Fin de vie : voici comment accéder à l'aide à mourir, selon le texte voté par les députés

Fin de vie : voici comment accéder à l'aide à mourir, selon le texte voté par les députés Les députés ont voté favorablement deux propositions de loi sur la fin de vie ce mardi 27 mai : une sur l'aide à mourir et l'autre sur les soins palliatifs. Quels sont les changements prévus dans le système de santé ?

Un pas de plus vers une loi pour la fin de vie ? Après deux semaines de débats à l'Assemblée nationale, les députés ont voté deux textes ce mardi 27 mai, peu avant 18h30 : le premier sur le développement des soins palliatifs et le second sur l'accès au droit à mourir. Si le premier texte défendu par la députée Annie Vidal (Renaissance) a été adopté à l'unanimité, le sort du second, porté par l'élu Olivier Falorni (MoDem), était plus incertain. Il a finalement été approuvé par 305 députés. 199 parlementaires ont en revanche voté contre et 57 se sont abstenus. Ces deux textes adoptés, la proposition de loi sur la fin de vie va désormais être examinée au Sénat à une date encore indéterminée, probablement cet automne.

Depuis le début du deuxième quinquennat d'Emmanuel Macron, plusieurs avis favorables ont été rendus concernant la mise en place d'une aide à mourir en France : celui du Comité consultatif national d'éthique en 2022 et celui de la Convention citoyenne sur la fin de vie en 2024. Les deux organismes ont appelé à créer une "aide active à mourir" accessible sous conditions. Ce sont ces conditions qui ont été débattues à l'Assemblée nationale jusqu'à obtenir un processus détaillé soumis au vote des élus.

A ce jour, la loi Claeys-Leonetti de 2016 est ce qui se rapproche le plus d'une aide à mourir. Elle autorise l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation du patient, ainsi que le recours à la sédation profonde et continue jusqu'au décès quand le pronostic vital est engagé à court terme. La loi sur la fin de vie ne doit pas remplacer, mais compléter ce dispositif déjà appliqué en permettant le "suicide assisté" et l'"euthanasie" d'une personne conformément à sa volonté.

Cinq conditions pour avoir accès à l'aide à mourir

La proposition de loi sur la fin de vie limite l'accès à l'aide à mourir aux patients qui présentent des profils et des critères de santé bien définis. Le patient doit :

  • être majeur ;
  • être Français ou résider en France de façon régulière ;
  • être atteints d'affections graves et incurables en phase avancée ou terminale ;
  • éprouver des souffrances insupportables et réfractaires aux traitements ;
  • être capable d'exprimer sa volonté librement et de manière éclairée.

Le critère concernant la gravité et l'incurabilité de la maladie a été jugée trop flou et a été reprécisé par la Haute Autorité de la santé comme "l'entrée dans un processus irréversible marqué par l'aggravation de l'état de santé qui affecte la qualité de vie". Le caractère irréversible a d'ailleurs été ajouté au texte par un amendement du gouvernement. Toutes ces conditions sont cumulatives et devront être remplies "en totalité pour accéder à l'aide à mourir", a affirmé rapporteur du texte Olivier Falorni. 

L'actuelle mouture de la proposition de loi exclut tout de même plusieurs patients du dispositif d'aide à mourir : les mineurs, et ce, même s'ils se trouvent dans des situations comparables à des adultes qui auraient alors accès à l'aide à mourir. Les personnes dans le coma ou atteintes de démence, de maladies psychiatriques ou neurodégénératives comme Alzheimer sont aussi tenues à l'écart du dispositif, quand bien même elles auraient donné des directives anticipées.

Suicide assisté ou euthanasie... Qui administrera le produit ?

Le patient qui bénéficiera de l'aide à mourir devra s'injecter lui-même le produit létal, en présence et sous la supervision d'un personnel de santé, selon le texte soumis au vote des députés. Seuls les malades se trouvant dans l'incapacité physique de procéder à l'injection pourront compter sur l'intervention d'un tiers faisant partie du corps médical. La proposition de loi initiale prévoyait de laisser le choix au patient, mais la mesure a été retoquée par les députés. Un médecin devra toujours être présent lors du processus d'aide à mourir "pour pouvoir intervenir en cas de difficulté".

L'administration du produit létal par un personnel de santé pose la question de la clause de conscience des soignants qui seraient opposés au dispositif d'aide à mourir. Le texte prévoit qu'un médecin approché par un patient pour une demande d'aide à mourir pourra refuser la prise en charge, mais aura l'obligation de communiquer "sans délai" le nom de professionnels qui pourront accepter d'examiner le dossier d'aide à mourir.

Des délais de réflexion et un droit de rétraction pour le patient

La proposition de loi sur l'aide à mourir inclut également plusieurs délais de réflexion pour le patient comme pour les médecins. Lorsqu'un patient formulera une demande d'aide à mourir, il devra systématiquement se voir proposer un accompagnement par un psychologue, un autre praticien ou des soins palliatifs. La requête sera en parallèle évaluée lors d'un examen collégial, réalisé par au moins deux médecins, dans un délai de 15 jours après lequel le médecin devra donner une réponse. Plusieurs personnes pourront prendre part à l'examen collégial : un médecin spécialiste de la pathologie du patient, un autre médecin, un infirmier, un aide-soignant, le psychologue ou l'aide à domicile du patient, même les proches du malade, les tuteurs ou les personnes de confiance.

En cas de feu vert du médecin, le patient devra respecter un délai de réflexion de deux jours avant de confirmer son désir de mettre fin à ses jours. Alors le médecin pourra prescrire le produit létal et convenir avec le patient du moment de l'administration de la substance. A tout moment, le patient pourra revenir sur sa décision. A noter qu'en cas d'avis favorable du médecin, seule une personne répondant de la responsabilité du patient comme une tueur ou un curateur pourra s'opposer à la décision et uniquement "en cas de doute sur l'aptitude du malade à manifester sa volonté de façon libre et éclairée". Le médecin pourra également revoir son jugement s'il prend connaissance d'éléments "le conduisant à considérer que les conditions (…) n'étaient pas remplies ou cessent de l'être". Il devrait alors en informer le patient qui pourra faire un recours. Si le médecin rend un avis défavorable à la requête du patient, le malade pourra formuler un recours, soit par une nouvelle demande, soit par la saisie de la justice administrative.

Des unités de soins palliatifs renforcées

La proposition de loi sur les soins palliatifs prévoit de son côté le développement de ces unités de soins qui permettent la prise en charge d'un patient dans les derniers moments de sa vie. L'objectif est de garantir l'accès à ces soins aux personnes qui en ont besoin, lequel est obligatoire selon une loi de 1999 mais pas toujours possible compte tenu de moyens. Aujourd'hui, près de la moitié des malades devant recevoir de tels soins décèdent sans y avoir eu accès selon une estimation de la Cour des comptes et une vingtaine de départements ne sont pas en mesure de proposer de tels soins aux patients.

Le texte prévoit la mise en œuvre de la la stratégie décennale des soins d'accompagnement présentée par le gouvernement en avril 2024 et selon laquelle chaque département français devra disposer d'une unité de soins palliatif d'ici à 2034. Ce plan prévoit un investissement d'1 milliards d'euros - à raison de 100 millions par an - en plus du 1,6 milliard déjà consacré aux soins d'accompagnement.

Le texte prévoit également le développement de maisons d'accompagnement et de soins palliatifs à partir de 2026. Ces unités de soins intermédiaires entre le domicile et l'hôpital accueilleront et accompagneront les personnes en fin de vie dont l'état médical est stabilisé. L'objectif est de créer une maison par département d'ici 2034.

Dernières mises à jour

19:24 - Proposition de loi sur l'aide à mourir : qui a voté pour ? Qui a voté contre ?

Sur le site de l'Assemblée nationale, le détail du vote est connu. Il apparaît qu'un seul groupe politique a voté de manière unanime : les ciottistes UDR, avec 16 votes contre. À l'inverse, chez les Insoumis, un seul contre a été recensé, celui de Sophia Chikirou qui assure toutefois avoir voulu s'abstenir et s'être trompée de bouton. Pour le reste, au Rassemblement national, 101 députés se sont prononcés contre, 19 pour et trois abstentions. Trente-quatre députés du groupe Droite républicaine ont voté contre et seulement sept pour. Huit se sont abstenus. Du côté d'Ensemble, on compte 11 contre, 64 pour et 14 abstentions. Ils sont 13 à avoir voté contre chez Horizons et 14 pour, en sus de six abstentions. Neuf députés démocrates ont également voté contre, 20 pour et sept abstentions. Quatre socialistes ont voté contre, 66 pour et deux se sont abstenus. Dans le groupe Écologiste et social, un seul député a voté contre tandis que 33 autres se sont prononcés pour et un s'est abstenu. Un seul député également a voté contre dans le groupe Gauche démocrate et républicaine, 12 pour et trois abstentions. Chez Liot, on enregistre trois contre et 11 pour, ainsi que six abstentions. Enfin, chez les non-inscrits, cinq ont voté contre, quatre pour et un s'est abstenu.

19:03 - Emmanuel Macron se réjouit et salue "une étape importante"

Sur X, le président de la République a salué "une étape importante" avec le vote par l'Assemblée nationale ce mardi soir des deux textes. "Dans le respect des sensibilités, des doutes et espoirs, le chemin de fraternité que je souhaitais s'ouvre peu à peu. Avec dignité et humanité", écrit-il.

18:53 - L'adoption des deux textes saluée par des applaudissements

C'est accompagnée de longs applaudissements que la présidente de l'Assemblée nationale a annoncé l'adoption des deux textes ce mardi soir. Des applaudissements particulièrement nourris dans les rangs du centre et de la gauche.

18:38 - La proposition de loi visant à créer un droit à l'aide à mourir est également adoptée

La seconde proposition de loi, visant à créer un droit à l'aide à mourir, a elle aussi été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale ce mardi soir. 305 parlementaires se sont dit "pour", 199 "contre" et 57 se sont abstenus. Contrairement au premier texte, celui-ci était davantage contesté, en particulier chez les députés de droite et d'extrême droite. 

18:34 - L'Assemblée nationale adopte à l'unanimité la proposition de loi pour le développement des soins palliatifs

Votée par 560 députés, la proposition de loi "visant à garantir l'égal accès de tous à l'accompagnement et aux soins palliatifs" a été approuvée par... 560 bulletins "pour", sans la moindre opposition donc. Porté par la députée Renaissance Annie Vidal, ce texte a pour objectif de mettre fin aux carences actuelles observées en France dans la prise en charge des patients en fin de vie.

17:24 - Le vote sur la loi pour la fin de vie attendu dans quelques minutes

Après deux semaines de débat à l'Assemblée nationale, les députés pourront s'exprimer une dernière fois sur les propositions de loi sur la fin de vie, que ce soit sur les soins palliatifs ou l'aide à mourir. Depuis 16h30, les présidents des différents groupes politiques prennent la parole pour un ultime mot sur le texte avant de passer aux votes solennels successifs sur les deux textes. Les votes sont attendus entre 17h30 et 18h30.

16:22 - Des groupes pour et des groupes contre.. Les tendances de vote sur la loi pour la fin de vie

Il s'agit à la fois d'un sujet délicat qui a fait l'objet de longs débats à l'Assemblée nationale ces deux dernières semaines et d'un sujet très personnel sur lequel chacun à son avis. Au point qu'à l'heure de voter la proposition de loi sur l'aide à mourir, aucun des onze groupes politiques de l'hémicycle n'a donné de consigne de vote à ses élus permettant ainsi à chacun de voter en son âme et conscience. Difficile donc de savoir combien d'élus voteront pour et combien voteront contre, mais des tendances se dégagent selon les familles politiques.

  • A gauche, la majorité des élus semble favorable à l'adoption du texte sur l'aide à mourir. Chez les insoumis on annonce un vote unanime en faveur du texte, mais dans d'autres familles politiques comme les socialiste et les communistes quelques voix pourraient s'opposer au texte.
  • Dans le camp présidentiel qui était plutôt divisé, plusieurs élus semblent convaincus par la version de texte amendé lors des débats et pourraient s'abstenir ou voter pour après s'être opposé à la première mouture de la proposition. De tels mouvements sont attendus chez les macronistes et les députés Horizons et, selon certains macronistes, ils pourraient être suffisants pour faire pencher la balance en faveur du texte. Reste que d'autres élus pourraient rester dans l'opposition, notamment au sein du MoDem. Le Premier ministre et patron du parti a indiqué qu'à la place des députés "il s'abstiendrait" de voter.
  • A droite, la majorité des députés devrait voter contre la proposition de loi sur l'aide à mourir, même si quelques votes sont susceptibles de soutenir le texte.
  • Au Rassemblement national aussi la tendance devrait être une opposition au texte, mais plusieurs élus ont indiqué vouloir voter pour une adoption de la proposition de loi. Ainsi si Marine Le Pen s'opposera au texte, des élus comme Jean-Philippe Tanguy ont annoncé le soutenir.