Mohammed Mogouchkov : l'auteur de l'assassinat du professeur d'Arras radicalisé, fiché S et suivi par la DGSI

Mohammed Mogouchkov : l'auteur de l'assassinat du professeur d'Arras radicalisé, fiché S et suivi par la DGSI Mohammed Mogouchkov, l'auteur présumé de l'assassinat d'un professeur à Arras, est toujours en garde à vue mais ne s'est pas exprimé sur ses motivations ou un éventuel complice dans la préparation de l'attentat. Les enquêteurs s'intéressent à ses liens avec l'islam radical.

[Mis à jour le 16 octobre 2023 à 17h14] Il n'a toujours rien dit quant à ses motivations. Mohammed Mogouchkov, l'auteur présumé de l'assassinat du professeur Dominique Bernard au lycée Gambetta-Carnot d'Arras (Pas-de-Calais), est en garde à vue depuis le vendredi 13 octobre. Neuf autres personnes, proches ou ayant été en contact avec l'assaillant, ont également été placées en garde à vue.

Le caractère terroriste de l'attaque au couteau au lycée d'Arras ne fait pas de doute. Pour preuve ,le parquet national antiterroriste s'est immédiatement saisi de l'affaire et a ouvert une enquête pour les chefs d'"assassinat en relation avec une entreprise terroriste", de "tentative d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste" et d'"association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d'atteinte aux personnes". Le passage à l'acte de l'assaillant, fiché S pour radicalisation, semble toutefois soudain. Mohammed Mogouchkov a-t-il agi sur un coup de tête ou préparé son attaque dans la plus grande discrétion ? Et a-t-il été influencé ou aidé pour son entreprise terroriste ? Des questions auxquelles les enquêteurs tentent de répondre.

Une surveillance étroite de la DGSI

Mohammed Mogouchkov est un ancien élève du lycée dans lequel il a assassiné une personne et blessé trois autres. Etudiant en BTS, il est fiché S pour radicalisation depuis le 11 octobre, mais faisait l'objet d'une surveillance étroite de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) depuis le mois de juillet. Le jeune homme, qui était sur écoute, a d'ailleurs été contrôle par les enquêteurs la veille de son passage à l'acte "pour vérifier s'il n'avait pas d'arme sur lui", et pour "regarder son téléphone, et notamment les messageries cryptées", a fait savoir le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin au 20 Heures de TF1 le vendredi soir. Mais rien ne laisser présager qu'une attaque terroriste était en préparation.

Selon les services français, Mohammed Mogouchkov est né en Russie, dans la république d'Ingouchie à majorité musulmane, et est arrivé en France avec sa famille en 2008 alors qu'il n'avait que 5 ans. La famille a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en 2014 sans que la procédure n'aboutisse. Le père de l'assaillant d'Arras a finalement été expulsé en 2018, mais son fils ne pouvait légalement l'être à son tour, car entré sur le sol français avant l'âge de 13 ans. Plusieurs membres de la famille de l'assaillant ont été placés en garde à vue le 13 octobre : sa mère, sa sœur, son oncle et deux de ses quatre frères, dont l'un purge une peine de cinq ans de prison pour "association de malfaiteurs terroristes". L'aîné de Mohammed Mogouchkov a été arrêté en 2019 par la DGSI après un projet attentat contre l'Elysée déjoué et pour des faits d'apologie du terrorisme.

Mohammed Mogouchkov sous influence d'un défenseur du djihad ?

Une des personnes gardée à vue est un homme de 32 ans converti à l'islam et fervent défenseur du djihad armé, un certain Maxime C., selon Le Parisien. Détenu dans la prison de l'Allier, le prisonnier n'a échangé que virtuellement avec Mohammed Mougochkov, mais leur dernière conversation remonte aux heures précédant l'attaque. L'assaillant a-t-il été influencé ou poussé à passer à l'acte par les parole du détenu ? Et comment les deux hommes sont-ils entrés en contact ? L'enquête doit le déterminer.

Si le passage à l'acte de l'assaillant a pu être incité par un tiers, il pourrait aussi avoir un lien avec la situation au Proche-Orient où le groupe islamiste palestinien du Hamas est en guerre contre Israël depuis une attaque du 7 octobre. "D'après nos informations, il y a sans doute un lien entre ce qui s'est passé au Proche-Orient et le passage à l'acte" a déclaré le ministre de l'Intérieur au 20 Heures de TF1. Le procureur de la République antiterroriste a de son côté simplement indiqué que "plusieurs témoins ont entendu le mis en cause crier 'Allahu Akbar'" au moment des faits et lors de son interpellation par les forces de police.

L'assaillant "aguerri" à la recherche d'un prof d'histoire

Pour l'instant, les motifs exacts du geste de Mohammed M. n'ont pas été dévoilés. Acte à caractère purement terroriste, ressentiment envers son ancien lycée, le corps enseignant ou le professeur visé en particulier ? Un professeur de sport du lycée interrogé par la Voix du Nord, qui a été l'enseignant de l'assaillant il y a trois ans, a en tout cas évoqué "un élève solitaire, avec lequel on pouvait parler mais qui était renfermé". D'autres témoignages d'enseignant ont en revanche dépeint un élève montrant des signes de "dérives radicales", comme ses frères précédemment scolarisés dans l'établissement.

Un autre professeur, de philosophie cette fois, a livré un semblant de piste. Alors qu'il assistait à la scène, il explique avoir essayé d'intervenir mais a été poursuivi par l'assaillant qui lui aurait demandé s'il était professeur d'histoire-géographie. C'est aussi la discipline qu'enseignait Samuel Paty, assassiné il y a tout juste trois ans ou presque devant son collège de Conflans-Sainte Honorine. Un cours sur la liberté d'expression, dans le cadre d'un cours d'éducation morale et civique, qui dépend notamment des profs d'histoire, avait été à l'origine du geste de l'assaillant...

Si les motivations et le mode opératoire de l'attaque restent à préciser, la détermination de l'assaillant ne pas fait pas ou peu de doute. Une source policière a d'ailleurs décrit auprès de BFMTV un jeune homme "intelligent" et "aguerri" dont les gestes auraient été "précis et méthodiques" lors de l'assassinat du professeur Dominique Bernard.