Pourquoi baisser les impôts sur l'héritage est une mesure contre les pauvres

Pourquoi baisser les impôts sur l'héritage est une mesure contre les pauvres Seules les successions dépassant les 100 000 euros par héritier sont soumises à l'impôt, ce qui n'a concerné que 15% de la population en 2018.

Huit Français sur dix seraient favorables à une baisse de la taxation des héritages, selon un sondage Odoxa pour le magazine Challenge du 25 avril dernier. Les trois quarts des sondés estiment même que cet impôt est injustifié. Pourtant, cet impôt concerne une minorité de contribuables : les riches. Le baisser reviendrait à diminuer la répartition des richesses.

Revenons aux bases : pour qu'un héritage soit imposable, il doit dépasser les 100 000 euros par bénéficiaire. Or, selon l'Insee, seuls 14,6 % des parents ont transmis des héritages supérieurs à cette somme en 2018, indique Le Monde. On est donc bien loin d'un impôt qui impacte toute la population. Et les répartitions diffèrent largement entre les différentes catégories de personnes. Chez les ouvriers, la part recevant un héritage imposable est "non significative, tant le cas est rare", note L'Observatoire des inégalités en février 2023. "Elle est de 11 % chez les anciens salariés retraités (anciens ouvriers, employés et professions intermédiaires), hors cadres supérieurs", ajoute l'institut.

Une somme conséquente pour l'État

En outre, plus d'un cadre retraité sur cinq a hérité d'une somme supérieure au minimum imposable de 100 000 euros. Chez les professions libérales, le taux est de 27 %, similaire à celui des héritiers agriculteurs, artisans, commerçants et chefs d'entreprise. Toutefois, L'Observatoire note que "près de 80 % des bénéficiaires" d'héritages "appartiennent aux 50 % les plus fortunés en France ; un quart, aux 10 % les plus fortunés". Être imposé sur un héritage touche donc bien les couches les plus aisées de la société. Et ce, alors que près de 40 % du patrimoine transmis échappe à l'impôt, note le Conseil d'analyse économique (CAE).

Baisser l'impôt sur les successions desservirait les plus pauvres. En effet, selon Le Monde, les droits de succession et de donation ont rapporté 18,5 milliards d'euros à l'État en 2022. Une somme conséquente, même si on est loin de l'impôt sur le revenu (près de 110 milliards d'euros brut) ou de la TVA (près de 273 milliards d'euros). Or cet argent est utilisé par l'État pour investir en France, que ce soit dans les infrastructures, la fonction publique (l'État étant le premier employeur de France) ou les aides sociales.

L'héritage est considéré comme un puissant facteur d'inégalités. Selon un rapport du CAE de 2021, il "nourrit une dynamique de renforcement des inégalités patrimoniales dont l'ampleur est beaucoup plus élevée que celles provenant des revenus du travail".