Fin des prescriptions pour les violences sexuelles sur les mineurs ? Un mesure nécessaire selon la Civiise

Fin des prescriptions pour les violences sexuelles sur les mineurs ? Un mesure nécessaire selon la Civiise Au bout de trois ans d'existence, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants publie son rapport final et plus de 80 recommandations ce vendredi 17.

Chaque année 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles. Le chiffre est posé par la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) dans son rapport publié le vendredi 17 novembre. Ce sont donc 5,4 millions d'adultes qui grandissent en ayant subi ces violences, dont 83% de femmes.

La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), créée par Emmanuel Macron le 23 janvier 2021, recueille depuis trois ans les témoignages de victimes. Dans son rapport, basé sur l'analyse d'études statistiques et une analyse de 30 000 témoignages, elle formule 82 recommandations de politiques publiques pour mieux protéger les mineurs contre les violences sexuelles.

Parmi les principales recommandations remises à la secrétaire d'Etat chargée de l'enfance Charlotte Caubel, certaines concernent la réponse judiciaire aux violences sexuelles sur mineurs. Quand les victimes sont entendues et parviennent à porter plainte, dans seulement 19% des cas, les condamnations émises par la justice sont jugées "dérisoires" par la Ciivise. Un grand nombre de condamnations est classé sans suite. En reprenant les informations du ministère de la justice, le rapport établit que seule 1 plainte sur 6 pour viol ou agression sur mineur aboutit à une condamnation, le taux tombe à 1 sur 10 en cas d'inceste. Le problème vient le plus souvent de la prescription des faits.

L'importance de l'imprescriptibilité

La justice française prévoit des délais de prescription pour les agressions sexuelles et les viols, même lorsqu'ils sont commis sur des mineurs. Ces délais sont de 30 ans à partir de la majorité en cas de viol , de 20 ou 10 ans pour les agressions sexuelles selon que la victime est un mineur de plus ou moins de 15 ans.

La Civiise préconise dans son rapport de "déclarer imprescriptible les viols et agressions sexuelles commis contre les enfants". Comme elle l'explique, les victimes qui s'expriment sur les violences qu'elles ont subi le font tard, et il convient de prendre en compte que les faits se déroulent souvent pendant la jeunesse de la victime. Les 30 à 10 ans prévus par la loi apparaissent donc comme un délai court. Le rapport communique également que la demande concernant l'abolition des délais de prescription est la plus formulée par les témoignages (35%). 

Toujours concernant le traitement judiciaire, la Civiise recommande la création de la qualification d'inceste parmi les violences sexuelles et de considérer comme incestueux les violences sexuelles commises par les cousins ou cousines de la victime. Le rapport préconise également que la gestion de ces dossiers soit confiée à des personnels (policiers, experts) spécialement formés sur les violences sexuelles.

Des conséquences que les victimes gardent à vie

Les conséquences de ces violences sont nombreuses et variées et accompagnent les victimes toute leur vie. Les troubles psychotraumatiques ou les troubles de stress post-traumatique (TSPT) sont les plus courants, dans 89% des cas, selon la Ciivise. Les victimes peuvent aussi développer des troubles alimentaires, des problèmes d'addiction (alcool, drogue ou médicament), des problèmes physiques, ou recourir à l'automutilation (surtout chez les femmes). Les victimes connaissent bien souvent une vie sociale et affective compliquée. Faire confiance aux autres devient une réelle épreuve, notamment car les agresseurs sont dans 97% des cas des hommes majeurs (81%) issu du cercle familial et ou des amis, voisins de la famille. Les carrières professionnelles des victimes ne sont pas non plus épargnées par ces traumatismes vécus dès l'enfance.