Signalements : la vraie histoire du calvaire de Karine Jambu, sauvée par sa tante Laurence au comble de l'horreur
C'est un téléfilm grave qu'a programmé France 2 ce mercredi 20 novembre, lors d'une soirée spéciale consacrée à la journée des droits de l'enfant. Signalements plonge le téléspectateur dans l'histoire à peine soutenable et pourtant vraie de Karine Jambu, fillette maltraitée par ses parents et violée à répétition entre ses 5 et ses 7 ans, au sein même du domicile familial. Réalisé par Eric Métayer, qui avait déjà co-réalisé Les Chatouilles (l'histoire d'Odette, violée elle aussi à 8 ans par un ami de ses parents), le programme s'inspire avec finesse d'un de ces calvaires vécus par de trop nombreux enfants.
Avant Signalements, l'histoire de Karine, née à Rennes en 1997, avait évidemment été relatée dans la presse, au moment d'un procès retentissant. Mais elle a surtout été racontée avec courage par l'intéressée elle même et par sa tante, Laurence Jambu, qui va parvenir à la tirer des griffes de ses bourreaux. Les deux ont écrit un livre, intitulé "Signalements" (Ring, 2019), comme le film qui s'en est inspiré. Il repart du combat de Laurence, cette femme ordinaire propulsée du jour au lendemain dans un cauchemar éveillé.
"La nuit, il venait me chercher dans mon lit"
C'est en effet cette animatrice en école maternelle qui découvrira l'horreur que subissait sa nièce. Dans son livre, elle va décrire ses premiers soupçons envers les parents de Karine dès sa naissance, les signalements de maltraitance aux service sociaux, y compris ceux des sages femmes à la maternité, qui resteront lettre morte. Il y a d'abord la mère de Karine, une femme condamnée quelques années plus tôt pour avoir tué son bébé, issu d'un viol, d'une centaine de coups de couteau.
Puis c'est l'installation de Roland Blaudy dans le foyer familial, cet ami du couple qui va tout faire basculer en 2002. L'individu sort alors de prison où il avait purgé une peine pour agression pédocriminelle. "Régulièrement, il donne de l'argent à la mère ou au père de Karine pour qu'ils puissent aller faire les courses", écrit le site de France 3. Contre une bouteille ou un paquet de clopes, les parents lui "laissent la petite et lui demandent de se taire".
"La nuit, il venait me chercher dans mon lit pour me conduire dans la salle à manger où il dormait, sur le canapé du salon", a écrit Karine dans le livre. "Ma mère sortait parfois de sa chambre pour aller fumer une cigarette et elle me voyait nue à côté de lui." La fillette a alors autant peur de son agresseur que de ses propres parents : "ils me frappaient et m'insultaient, me traitaient de menteuse", raconte-t-elle.

Laurence Brunet-Jambu, la "sorcière"
Signalements raconte alors comment Laurence Brunet-Jambu va mettre toute son énergie pour soustraire la victime à l'emprise de ses parents toxiques et de son violeur. 14 signalements seront nécessaires avant que les choses bougent et que la petite soit arrachée à ce foyer de l'horreur. Karine aura été violée plus de 300 fois, tandis que l'Aide sociale à l'enfance (ASE) était convaincue que les accusations de Laurence étaient celles d'une "menteuse". Face à son insistance, celle-ci sera même traitée d'"emmerdeuse" ou de "sorcière". Deux enquêtes de police seront aussi classées sans suite.
En 2007, Karine va finalement être retirée à ses parents biologiques, Laurence obtenant la garde de l'enfant, qui affichait alors des retards de développement liés aux sévices subis. Il faudra attendre 2018 pour que tout la lumière soit faite sur l'atrocité vécue par la fillette : son violeur sera condamné à 30 ans de réclusion criminelle par la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine. Le père de Karine sera, lui, condamné à 3 ans de prison (dont 30 mois avec sursis) et sa mère à 2 ans.
Laurence Brunet-Jambu ne s'arrêtera pas là. Elle fera condamner l'Etat français pour déni de justice, puis pour faute lourde devant une cour d'appel. Aujourd'hui, elle est présidente de l'association Alexis Danan Bretagne, qui tente de recueillir et accompagner la parole des enfants en justice. Elle continue de dénoncer dans les médias les dysfonctionnements de l'ASE, une institution créée il y a plus de 60 ans et qui n'est plus adaptée selon elle aux enjeux d'aujourd'hui.

Signalements "n'est pas aussi dur que ce qu'on a vécu", dit Karine Jambu
Pour Signalements, Karine et Laurence Brunet-Jambu ont été contactées par la production et ont pu suivre ses préparatifs et son casting. Cécile Bois, connue pour son rôle de Candice Renoir depuis des années, a été choisie pour incarner Laurence Jambu, Odile Vuillemin pour jouer Véronique, la mère de l'enfant, Bruno Solo un cadre de l'ASE aussi froid que sur de lui. Karine est interprétée par Flavie Dachy (entre 9 et 13 ans) et Victoria Eber (ado puis adulte).
Evidemment, Signalements a édulcoré la vérité pour rester regardable. "Le film n'est pas aussi dur que ce qu'on a vécu", a assuré Karine Jambu dans plusieurs titres de presse en marge d'une avant-première. Mais elle tente aujourd'hui de mettre cet horrible passé derrière elle : "Je suis assez détachée de tout ça. C'est mon histoire et elle sera toujours là, en moi. C'est ma vie, ça ne partira jamais mais la douleur n'est plus la même."