Bétharram : les nouvelles déclarations de la fille de François Bayrou, Hélène Perlant

Bétharram : les nouvelles déclarations de la fille de François Bayrou, Hélène Perlant Hélène Perlant, la fille de François Bayrou, révèle avoir été victime de violences dans les années 1980 au sein de Notre-Dame de Bétharram. Elle a justifié ces révélations dans une interview à France Inter, jeudi 24 avril.

"Il ne sait pas que je suis victime et il ne sait pas que je vais témoigner comme victime." La fille de François Bayrou, Hélène Perlant, dont le témoignage dans un livre à paraître faisait craindre des révélations gênantes pour le Premier ministre, a enfin parlé. Dans un entretien exclusif accordé à Paris Match ce mardi 22 avril, celle-ci relate les sévices qu'elle a subis dans les années 1980 et le système pervers mis en place pendant des décennies à Notre-Dame-de-Bétharram, institution religieuse au coeur du scandale depuis plusieurs semaines. La femme de 53 ans aujourd'hui a bel et bien été victime de cette école aux pratiques plus que discutables, mais elle n'en avait pas informé son propre père, accusé d'avoir fermé les yeux voire étouffé le scandale à l'époque.

Hélène Perlant n'a averti le Premier ministre de sa prise de parole et des violences subies alors qu'elle était élève de l'école catholique dans le Béarn que le 22 avril. Une annonce qui a "bouleversé" le locataire de Matignon, selon les termes employés par le journal Le Parisien. "En tant que père de famille, cela me poignarde le coeur, même si c'est une affaire très ancienne. (...) Qu'on ne l'ait pas su et que des dérives de cet ordre aient eu lieu c'est presque insupportable, mais en tant que responsable public qui dépasse le père de famille c'est aux victimes que je pense", a-il déclaré.

"Je voulais me faire recenser comme victime"

Jeudi 24 avril, elle s'est à nouveau exprimée dans la matinale de France Inter, affirmant que François Bayrou "est le père d'une victime, ce qu'il ne savait pas". "J'ai été obligé de lui dire parce que Le Canard enchaîné l'a contacté. On avait l'intention de ne pas le dire", poursuit-elle. Elle a également justifié ses révélations : "Je voulais me faire recenser comme victime, une victime parmi d’autres et fille du Premier ministre", explique-t-elle. 

Le témoignage de la fille de François Bayrou, qui figure dans le livre "Silence de Bétharram" (ed. Michel Lafon) d'Alain Esquerre, porte-parole du collectif des victimes de l'école, décrit des actes d'une violence inouïe. Prise en grippe par le père Lartiguet, mort en 2000, et une religieuse lors d'un camp d’été dans les Pyrénées, elle explique avoir un jour été "rouée de coups de poing, de coups de pied sur tout le corps" par le premier, à l'âge de 14 ans. "Toi, la fille Bayrou, insolente comme ton père !", lâchait le prêtre à Hélène Perlant comme elle le raconte dans le livre à paraitre jeudi 24 avril quand la religieuse mentionnée est dépeinte comme une personne avec "quelque chose de sadique, de très malveillant, une vraie méchante, qui a voulu se venger".

"Dans cette colo, on était une quarantaine, moniteurs inclus. Un soir, alors qu'on déballe nos sacs de couchage, (le père) Lartiguet me saisit tout d'un coup par les cheveux, il me traîne au sol sur plusieurs mètres et me roue de coups de poing, de coups de pied sur tout le corps, surtout dans le ventre. Il pesait environ 120 kilos", peut-on lire dans Paris Match. "Pour parler crûment, je me suis uriné dessus et suis restée toute la nuit, comme ça, humide et prostrée dans mon duvet", poursuit-elle. "Lartiguet ne s'excuse pas, il n'est pas en colère, il n'est pas gêné, j'entends juste : 'Elle s'arrêtera peut-être de sourire ?'", poursuit-elle.

"Pleine d'ecchymoses", la jeune fille de l'époque se souvient d'"acouphènes sévères" après l'agression. "Je vais en balade avec les autres en jurant que je ne suis pas cassée, que je ne suis pas sa victime, et je me jure que je sourirai deux fois plus", indique celle qui a décidé d'évacuer ce traumatisme. La pression de l'institution organisée "comme une secte ou un régime totalitaire", et la peur d'être prise pour une menteuse, comme beaucoup d'autres petits victimes, feront le reste. Hélène Perlant l'assure : jusque là, elle n'avait jamais rapporté la moindre scène de violences aperçue ou subie en lien avec Bétharram.

 "J'ai peut-être voulu le protéger, inconsciemment"

La plainte contre François Bayrou pour non-dénonciation de crimes et délits initiée par "R.", un ancien élève de Bétharram, affirmant que sa fille avait forcément raconté l'agression physique dont il était victime et dont Hélène Perlant a été témoin auprès de son père n'avait finalement rien changé. "En fait, ce moment-là m'a fait revivre avec effroi mon propre passage à tabac, quatre ans auparavant. L'agression à l'étude, la mienne et tant d'autres ont été vues par nous tous et pourtant personne n'a parlé. Ni les témoins ni les victimes", assure-t-elle.

"On ne témoigne pas pour exposer nos stigmates mais pour expliquer le système Bétharram, maintenant que nous entre anciens élèves on commence à le comprendre et à se soutenir les uns les autres. On montre comment ces déchaînements de violence publics sont la condition paradoxale pour que personne ne parle jamais", abonde la fille du Premier ministre. Hélène Perlant explique être restée trente ans dans le silence pour avoir "peut-être" voulu "protéger inconsciemment" son père "des coups politiques qu'il se prenait localement". 

Hélène Perlant n'élude aucun sujet, pas même l'enquête sur la première plainte pour viol visant un religieux de Bétharram, dans laquelle François Bayrou est cité pour être intervenu dans l'affaire, ce dernier a fermement démenti. "Evidemment, on peut penser qu'il a eu toutes les infos. Mais lui, comme les autres parents, était très, très intriqué politiquement, localement. Lui, davantage. Mais je le mets au même niveau que tous les parents. Plus on est intriqué, moins on voit, moins on comprend. Et plus il y a de témoins, moins ça parle", juge-t-elle chez Paris Match. François Bayrou nie avoir eu connaissance des agressions physiques et sexuelles dénoncées par environ 200 anciens élèves de l'établissement béarnais.

Dernières mises à jour

21:35 - "Il est le père d'une victime, ce qu'il ne savait pas", affirme-t-elle à propos de François Bayrou

 "J'ai été obligé de lui dire parce que Le Canard enchaîné l'a contacté. On avait l'intention de ne pas le dire", affirme Hélène Perlant, qui assure que son père François Bayrou "ne savait pas". "Il est le père d'une victime, ce qu'il ne savait pas", défend-elle.

20:40 - "Je voulais me faire rescenser comme victime"

Hélène Perlant était interviewée dans la matinale de France inter ce jeudi.

"Je voulais me faire recenser, dire 'j'en suis de Bétharram', je vais pouvoir parler avec eux, victime quelconque, une victime parmi d'autres et fille du Premier ministre", raconte-t-elle. "J'ai passé toute ma vie à effacer ce nom, à en changer, mais on a réfléchi avec Alain, je vais poser ce nom-là et le dire, parce qu'il y a quelque chose qui me fait souffrir, beaucoup, c'est d'entendre" les souffrances des collégiens de Bétharram,c onfie-t-elle.

"Découvrir qu'à dix mètres de nous, il y a ces enfants battus, agressés sexuellement tous les jours, torturés dans le froid, la nuit, ces horreurs au milieu de nous, découvrir qu'il y a ça à côté de nous et ne l'avoir pas vu, on est tous abîmés, indépendamment du fait qu'on ait été directement victime ou pas", déplore-t-elle.