Cytotec : quels sont les dangers du médicament qui fait scandale ?

Cytotec : quels sont les dangers du médicament qui fait scandale ? CYTOTEC - Alors qu'il est prescrit pour soigner l'ulcère à l'estomac, le Cytotec est en fait largement utilisé dans le cadre d'accouchements ou d'avortements. Mais son usage n'est pas sans risque pour la mère et l'enfant. Il va être retiré du marché.

[Mis à jour le 19 octobre 2017 à 12h10] Le Cycotec sera retiré du marché le 1er mars 2018, informe ce jeudi le Dr Christelle Ratignier-Carbonneil, directrice générale adjointe de l'Agence du médicament ANSM, à l'occasion des sixième Etats généraux organisés à Paris. Une bonne nouvelle tant ce médicament était détourné de son usage initial et surtout de plus en plus considéré comme dangereux pour les patients qui y avaient recours. Largement utilisé dans la gynécologie obstétrique, que ce soit pour faciliter l'IVG ou pour le déclenchement artificiel de l'accouchement à terme, le Cytotec est en fait à la base un traitement contre les ulcères d'estomac. "Le Cytotec, sur le marché depuis 1987, est très peu utilisé en gastroentérologie et l'est majoritairement en gynécologie", confirme l'ANSM.

Un enfant a frôlé la mort en 2010

Des usages détournés qui ne sont pas sans risques pour la mère et l'enfant, souvent victimes de surdosage. Ce médicament "suppose d'utiliser un huitième du comprimé qui est dosé à 200 microgrammes, ce qui vu sa taille (moins d'un centimètre) est pour le moins hasardeux", indique le Dr Thierry Harvey, gynéco-obstétricien, relayé par l'AFP. Des surdosages qui peuvent avoir des conséquences dramatiques comme celle qu'a connue Aurélie Joux, fondatrice de l'association Timéo (du prénom de son enfant "né sous Cytotec" en novembre 2010) qui a milité pour l'interdiction du Cytotec.

L'usage du Cytotec avait provoqué de sévères contractions pour la mère mais aussi une rupture utérine et une privation d'oxygène pour l'enfant, qui subit aujourd'hui encore de graves troubles neuromusculaires. "Mon fils est resté entre la vie et la mort plusieurs jours, j'ai eu l'utérus complètement déchiré,  je ne pourrai plus avoir d'autre enfant. Ce n'est pas possible de faire vivre cela à des femmes", déplore Mme Joux. Un procès est en cours, visant à faire reconnaître la responsabilité du CHI de Poissy, lieu de l'accouchement. Le tribunal administratif a d'ailleurs condamné l'hôpital à indemniser la famille mais le centre hospitalier a fait appel.

Le Cytotec, administré normalement par voie orale, contient du misoprostol, une molécule qui appartient à la famille des prostaglandines. "Le misoprostol est un super produit qui rend de réels services",  souligne le Dr Harvey, dans le cas d'une utilisation pour les fausses couches spontanées. Mais c'est le recours au Cytotec par voie vaginale pour déclencher l'accouchement à terme d'un enfant viable et les risques graves que cela comporte pour la santé de la mère et de l'enfant qui est un  "scandale", estime l'association Timéo.

Les hôpitaux auraient pu éviter le Cytotec

Alors pourquoi le Cytotec, commercialisé par Pfizer, est-il favorisé alors qu'il existe d'autres médicaments similaires ? Le Gymiso, de Linepharma, possède le même taux de misoprostol mais n'a pas été déclaré comme dangereux, il pourrait donc être utilisé dans le même cadre que le Cytotec. Mais la différence se situe au niveau du prix et elle est vertigineuse : le comprimé de Cytotec coûte 0,30 euro contre... 12 euros pour celui de Gymisio ! 

Un retrait du marché prévu en mars prochain est qualifié de "bonne nouvelle" par Alain-Michel Ceretti, fondateur de l'association Le lien, qui soutient les victimes d'erreur médicale. "Mais l'affaire du Cytotec révèle la faiblesse de l'autorité de l'Etat en matière de sécurité sanitaire, un problème au centre des Etats généraux" juge-t-il. Le Cytotec, avait déjà fait fait l'objet d'une mise en garde par l'Agence du médicament en 2013, mais sans provoquer de mesures du gouvernement. "Il faut modifier la loi pour pouvoir interdire des pratiques identifiées comme dangereuses", ajoute M. Ceretti. (Avec AFP)