Serge D.-G. et Michaël B. : un des blessés de Sainte-Soline est sorti du coma

Serge D.-G. et Michaël B. : un des blessés de Sainte-Soline est sorti du coma SAINTE-SOLINE. Jeudi 30 mars, l'un des deux blessés de Sainte-Soline, Michaël B. est sorti du coma. Le pronostic vital de Serge D.-G. est toujours engagé. La Défenseure des droits s'est saisie de leur cas pour faire la lumière sur l'origine de leurs blessures.

[Mis à jour le 30 mars 2023 à 23h14] Cinq jours après la manifestation contre le projet de méga-bassines à Sainte-Soline, Serge D.-G., âgé de 32 ans, est toujours dans le coma, jeudi 30 mars. Son pronostic vital est toujours engagé, a annoncé le mouvement Les Soulèvements de la Terre, jeudi 30 mars, à l'occasion de rassemblements "contre la répression à Sainte-Soline" et "contre les violences policières". Benoît Feuillu, porte-parole du mouvement, a indiqué que le deuxième manifestant, gravement blessé, Michaël B., 34 ans, était sorti du coma. Plus tôt dans la journée, la mère du militant avait affirmé à BFM TV que son fils pourrait prochainement sortir de son coma artificiel. Elle avait aussi exprimé ses inquiétudes quant au fait que son fils puisse garder des séquelles de sa blessure à la gorge, qui a nécessité une opération de trois heures.

Les deux blessés se sont retrouvés dans un état grave à l'issue de la mobilisation près de la méga-bassine de Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres, samedi 25 mars. Les coups qu'ils ont reçus ont probablement causé leur état, mais les auteurs de ces blessures sont toujours inconnus. Des tirs de LBD semblent toutefois être à l'origine des coups. Les familles ont porté plainte pour "tentative de meurtre" et "entrave au secours" et accusent les forces de l'ordre. Alors que les investigations ont été confiées à l'IGGN, l'Inspection générale de la Gendarmerie nationale, la Défenseure des droits a annoncé se saisir, jeudi 30 mars, des cas des deux blessés. Par la voix de Claire Hédon, l'institution indépendante explique s'être saisie de cette affaire "au regard de la gravité des blessures occasionnées, possiblement par des armes de force intermédiaire, dans un contexte de manifestations", rapporte Franceinfo.

Jeudi 30 mars au soir, le mouvement Les Soulèvements de la Terre a revendiqué plus de 167 rassemblements en France pour protester contre la répression policière envers les manifestants. Ces rassemblements, qui ont eu lieu devant plusieurs préfectures, ont également apporté leur soutien aux blessés lors des manifestations à Sainte-Soline. 

​​​Des plaintes déposées par les familles de Serge D.-G. et Michaël B.

Les familles de Serge D.-G. et de Michaël B. ont déposé plainte pour "tentative de meurtre" et "entrave aux secours", mercredi 29 mars. Les parents des militants ont dénoncé les coups portés aux manifestants, qui selon elles sont du fait des forces de l'ordre, et la tardive prise en charge des deux blessés. Ils ont également déposé plainte pour "divulgation de fichiers secrets" en référence aux révélations faites sur les casiers judiciaires des manifestants.

Plusieurs procédures ont été lancées par le parquet de Rennes, spécialisé dans les affaires militaires, en réponse aux plaintes, mais plus largement pour établir la vérité sur ce qu'il s'est passé à Sainte-Soline, le samedi 25 mars. "Les investigations ont été confiées à l'Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN) sous les qualifications de violences (avec incapacité totale de travail supérieure à huit jours) par personne dépositaire de l'autorité publique et de non-assistance à personne en péril (pour l'un d'eux)", a précisé le procureur au Monde. Les enquêtes doivent déterminer la nature et les auteurs de coups. Elles doivent aussi faire la lumière sur les modalités de la prise en charge médicale des deux hommes par les secours.

Qui est Serge D.-G., militant d'ultragauche blessé à Sainte-Soline ?

Âgé de 32 ans, Serge D.-G. est un militant aguerri de l'ultragauche. Ses parents ne nient pas l'appartenance de leur fils à la mouvance anticapitaliste ou sa proximité avec la gauche radicale, mais assurent que ces attaches politiques ne font pas du militant un homme dangereux. "Oui, Serge a participé à de nombreux rassemblements anticapitalistes - comme des millions de jeunes dans le monde qui pensent qu'une bonne révolution ne serait pas de trop" et "oui, Serge a eu des problèmes judiciaires comme beaucoup de gens qui se battent aujourd'hui contre l'ordre établi. [...] Nous considérons qu'il ne s'agit là nullement d'actes délictueux qui saliraient notre fils, mais que ces actes sont au contraire tout à son honneur", écrivent-ils dans un communiqué. Quant au fait d'être fiché S, les parents rappellent que "beaucoup de militants" le sont.

Serge D.-G. a participé à de nombreuses manifestations et certaines mobilisations plus virulentes lui ont valu des problèmes judiciaires et un séjour de deux mois en détention provisoire en 2011 : l'homme avait participé au saccage des locaux de la Protection judiciaire de la jeunesse à Labège, commune limitrophe de Toulouse. D'autres combats du militant qui s'assume comme étant anticapitaliste l'ont mené à participer aux actions sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes ou encore au G7 de Biarritz. C'est pour ce militantisme que Serge D.-G. est fiché S par les services de renseignements depuis 2010.

Il n'y a pas que pour ses combats militants que Serge D.-G. est investi, selon ses proches. L'homme est un amoureux de la nature empreint d'un grand humanisme. Celui qui exerce en tant que guide et accompagnateur en moyenne montagne est "reconnu comme un professionnel passionné et passionnant, brave et humble, engagé pour le respect de la nature et de l'être humain, profondément altruiste, impliqué dans le partage de cet amour de nos montagnes et de nos terres avec chacun" par ses collègues guides corses comme l'écrit France 3. C'est bien sur l'île de beauté que le militant travaille une partie de l'année quand il ne sillonne pas le Pyrénées proches de Toulouse, où il vit.

Michaël B., des antécédents avec les Gilets jaunes

La mobilisation à Sainte-Soline n'était pas la première manifestation à laquelle cet habitant du Loir-et-Cher âgé de 34 ans participait. Également connu des services de renseignements selon les informations du Parisien, il s'est fait remarquer pour de la vente de stupéfiants d'après les précisions de BFMTV. Michaël avait aussi été repéré lors des manifestations des Gilets jaunes dans lequel des mouvances d'ultragauche avaient été vues. Mais le profil d'un militant radical dressé pour décrire le trentenaire ne correspond pas à la réalité, selon la mère du blessé. "Ce qu'il aime, c'est chanter avec les autres, soutenir. Il est pacifiste, ce n'est pas un black bloc", a-t-elle assuré au micro de BFMTV. Jeudi 30 mars, dans l'attente du réveil du trentenaire, la maman a encore assuré que son fils "n'est pas un casseur" mais a simplement "une grande gueule pour chanter, c'est tout."

Les blessés de Sainte-Soline entre la vie et la mort ?

Si des nouvelles rassurantes ont été rapportées concernant l'état de Michaël B., le second manifestant se trouve toujours dans un état critique. Après s'être présenté de lui-même, mais sous X au CHU de Poitiers, Michaël B. a subi une "opération du cerveau" selon sa mère et a été placé dans un coma artificiel. Son état de santé se serait amélioré, le pronostic vital ne serait plus engagé depuis la journée du mardi 28 mars et l'homme pourrait se réveiller dans les prochains jours.

Serge D.-G. est, lui, toujours placé dans le coma entre la vie et la mort. Trouvé inerte à proximité des zones d'affrontements à Sainte-Soline, samedi après-midi, l'homme de 32 ans a été pris en charge par un médecin de la gendarmerie avant d'être transféré au centre hospitalier de Poitiers dans un état grave. L'état du trentenaire se serait stabilisé le 28 mars selon les activistes du mouvement des Soulèvements de la Terre, mais son pronostic vital est toujours engagé.

La Samu a-t-il pu prendre en charge Serge D.-G. et Michaël B. à Sainte-Soline ?

C'est la question qui suscite le débat et elle soulève un autre point : le coma des deux homme aurait-il pu être évité ? Les organisateurs de la manifestation de Sainte-Soline et la Ligue des droits de l'homme (LDH) qui avait mandaté des observateurs sur place assurent que les forces de l'ordre ont interdit l'intervention de secours et tentent d'apporter des preuves de ce qu'ils avancent avec un enregistrement audio dévoilé par Le Monde. Lors d'une discussion entre les membres de la LDH et le Samu, les secours reconnaissent : "On a eu un médecin sur place et on lui a expliqué la situation. On n'enverra pas d'hélico ou de Smur sur place, parce qu'on a ordre de ne pas en envoyer par les forces de l'ordre".

Accusée d'avoir fait obstruction à la prise en charge des blessés, la Préfète des Deux-Sèvres s'est défendue dans un communiqué expliquant le principe de ne pas faire intervenir les secours dans des zones hostiles, aussi appelées "zone d'exclusion" pour garantir leur propre sécurité : "Il appartient aux forces de l'ordre, informées en temps réel de la situation, de définir si l'arrivée d'un véhicule de secours à un certain point est possible ou non de façon sûre pour lui. Il n'est donc pas surprenant que, si ces conditions de sécurité n'étaient pas réunies, les forces de l'ordre aient pu, pour certaines géolocalisations et dans certaines périodes, indiquer qu'un envoi d'ambulance n'était pas possible dans l'immédiat".

C'est donc parole contre parole. "Il n'y a pas eu de barrages de gendarmerie pour empêcher les secours", a toutefois soutenu le chef du pôle urgences du centre hospitalier de Niort, Farnam Faranpour dans les colonnes de France 3. Renouvelant les explications sur les zones d'exclusion interdites aux secours et revenant sur la prise en charge de Serge D.-G., il a indiqué : "Il y a eu un premier appel aux pompiers qui sont partis, mais la géolocalisation n'a pas permis de trouver le lieu. Donc, nous avons attendu d'autres appels pour préciser le lieu et nous avons finalement envoyé le SMUR de Ruffec qui était le plus proche des lieux". La préfecture a tenu à préciser sur ce point le "rôle essentiel" d'un médecin de la gendarmerie "qui a porté secours à un participant blessé en urgence absolue, au milieu d'un groupe d'opposants agressifs" dans l'attente de l'arrivée du SAMU.