savait pas encore si la mutation rendait le virus plus contagieux, comme ses "cousins" anglais ou sud-africain. "Pour l'instant, nous avons découvert une petite mutation ponctuelle... et il n'est absolument pas certains qu'elle aura des conséquences cliniques", a-t-il ajouté, appelant à "attendre le séquençage complet". Variant californien comme variant bavarois ont depuis assez peu fait parler d'eux.
Que sait-on sur le variant écossais du coronavirus ?
Une étude menée par des chercheurs de l'Université d'Edimbourg, en Ecosse, et publiée le 17 février, a rapporté l'existence d'un nouveau variant : un variant B.1.525, qu'on nommera "écossais" à ce stade bien qu'il ait déjà été détecté dans 13 pays selon les auteurs du document. Selon cette étude, ce nouveau variant présenterait des similitudes avec les autres variants, notamment la mutation E484K, mais aussi d'autres mutations (Q677H ou F888L).
Les premiers cas du variant B.1.525 ont été identifiés à la mi-décembre au Royaume-Uni et au Nigeria, où respectivement 39 cas et 29 cas sont mentionnés. Depuis, il aurait aussi été rapporté au Danemark (35 cas), aux Etats-Unis (10 cas) et même en France selon l'étude, avec 5 cas.
Que sait-on du variant new-yorkais du coronavirus ?
Une autre variant significatif a été rapporté fin février à New York, aux Etats-Unis. Baptisé B.1.526., cette souche a fait l'objet de deux premières publications assez alarmistes, rédigées pour l'une par des chercheurs de Caltech sur une base purement statistique et pour l'autre par des chercheurs de l'Université de Columbia. Au moins deux mutations caractériseraient le variant new-yorkais la mutation E484K, observée notamment en Afrique du Sud et au Brésil et une autre identifiée cette fois comme la mutation S477N. Celle-ci serait elle aussi capable de modifier la façon dont le virus s'attache aux cellules humaines, autrement dit susceptible de le rendre plus contagieux. Pour preuve, le mutant aurait été détecté "à Westchester, dans le Bronx et le Queens, le sud de Manhattan et à Brooklyn" ce qui exclurait la simple par un cluster a indiqué au New York Times le Dr David Ho, de l'Université de Columbia.
Dans la première quinzaine de février, un bébé a été diagnostiqué positif au coronavirus à Washington, avec des symptômes lourds et une charge virale 51 418 fois plus élevée que la moyenne a indiqué le Washington Post. Le séquençage a fait apparaître une mutation jusqu'ici inconnue qui a été documentée dans la presse scientifique.
Que sait-on du variant indien du coronavirus ?
Un variant indien du coronavirus (ou variant B.1.617) a été détecté au mois d'avril 2021 et a provoqué une flambée de l'épidémie en Inde, se traduisant par une situation sanitaire dramatique, avec plus de 3000 décès quotidiens. Déjà détecté dans plusieurs pays européens, le variant indien est l'une des préoccupation majeures des autorités sanitaires mondiales. Nous y avons consacré un article complet :
Existe-t-il un variant "français" du coronavirus ?
La question d'un variant "français" du coronavirus a plusieurs fois été posée depuis le début de l'année 2021, d'abord dans les médias puis dans des publications officielles. "Attendez-vous très prochainement à découvrir qu'on a un mutant français, ça nous pend au nez, on en a tous la certitude", a notamment mis en garde l'urgentiste Patrick Pelloux sur la chaîne C8 fin janvier. Depuis, plusieurs hypothèses ont été émises concernant un ou plusieurs variants, à commencer par un variant détecté dans deux Ehpad de Dordogne et mentionné par le directeur général de l'ARS Aquitaine sur BFMTV mi février. Un variant "marseillais", a aussi été mentionné par l'IHU de Marseille dès le mois de septembre 2020 dans une étude en pré-publication. Le Pr. Didier Raoult s'est fait l'écho de ce document le 28 janvier sur son compte Twitter.
En Guadeloupe, une alerte a été lancée par l'Agence régionale de Santé le 27 février autour d'un nouveau variant, sans qu'une suite significative ne soit donnée. Enfin à la mi mars, un cluster comptant 71 cas de Covid-19 a été détecté à l'hôpital de Lannion, avec un nouveau variant qualifié de "variant breton". L'Agence régionale de santé Bretagne (ARS) a assuré qu'il n'était pas associé à "une plus forte transmissibilité ou sévérité". Il n'est donc pas considéré à ce stade comme "variant d'intérêt" ("variant of concern" ou VOC) au sens de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), mais comme "variant à l'étude" ("variant under investigation" ou VUI). Néanmoins, un urgent de la DGS avec une annexe présentant la stratégie de diagnostic, ainsi qu'un communiqué du ministère de la Santé laissent entendre que ce variant pourrait être plus difficile à détecter du fait de test RT-PCR négatif, malgré une infection par le SARS-CoV-2 avérée
Les nouvelles souches du coronavirus sont-elles plus contagieuse ?
Le principal motif d'inquiétude au sujet de la variante B.1.1.7 ("anglaise") du coronavirus, mais aussi des variantes 501.V2 ("sud-africaine"), P.1 (brésilienne), ou B.1.617 (indienne), est que celles-ci seraient plus contagieuses encore que la souche dominante à ce jour en Europe et dans le monde. Un premier rapport du Nervtag, le groupe chargé de conseiller le gouvernement britannique sur les virus respiratoires, laissait entendre dès la mi-décembre 2020 que la variante dite "anglaise" présentait "un avantage sélectif par rapport aux autres variantes" du virus et a connu une "croissance exponentielle pendant une période lors de laquelle des mesures nationales de verrouillage étaient en place". Surtout, les mutations du coronavirus "portent principalement sur la protéine des Spikes (spicules)", indiquait le rapport, autrement dit les pointes qui se trouvent à sa surface du coronavirus et lui permettent de s'attacher aux cellules pour les pénétrer, jouant donc un rôle clé dans l'infection virale. Une étude publiée dans la revue scientifique The Lancet Public Health indique que le taux de reproduction du virus anglais s'élève à 1,35, c'est-à-dire qu'un malade infecté par la souche britannique contamine 35% de personnes en plus en moyenne par rapport à un malade atteint par une autre souche.
• La mutation N501Y
Une autre étude menée par plusieurs chercheurs britanniques et publiée sur le forum scientifique Virological.org, a elle aussi laissé entendre très rapidement que le variant anglais du Covid serait plus contagieux. Il est question notamment d'une des mutations communes à au moins trois nouvelles souches, au Royaume-Uni, en Afrique du Sud et au Brésil : la mutation N501Y, liée justement aux Spikes du coronavirus. L'une des conclusions des chercheurs est que le coronavirus aurait subi "un nombre étonnamment élevé de modifications génétiques, notamment dans le domaine de la liaison aux récepteurs du virus dans le corps humain". Beaucoup d'autres études ont depuis été menées sur cette mutation N501Y commune à plusieurs variants.
Ce sont ces premiers éléments qui ont fait dire à Boris Johnson mi-décembre que le variant B.1.1.7 pouvait se transmettre "jusqu'à 70% plus facilement", tandis que le ministre de la Santé, Matt Hancock, a évoqué avant les fêtes une variante "hors de contrôle". Chris Whitty, directeur général de la santé d'Angleterre, a lui aussi fait part de son inquiétude, dans un communiqué publié le 19 décembre. Il a confirmé que "le groupe consultatif sur les menaces nouvelles et émergentes des virus respiratoires (Nervtag) considérait maintenant que cette nouvelle souche pouvait se propager plus rapidement que les autres variantes du virus". "Il semble que ce virus [soit] largement plus infectieux que la souche précédente", a abondé le Pr John Edmunds, de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, le 21 décembre, sur Science Media Centre.
Un rapport publié le 31 décembre par les chercheurs de l'Imperial College de Londres, qui ont analysé des milliers de génomes de virus du Sars-CoV-2 séquencés entre octobre et décembre, est venu confirmer que le variant anglais avait un "avantage important" en termes de contagiosité : 50 à 75% plus contagieux, ou un taux de reproduction du virus (R) entre 0,4 et 0,7 supérieur au virus habituel. Une étude britannique publiée le 4 janvier a elle aussi confirmé que cette forme mutante du virus serait plus rapide dans sa transmission. Une souche "50% à 74%" plus contagieuse résumait l'un des auteurs, Nick Davies, biologiste à la London School of Hygiene and Tropical Medicine (LSHTM).
Les variants sud-africain et brésilien ont fait l'objet d'analyses similaires, notamment une étude sur le variant "Manaus" et publiée le 12 janvier dans Virological.org, qui suggère elle aussi une propagation accrue. Concernant le variant sud-africain, un panel d'experts locaux, cité par l'AFP le 19 janvier, est arrivé à des conclusions assez proches : le 510Y.V2 n'est pas plus mortel mais il serait 1,5 fois plus contagieux ont-ils conclu par le biais d'une série de données. Ce mutant serait donc "50% plus transmissible", mais "rien n'indique que le nouveau variant est plus sévère", a déclaré le professeur Salim Abdool Karim, épidémiologiste et coprésident du comité scientifique au ministère sud-africain de la santé.
En plus de la mutation N501Y, la mutation E484K (mutation sur le 484e acide aminé de la protéine Spike), propre aux variants sud-africain et brésilien, serait "la plus inquiétante de toutes", a indiqué à l'AFP Ravi Gupta, professeur de microbiologie à l'Université de Cambridge. Celle-ci perturberait en effet la détection du virus par les anticorps, ce qui, à terme, pourrait provoquer des réinfections de patients ayant déjà affronté le Covid, ou rendre les vaccins moins efficaces. Mais pas seulement : une étude mise en ligne en prépublication sur le site BioRxiv le 6 janvier et menée par Ravi Gupta lui-même, montrait que la mutation N501Y permettait au coronavirus de se lier aux cellules humaines 2,5 fois plus facilement. Mais en y ajoutant la mutation E484K, le virus a été considéré comme 13 fois plus apte à s'accrocher à nos cellules.
Une communication des autorités sanitaires britanniques a récemment indiqué que la mutation E484K, présente sur les variants B.1.135 détecté en Afrique du Sud et P.1 détecté au Brésil, avait également été identifiée sur quelques cas anglais infectés par le variant B.1.1.7, autrement dit le variant dit "anglais". C'est une étude remontant à la mi-janvier et actualisée par Public Health England, l'agence de santé britannique, qui a abouti à ces conclusions : la mutation considérée comme la plus dangereuse du Covid a ainsi été détectée dans 11 séquences du virus sur 214 159 analysées le 26 janvier.
Des doutes pour la plupart dissipés
Mi-décembre, des experts américains avaient commenté les premières études sur la nouvelle souche du coronavirus avec un œil plus mesuré, estimant qu'il n'y avait aucune preuve d'une contagiosité plus élevée. "Il n'y a pas de preuve tangible que ce virus soit effectivement plus contagieux", mais "il y a des preuves claires qu'il est plus répandu dans la population", avait fait savoir Moncef Slaoui, le conseiller principal du programme gouvernemental de vaccination, à l'occasion d'une conférence de presse à laquelle avait assisté l'AFP avant les fêtes.
"Les éléments de preuve sont encore insuffisants pour permettre de se faire une opinion ferme sur la question de savoir si le virus a réellement augmenté la transmission", a aussi déclaré le professeur Jonathan Ball, virologue à l'université de Nottingham, dans des propos repris par la BBC le même jour. Plus optimiste elle aussi au départ, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait rejeté avant Noël l'idée d'un variant "hors de contrôle", en indiquant que les taux d'incidence du virus avaient pu être élevés lors de la première vague sans pour autant que la situation n'échappe au contrôle des autorités sanitaires. Elle a depuis revu ce jugement.
Interrogé sur le sujet en France, Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, a d'abord prôné la prudence, sans s'alarmer. "La crainte, c'est une véritable mutation de la protéine Spike, c'est-à-dire celle qui permet au virus de s'accrocher. Or, celle décrite par les Anglais porte sur cette protéine, et des données suggèrent que le virus serait plus infectieux. Cela demande à être confirmé. Je ne suis pas inquiet car nous avons déjà levé ce type d'alerte : rappelez-vous les récentes craintes sur les visons" disait-il au Parisien mi-décembre. Un jugement largement nuancé depuis, notamment dans une interview à France Info le 13 janvier, où il a fait part de son inquiétude sur la propagation du variant britannique dans l'Hexagone.
Le 18 février, lors de la conférence hebdomadaire du gouvernement sur la situation sanitaire, le ministre de la Santé Olivier Véran s'est étonné que les "fort taux de variants" constatés en France "ne s'accompagnent pas toujours - en tout cas pas au début - d'une augmentation du nombre de contaminations". "L'honnêteté m'oblige à vous dire que pour l'heure, nous ne savons pas l'expliquer", a-t-il ajouté, disant partager "ces constatations précoces avec nombre de [s]es homologues, ministres de la Santé européens".
Les symptômes des variants du Covid sont-ils plus graves ?
Les variants du coronavirus affichent-t-ils des symptômes différents de la souche "commune" ? Selon une étude de l'Office for National Statistics (ONS), datée du 27 janvier, les symptômes liés à la souche B.1.1.7 pourraient être légèrement différents de ceux du Covid dominant en Europe jusqu'alors. L'Insee britannique a indiqué que la perte de goût et d'odorat semblait moins fréquente avec ce variant, alors que la toux, le mal de gorge et la fatigue semblaient statistiquement plus présents. Mais une autre étude britannique, publiée cette fois par le King's College, le University College de Londres et la Harvard Medical School et basée sur les données de 36 920 utilisateurs de l'application Covid Symptom Study, a contredit ces conclusions. "Nous n'avons trouvé aucune différence dans les symptômes et pas d'aggravation globale dans la sévérité de la maladie", ont assuré les chercheurs le 28 janvier.
Les informations sur la plus forte létalité des variants du Covid soufflent elles aussi le chaud et le froid depuis leur découverte. En fin d'année 2020, rien ne semblait indiquer que le variant anglais impliquait un risque de décès plus élevé. Le ministre de la Santé britannique, premier à donner l'alerte, avait indiqué dès le 20 décembre 2020 que les travaux menés sur le variant anglais n'avaient pas pointé de symptômes plus graves. "Rien n'indique qu'il est plus mortel ou qu'il cause une forme plus sévère de la maladie", avait également précisé le Premier ministre britannique Boris Johnson avant les fêtes. De son côté, le Nervtag, conseil consultatif britannique, avait estimé que les données disponibles étaient insuffisantes pour tirer une quelconque conclusion sur la gravité de la nouvelle souche, estimant que "4 décès sur environ 1 000 cas" avaient été identifiés, mais que d'autres travaux étaient "nécessaires pour comparer ce taux de mortalité avec des ensembles de données comparables".
D'après une étude publiée fin novembre dans la revue de référence Nature, des chercheurs rappelaient que "les mutations récurrentes actuellement en circulation semblent être neutres sur le plan de l'évolution et principalement induites par le système immunitaire humain, via l'édition de l'ARN". Pour la souche trouvée dans le sud de l'Angleterre, les conclusions étaient les mêmes : "la variante est porteuse du N501Y, a priori sans mutation inquiétante", expliquait François Balloux, directeur de l'Institut de génétique de l'University College London, le 20 décembre à l'AFP.
En France, le virologue Bruno Lina, membre du Conseil scientifique, a estimé lui-aussi dès le 22 décembre sur RTL que "ce clone infectieux n'[était] pas plus pathogène" et "ne donn[ait] pas des infections plus grave" que les autres variantes. Le Conseil scientifique français publiait dans la foulée, le 29 décembre, un avis sur le "clone anglais 'VUI-UK'". "Les données actuelles fournies par les autorités britanniques rapportent une augmentation du risque de transmission [...], mais aucune différence n'est notée à ce jour en termes de pathogénicité (manifestations cliniques, durée de la maladie) ou d'échappement à la réponse immunitaire des personnes déjà infectées", écrivaient alors les experts en charge de conseiller le gouvernement français sur le coronavirus. "Ces données épidémiologiques doivent inciter à la prudence, mais demandent à être confirmées à moyen terme", indiquaient encore les scientifiques. L'Inserm a pour sa part résumé l'état des connaissances sur le variant anglais dans un communiqué le 11 janvier, avec le même verdict : "les données cliniques recueillies jusqu'ici confirmeraient que ce variant possède une capacité accrue de transmission (de 50 à 70% supérieure aux SARS-Cov-2 'classiques') sans modification significative de sa virulence", abondaient alors les chercheurs. Mais ce postulat général a petit à petit été remis en cause.
Un variant potentiellement plus létal selon les Britanniques
Les connaissances sur la létalité du variant anglais ont évolué au mois de janvier, notamment après un rapport du comité scientifique chargé de conseiller le gouvernement britannique, le Nervtag (ou "groupe consultatif sur les menaces de virus respiratoires nouveaux et émergents"), qui avait déjà été le premier à alerter sur ce variant en décembre. Les grandes lignes de ce rapport ont d'abord fuité le 22 janvier, par le biais d'un journaliste de la chaîne de télévision ITV, Robert Peston. Ce dernier a indiqué sur son compte Twitter que la souche B.1.1.7 "pourrait être un peu plus mortelle que la souche existante". Un risque de décès qui serait 1,3 fois plus élevé que la souche dominante en Europe jusqu'ici. Selon Robert Peston, Neil Ferguson, professeur à l'Imperial College de Londres et membre du Nervtag, jugerait "réaliste que la nouvelle variante britannique augmente le risque de décès" bien que celle-ci soit encore entourée d'une "grande incertitude".
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a confirmé dès le 22 janvier que le variant VOC 202012/01 pouvait être "lié à un degré plus élevé de mortalité". Le rapport du Nervtag a finalement été mis en ligne. On peut y lire que l'hypothèse d'un variant plus létal est basée sur plusieurs travaux de recherche (non encore publiés). "Sur la base de ces analyses, il existe une possibilité réaliste que l'infection par les variants B.1.1.7 soit associée à un risque accru de décès par rapport à l'infection par les non-variant", est-il écrit. Ces conclusions sont néanmoins à prendre avec des pincettes puisque pour l'instant, aucun risque accru d'hospitalisation n'a été directement observé. Par ailleurs, l'échantillon étudié ne concernait que 8% des décès pendant la période.
Le 2 mars, une étude publiée au Danemark par les chercheurs Peter Bager et Jan Wohlfahrt, de l'Université de Copenhague, donne des éléments préoccupants. Leur résultat porte sur 18 000 personnes atteintes du Covid. "Les présentes analyses suggèrent que les individus infectés par la lignée B.1.1.7 ont un risque accru d'hospitalisation d'environ 64% par rapport aux personnes infectées par d'autres lignées du SRAS-CoV-2", écrivent-ils, concluant que "cette constatation peut avoir un sérieux impact d'un point de vue de la santé publique". Ella a précédé une autre étude datée du 8 mars sur la mortalité liée au variant B.1.1.7, oubliée au Royaume-Uni à partir des dossiers médicaux des patients atteints de cette forme du Covid. "Nous avons découvert que la variante préoccupante (COV) avait 1,67 fois plus de chances d'entraîner la mort, en tenant compte des comorbidités, de l'âge, de la semaine, de la région et d'autres données sociodémographiques", a indiqué le Dr Rosalind M Eggo, une des signataires de l'étude disponible en pre-print sur le site MedRxiv.
Un variant 64% plus mortel ?
L'étude la plus significative, menée auprès de 54 906 patients positifs au virus B.1.1.7. et autant de patients infectés avec le virus souche entre le 1er octobre 2020 et le 29 janvier 2021, a été publiée le mercredi 10 mars dans le British Medical Journal (BMJ). 28 jours après le test positif, le premier groupe comptait 227 décès contre 141 morts dans l'autre, avec pourtant une composition similaire en terme d'âges, de sexes et de caractéristiques sociales. Pour 1000 cas détectés, le VOC 202012/01 provoquerait donc 4,1 morts, contre 2,5 pour le coronavirus classique, selon les auteurs de ces travaux, issus des universités d'Exeter et de Bristol, soit un taux de mortalité en moyenne de 64% plus important. "Il y a une haute probabilité que le risque de mortalité soit augmenté par une infection" par ce variant écrivent aussi les chercheurs.
Une autre étude anglaise peut être mentionnée : menée par l'université d'Oxford et publiée en preprint cette fois sur MedRxiv le 11 mars, elle a étudié 198 420 patients positifs d'un côté et 3432 patients atteints de forme grave de l'autre. Dans les deux cas, le variant anglais, qui avait frappé 80 494 patients dans le premier groupe et 2019 dans le deuxième, est apparu comme un facteur aggravant. Dans le premier groupe, 712 personnes ont fini par tomber gravement malades et 630 sont décédées avant 28 jours. Dans le second, ce sont 822 patients qui ont succombé à cette forme de Covid-19. Les chercheurs ont ainsi établi "un risque d'admission en soins intensifs pour les personnes présentant le COV B.1.1.7 qui est le double du risque associé à la variante originale" ainsi qu'un "risque accru de 60 % de mortalité à 28 jours".
Toutefois, deux études publiées dans la prestigieuse revue The Lancet, le 12 avril, contredisent l'idée selon laquelle le virus britannique est plus léthal. La première, parue dans The Lancet Infectious Diseases s'appuie sur les données de 341 patients londoniens infectés entre le 9 novembre et le 20 décembre. Parmi les malades 58% présentaient le variant anglais et 42% une autre souche. Dans le premier groupe 36% ont développé une forme grave de la maladie contre 38% chez les patients atteint de divers variants. La seconde étude précise que le virus britannique n'est pas responsable d'une augmentation des symptômes prolongés de "Covid long". Les chercheurs confirment néanmoins l'idée de la contagiosité plus importante du variant, ils précisent qu'un patient peut contaminer en moyenne 35% de personnes en plus lorsqu'il est infecté par la souche anglo-saxonne. L'épidémiologiste Nicholas Davies, explique que cette étude, fondée sur des résultats cliniques de fin d'année 2020, "ne dément pas les éléments déjà rassemblés par de précédentes études ", en particulier celles qui avancent que "l'infection par le B.1.1.7 est globalement associée à un risque plus élevé de mortalité, d'hospitalisation et d'admission aux urgences parmi l'ensemble des individus testés positifs au Sars-CoV-2", selon Ouest-France.
En France Olivier Véran juge le variant plus dangereux
En France aussi, l'hypothèse d'un variant anglais plus létal s'est petit à petit installée. Le 8 février sur BFMTV, l'épidémiologiste et membre du Conseil scientifique Arnaud Fontanet s'est inquiété de la propagation des variants du Covid-19, jugeant notamment que la souche d'origine britannique "serait 30% plus létale". Depuis, le ministre français de la Santé a plusieurs fois indiqué que le variant anglais du coronavirus était "plus dangereux". "Les variants sont plus contagieux et aussi plus dangereux que le Covid-19" a-t-il par exemple avancé lors d'une conférence de presse ce jeudi 11 mars. "Depuis janvier et la circulation des variants, la proportion de formes graves a augmenté sensiblement dans plusieurs régions notamment en Île-de-France, Paca et Hauts-de-France. Nous n'avons pas d'explications scientifiques arrêtées à cela, mais plusieurs études internationales confirment notre observation, à savoir que les variants seraient d'avantage responsables de formes graves que le Covid-19 classique".
Un variant plus contagieux est en tout cas très problématique, même s'il n'était pas plus létal. Plusieurs épidémiologistes, dont le très reconnu Adam Kucharski, au Royaume-Uni, ont estimé qu'un virus plus contagieux pouvait in fine se révéler plus dangereux qu'un virus plus létal. Fin décembre, Adam Kucharski a notamment fait la démonstration mathématique sur son compte Twitter qu'une souche de coronavirus 50% plus transmissible générait plus de décès qu'une souche 50% plus létale. Une analyse reprise par la suite dans de nombreux titres de presse, en Angleterre comme en France. Pour Guillaume Rozier, fondateur de Covid Tracker et interviewé par les Dernières Nouvelles d'Alsace notamment, "c'est pire d'avoir un virus qui se transmet plus vite, qu'un virus plus mortel. Il vaut mieux un virus 50 % plus mortel, qu'un virus 50 % plus transmissible. Cela peut sembler contre-intuitif mais, à moyen terme, un virus plus transmissible causera plus de morts qu'un virus plus mortel", a-t-il expliqué.
Le variant anglais provoque-t-il une infection plus longue ?
Des chercheurs de l'université d'Harvard, ont publié le 10 février une étude, pas encore validée, sur le site de la prestigieuse université. Basée sur un échantillon très restreint (65 tests positifs réalisés dans le cadre des compétitions de NBA aux Etats-Unis, dont 7 atteints du variant B.1.1.7), cette étude semble indiquer que la durée moyenne de l'infection était de 13,3 jours pour le variant britannique, contre 8,2 jours pour la souche dominante en Europe. La durée moyenne de "clairance virale", autrement dit le temps nécessaire pour que le patient élimine le virus, passerait quant à elle de 6,2 jours à 8 pour le variant anglais, pour une charge virale similaire. "Cette durée prolongée peut contribuer à l'augmentation de la transmissibilité du Sars-CoV-2", écrivent par ailleurs les auteurs de l'étude. Si peu d'informations concordantes ont encore été produites par le monde scientifique, le ministre de la Santé français Olivier Véran a annoncé le 18 février que la durée d'isolement de tous les patients testés positifs en France devait passer de sept à dix jours.
Les enfants sont-ils plus touchés par la mutation anglaise ?
Une information selon laquelle les enfants seraient davantage touchés par la mutation anglaise du Covid-19 s'est répandue comme une traînée de poudre dès les premiers jours de janvier. Une interview a notamment frappé les esprits le 1er janvier : celui de Laura Duffel, infirmière en chef de l'hôpital King's College de Londres. Celle-ci a alerté sur la BBC sur la situation sanitaire alarmante de l'établissement, où une "aile entière" aurait été "occupée par des enfants". L'incidence de la variante du Covid chez les enfants a aussi été analysée par une étude en prépublication de l'Imperial College, dirigée par l'épidémiologiste Neil Ferguson. Celle-ci a conclu, le 31 décembre dernier, que les moins de 19 ans étaient "significativement plus nombreux" à être infectés par la version mutante du virus que par la souche d'origine.
Mais ces conclusions ont très vite été nuancées voire démenties par d'autres scientifiques et par les données des autorités sanitaires. Au lendemain du témoignage de Laura Duffel sur la propagation du coronavirus chez les enfants, le Collège royal de pédiatrie et de santé infantile (RCPCH) a publié un communiqué pour contester le tableau dépeint par l'infirmière et pour assurer qu'il n'y avait "pas de pression significative du Covid-19 en pédiatrie au Royaume-Uni". La Public Health England, agence de santé britannique, a pour sa part indiqué dans un rapport que les admissions à l'hôpital n'avaient pas augmenté en fin d'année, alors même que la nouvelle souche du Covid poussait les autorités à reconfiner le sud du pays (depuis le mercredi 6 janvier, c'est l'ensemble du Royaume-Uni qui est de nouveau confiné).
En France, scientifiques et gouvernement restent prudents
En France, un communiqué publié par plusieurs experts en pédiatrie a réaffirmé que les données britanniques sur les hospitalisations ne reflétaient pas d'augmentation significative pour les plus jeunes. Selon Robert Cohen, président du Conseil national de la pédiatrie, qui s'est exprimé le 3 janvier dans Le Parisien, puis le 4 janvier sur France Inter et enfin sur BFMTV, le variant britannique "est plus contagieux que les autres variants, en revanche il n'est pas plus contagieux chez les enfants que chez les adultes". "Mais avec cette mutation, comme il est plus contagieux, les jeunes vont contaminer davantage de personnes, que ce soit leur entourage familial, ou à l'école. Il faut donc que l'on se donne plus de moyens pour le détecter, notamment à l'école", a-t-il ajouté, appelant à "multiplier le nombre de tests" et à "envoyer les prélèvements pour un séquençage, pour voir si ce variant anglais, qu'on n'a jamais encore isolé chez un enfant en France, apparaît".
Même son de cloche du côté de la la Société française de pédiatrie. Dans un article de 20 Minutes daté du 5 janvier, sa présidente Christèle Gras-Le Guen estimait que "la proportion d'enfants positifs par rapport aux adultes" restait "minoritaire" et sans "formes plus graves". Selon elle, la situation en pédiatrie était même rassurante en début d'année : "alors que d'habitude, on croule sous les grippes et les bronchiolites, cette année, nos services pédiatriques sont vides… ", indiquait-elle. Ce qui ne l'empêchait pas de nuancer : "il faut qu'on reste vigilant, qu'on continue à tester les enfants. Et s'ils sont positifs, qu'on séquence la souche pour voir si c'est ce variant".
Le jeudi 7 janvier sur BFMTV, le ministre de la Santé Olivier Véran s'est aussi montré prudent : "Statistiquement, c'est extrêmement rare que les enfants se contaminent à l'école. Pour le variant anglais, j'ai besoin d'études scientifiques plus étayées. Aujourd'hui, il ne circule pas chez les enfants, donc il n'y a pas lieu d'avoir peur". Une semaine plus tard, le 14 janvier, en conférence de presse, il estimait néanmoins que le "VOC 2020", détecté en Angleterre, était "potentiellement plus contagieux et potentiellement plus contagieux chez les enfants". Dans son point épidémiologique hebdomadaire en date du 18 février enfin, Santé publique France indiquait que "la plus forte proportion de suspicions de variant 20I/501Y.V1 (UK) était observée chez les 0-9 ans (44,6%) puis chez les 30-39 ans (40,8%). Cette proportion diminuait ensuite avec l'âge pour atteindre 20,3% chez les 90 ans et plus". Dans un autre point en date du 4 mars, la proportion de suspicions de variant 20I/501Y.V1 (UK) passait à 64,9% chez les 0-9 ans et 61,9% chez les 10-19 ans et "diminuait en fonction de l'âge pour atteindre 41,2% chez les 90 ans et plus".
Lors d'un point presse une semaine plus tôt, Bruno Coignard, directeur du service des maladies infectieuses de Santé publique France, estimait pourtant qu'il n'y avait pas de "tropisme particulier de ce variant vers les populations les plus jeunes". Il attribuait la proportion d'enfants touchés à des contacts plus directs avec le virus que les autres classes d'âge : "Les personnes âgées ont très certainement une propension à se protéger plus forte, avec moins d'opportunités de contact".
Les masques sont-ils moins efficaces contre les variants du Covid ?
Face aux variants du coronavirus qui ont commencé à circuler le France, un nouveau débat s'est installé mi-janvier : celui de l'efficacité de certains masques face à ces nouvelles souches. C'est le Haut conseil de la santé publique (HCSP) qui a mis cette question sur le tapis en mettant indirectement en cause certains masques en tissu pas assez filtrants. "A l'occasion de la pénétration en Europe de certains nouveaux variants (...), se pose la question de la catégorie des masques que l'on peut proposer dans la population générale", a ainsi déclaré sur BFMTV Didier Lepelletier, un responsable du HCSP lundi 18 janvier au soir. Il vaut mieux "porter un masque en tissu réutilisable de catégorie 1 plutôt que des masques de catégorie 2 qui filtrent un petit peu moins bien, voire des masques fabriqués de manière artisanale", a-t-il ajouté après la fuite dans la presse d'éléments d'un avis du HCSP dont l'AFP s'est fait l'écho.
Le ministre de la Santé Olivier Véran a néanmoins tenté de faire le point avec une parole officielle le mardi 19 janvier, sur France Inter. "La quasi-totalité des masques industriels en tissu reste valable contre le Covid-19, au contraire des masques artisanaux qui ne filtrent pas suffisamment", a-t-il indiqué. "Tous les masques dont le pouvoir filtrant est supérieur à 90%" restent valables a-t-il martelé. Il s'agit bien des masques grand public de niveau 1, à l'inverse des masques artisanaux fabriqués à la maison selon des normes Afnor, publiées au printemps dernier. Ces derniers, introduits fin mars comme une alternative grand public aux masques médicaux (chirurgicaux ou FFP2 qui manquaient alors cruellement), n'offriraient "pas nécessairement toutes les garanties nécessaires pour le Haut conseil de la santé publique". Depuis le 8 février, les masques faits maison ont été explicitement interdits dans les écoles. Les enfants doivent se présenter en classe avec des masques de niveau 1.
L'impact du variant du Covid sur l'adoption des masques rappelle qu'après avoir longtemps répété, sur fond de pénurie, que les masques étaient inutiles pour la population générale, le gouvernement avait fait volte-face fin mars. Une note officielle, datée du 29 mars 2020, avait alors été publiée pour établir des catégories de masques industriels en tissu : les masques de catégorie 1 (ou UNS1, pour "usage non sanitaire 1"), filtrant 90% des particules et les masques de catégorie 2 (UNS2), filtrant 70% des particules, selon des normes élaborées par l'Afnor. Les fabricants sont depuis tenus de mentionner ces informations sur les emballages, mais avec l'émergence du variant du Covid, c'est un nouveau doute qui s'installe désormais. Certains masques industriels vendus dans le commerce et pas toujours clairement étiquetés seraient de catégorie 2, comme l'a récemment indiqué l'AFP.