Test de Silent Hill f : la terreur se conjugue au féminin

Test de Silent Hill f : la terreur se conjugue au féminin Relancée en 2022 avec l'annonce de multiples nouveaux projets, la saga Silent Hill écope aujourd'hui d'un nouvel opus original se déroulant au Japon dans les années 60. Une aventure aussi originale que terrifiante.

La saga Silent Hill semble sortir quelque peu la tête de l'eau depuis quelques années. Après de multiples opus mitigés tant au niveau commercial que critique, la licence horrifique a de nouveau réussi à séduire le grand public (et ses propres fans) avec le remake de Silent Hill 2 sorti en 2024.

Outre ce projet, les équipes de Konami avaient également profité de leur conférence en 2022 pour annoncer que plusieurs projets étaient désormais en développement pour relancer la saga. Parmi ces derniers, nous retrouvons Silent Hill f, un nouvel opus original qui fit couler beaucoup d'encre lors de son annonce. Un projet totalement original se situant non pas dans la ville de Silent Hill, mais au japon et doté d'un système de combat dynamique ? Il y avait de quoi être inquiet. Après plusieurs heures de tests, nous pouvons désormais assurer que la licence Silent Hill est entre de bonnes mains.

Le récap de notre test de Silent Hill f
  • Une aventure originale qui mélange parfaitement l'ambiance Silent Hill aux légendes japonaises.
  • De vrais moments de terreur et de malaise. Âmes sensibles s'abstenir.
  • Le système de combat est efficace sans être révolutionnaire.
  • Bonne durée de vie et multiples fins à débloquer.
  • Des énigmes peu inspirées et qui se ressemblent souvent.
  • Les combats de boss sont peu plaisants mais disposent d'excellents visuels.
© Konami

Une histoire totalement originale au pays du soleil levant

Pour la première fois dans l'histoire de la saga, Silent Hill f ne voit pas ses événements se dérouler dans la petite ville de Silent Hill ou même aux Etats-Unis. Nous nous trouvons au Japon dans les années 60. Une période clef pour l'archipel qui se remet petit à petit des affres de la seconde guerre mondiale et décide de s'industrialiser rapidement, quitte à délaisser les campagnes et ses habitants de plus en plus forcés de venir s'installer en ville pour participer à la reconstruction du pays.

Cette période est également toujours très ancrée dans le rêve de la "famille idéale" au Japon, dirigée par un mâle fort qui prend toutes les décisions tandis que les femmes de la famille s'évertuent surtout à entretenir le domicile et se chercher un époux.

C'est dans ce contexte que nous incarnons Hinako, une jeune adolescente prise entre l'abandon de sa soeur suite au mariage de cette dernière et les nombreuses remontrances de son père qui l'estime comme bonne à rien.

Hinako est une jeune femme rattrapée par ses obligations et leurs horreurs. © Konami / Julian Madiot

Silent Hill f dépeint une aventure aussi terrifiante qu'originale. Hinako est, à l'image de nombreux protagonistes de la série, en proie à ses propres démons lorsque l'horreur vient envahir son quotidien. Le jeu vous narre aussi bien les différentes histoires de la petite ville d'Ebisugaoka, mais également les relations entre Hinako, ses amis et sa famille. L'histoire narrée dans Silent Hill f offre plusieurs niveaux de lecture qui amèneront sûrement son lot de théories sur le net, mais nous y retrouvons globalement une quête d'identité personnelle et de la place de la femme au sein de la société japonaise.

Notons enfin la grande influence du scénariste, Ryūkishi07, déjà à l'oeuvre sur la série des Higurashi et Umineko. Ce dernier signe ici un scénario de très belle qualité mettant en avant les difficultés d'une jeune femme dans une société codifiée par l'enfermement de la gente féminine dans des cases et une vie prédestinée au mariage et à l'obéissance envers une figure patriarcale.

Une mise en scène autour du brouillard

En bon jeu de la saga, Silent Hill f ne présente pas son histoire et son contexte de façon directe. La majorité des éléments de l'histoire sont à découvrir petit à petit lors de l'exploration ou des cinématiques. Ces dernières sont étonnamment assez nombreuses pour un jeu Silent Hill et ne manquent pas de tomber dans quelques facilités scénaristiques assez esseulées (Hinako s'évanouissant environ une fois par heure pour marquer une ellipse temporelle).

Silent Hill f est également l'un des opus de la saga avec le plus de personnages à rencontrer. Si vous pensez que cela coupera court au sentiment de solitude que l'on ressent généralement dans un des jeux de la licence, vous vous trompez lourdement. Si Hinako retrouve régulièrement ses amis, ces derniers arborent généralement un comportement très suspect et qui ne manque pas d'interroger. Un constat que l'on retrouvé notamment dans le personnage de '"tête-de-renard" qui ne cesse de nous aider, mais également de nous interroger.

Tête-de-renard est-il un allié ou un bourreau ? © Konami / Julian Madiot

Tout dans Silent Hill f est volontairement flou. A l'image du brouillard qui parcourt les rues d'Ebisugaoka, les desseins des personnages et le fil de l'histoire sont à décortiquer lors des dialogues, mais également auprès des collectibles sous forme de notes ou de carnets qu'Hinako pourra ramasser tout le long de son aventure.

Des passages aussi terrifiants que malaisants

Bien entendu, pléthore de joueurs s'intéresse à la saga des Silent Hill pour son côté horrifique. Que ces derniers soient rassurés : Silent Hill f a ce qu'il faut pour les contenter. Le titre gère à la perfection le côté malaisant de la saga tout en distillant ici et là quelques petits jumpscares bien dosés. Ces derniers s'illustrent particulièrement autour des monstres du jeu qui, s'ils ne sont pas très nombreux, sont très inspirés et évoquent bien les tourments que notre protagoniste doit traverser. Arriverez-vous à identifier à quoi ces monstres font référence ?

L'ensemble des monstres croisés dans Silent Hill f évoque le mal-être d'Hinako. © Konami / Julian Madiot

Hélas, si les monstres et boss s'avèrent assez marquants visuellement, leurs affrontement sont plutôt anecdotiques et ne reposeront que sur un ou deux mécaniques originales.

Outre ces sursauts ponctuels, Silent Hill f parvient à créer de véritables moments de malaise chez le joueur. Qu'il s'agisse de traverser un champ rempli de mannequins désossés (à vous de trouver lesquels sont réels et lesquels sont des monstres) ou de franchir une pièce remplie de sang de victimes, le titre parvient à régulièrement déranger le joueur jusqu'à certains climax chargés en hémoglobine.

Un champ vide. Des mannequins. Certains sont vrais et d'autres... © Konami / Julian Madiot

Un gameplay qui se dynamise quelque peu

Silent Hill f a beaucoup fait parler de lui sur les réseaux suite à l'annonce de son système de combat jugé "trop dynamique" ou "proche de la série des Dark Souls". Cette dernière remarque est aussi stupide qu'infondée puisque notre personnage, Hinako, est loin d'être une vraie guerrière aguerrie. Le titre lui permet tout de même de bénéficier de plusieurs façons d'aborder les combats.

Esquives et contres sont vos meilleurs alliés

Hinako possède deux coups principaux : un faible capable de frapper rapidement et un fort qui pourra être chargé pour infliger de gros dégâts, mais qui met du temps à s'exécuter. Notez que ce dernier coup a également des chances d'étourdir votre cible ce qui peut constituer un avantage certain lors des affrontements. Hinako étant une jeune fille bien en forme, notre protagoniste est également capable de réaliser des esquives face aux coups adverses et de riposter si cette esquive est réalisée pile au moment d'une attaque. Un système de contre est également présent afin de riposter efficacement, mais il vous en coûtera un peu de votre santé mentale...

Savoir quand esquiver et contrer est primordial pour survivre. © Konami / Julian Madiot

La santé mentale est une deuxième barre en plus de la santé et de l'endurance. Votre santé mentale baisse lorsque certains ennemis vous attaque, mais également lorsque vous vous concentrez pour anticiper et contrer les coups adverses. A vous donc de jauger si vous préférez économiser votre santé mentale ou l'utiliser pour anticiper les attaques adverses, sachant que cette barre ne remonte pas automatiquement.

Du RPG dans mon Silent Hill ?

Outre les réflexes du joueur, Hinako peut compter sur son équipement pour parcourir les rues d'Ebisugaoka. L'inventaire, bien que limité, peut comprendre de multiples objets permettant d'influer sur la santé, l'endurance et la santé mentale d'Hinako. Cette dernière est également capable de porter jusqu'à trois armes en même temps et qu'il vous faudra échanger fréquemment du fait qu'elles peuvent se briser. Si l'on ne galère pas trop pour trouver des objets de soin, c'est souvent moins le cas pour les armes qui ne sont pas légion et vous forceront à éviter certains affrontements.

La gestion de vos armes et de leur durabilité peut agacer par moments. © Konami / Julian Madiot

Mais les objets récoltés peuvent également être apportés à des autels pour être convertis en Foi. Cette dernière représente peu ou prou la monnaie du jeu et permet de piocher des petits talismans permettant d'améliorer les aptitudes d'Hinako ou tout simplement d'améliorer ses attributs. De quoi donner envie de relancer notre partie pour améliorer notre personnage à fond ? Nous n'irons pas jusque-là.

Des graphismes corrects pour un level design assez sommaire

Silent Hill f tourne sous un moteur Unreal Engine. Ce dernier parvient à restituer assez fabuleusement la mélancolie qui se dégage de paysages japonais, mais également l'horreur viscérale des environnements d'un jeu Silent Hill. Hélas, nous sommes un peu plus partagés sur le rendu des personnages et leurs animations faciales qui expriment parfois un certain style "vallée de l'étrange".

Ce nouveau Silent Hill f présente deux grands niveaux à explorer. Le premier correspond aux rues et alentours de la ville d'Ebisugaoka et se veut volontairement assez restreint et labyrinthique pour provoquer un ressentiment de perdition chez le joueur. Hélas, en dehors de quelques rizières et d'une école qui fera office de mini donjon, la majorité des environnements explorés se ressemblent fortement. La liberté de mouvement est elle aussi restreinte puisqu'Hinako ne peut pénétrer que dans quelques rares bâtiments pour obtenir davantage d'éléments scénaristiques ou objets cachés.

Les rues d'Ebisugaoka sont très petites. © Konami / Julian Madiot
Et sur Steam Deck, ça donne quoi ? Nous avons pu jouer un peu plus de 3h sur les 8h totales de notre première partie. Sans trop de surprises, Silent Hill f tourne sur le Steam Deck à condition de baisser ses graphismes le plus possible et de diminuer la résolution. Le titre tourne alors correctement autour des 25 à 30 FPS. Pas les conditions idéales donc (surtout que le brouillard se voit complètement absent), mais une option toujours possible.

Une ambiance sonore saisissante et effrayante

La bande-son de Silent Hill f a majoritairement été confiée à l'artiste Kensuke Inage. Ce compositeur est notamment à l'origine des bande-sons de titres comme Tekken, Yakuza ou Dynasty Warriors. Il est cependant épaulé par nul autre que la légende de la saga Silent Hill, Akira Yamaoka, dont plusieurs compositions sont reprises pour ce nouvel opus.

Sans trop de surprises, le travail réparti en Kensuke Inage et Akira Yamaoka se distingue plutôt clairement. Silent Hill f s'en sort plutôt bien concernant les sons retranscrivant l'ambiance d'une campagne vidée de ses habitants. Le jeu excelle plutôt dans les courtes mélodies aux airs doux, presque mélancoliques, qui viennent accompagner une Hinako meurtrie et en proie aux doutes et difficultés. Mention spéciale pour les moments de profond malaise que nous évoquions un peu plus tôt et qui se retrouvent encore plus sublimés par l'ambiance sonore (ou même le silence) qui les accompagne.

Une durée de vie correcte et une rejouabilité bien pensée

Notre première partie en difficulté "histoire" (tant pour l'action que les énigmes) s'est achevée au bout de 8 heures et 20 minutes. Sans être trop allés en ligne droite, nous n'avons pas non plus pris totalement notre temps pour lire l'ensemble des notes à trouver dans la ville. Comptez 1 à 2h supplémentaires si vous cherchez à accomplir les plus hautes difficultés.

Silent Hill f propose plusieurs fins aux joueurs. Si la première est obligatoirement la même pour tout le monde, elle permet néanmoins de relancer l'intérêt concernant l'histoire d'Hinako en dévoilant les conditions pour débloquer les quatre autres fins. Les fans de la saga seront notamment ravis de découvrir l'une d'entre elles.

La première fin de Silent Hill f donnera envie de relancer une nouvelle partie pour en savoir davantage. © Konami / Julian Madiot

Le mode "nouvelle partie +" permet de conserver la majorité des éléments récupérés lors de votre première aventure, mais également de découvrir de nouveaux pans du scénario. Une très bonne idée pour allonger quelque peu la durée de vie totale du titre.

Notre conclusion au test de Silent Hill f

En s'alliant avec un compositeur de légende et un scénariste reconnu, Konami réussit avec brio son pari de transposer l'univers d'une saga culte dans un nouvel horizon aussi original qu'intéressant. Si Silent Hill f est loin d'être parfait, l'opus respecte parfaitement ce qui a fait la renommée de la saga avec son lot de frayeurs, d'interrogations et de mystère qui séduiront les fans de la franchise comme les simples amateurs de jeux d'horreur.

Mais c'est surtout grâce son histoire et ses thèmes que le titre se démarque (à l'image des meilleurs jeux de la saga justement). En abordant la question de la place dans la femme dans la famille et la société japonaise, ce Silent Hill f signe un opus original et maitrisé, loin des horreurs que furent Homecoming ou d'opus plus quelconques comme Downpour ou The Short Message.