Boualem Sansal condamné puis gracié ? Le coup politique qui peut s'envisager

Boualem Sansal condamné puis gracié ? Le coup politique qui peut s'envisager Ce jeudi 27 mars, Boualem Sansal, emprisonné en Algérie, a été condamné à 5 ans de prison ferme. Cependant, il pourrait bénéficier d'une grâce présidentielle.

L'écrivain Boualem Sansal, emprisonné en Algérie depuis le 16 novembre dernier, était poursuivi pour "atteinte à l'unité nationale, outrage à corps constitué, pratiques de nature à nuire à l'économie nationale et détention de vidéos et de publications menaçant la sécurité et la stabilité du pays". Il lui est notamment reproché d'avoir pris position pour le Maroc dans un média français réputé d'extrême droite.

Le parquet algérien avait alors requis dix ans de prison ferme, mais il a finalement écopé d'une condamnation à 5 ans de prison ferme et à une amende de 500 000 dinars (3 470 euros) ce jeudi 27 mars. Boualem Sansal, qui avait nié toutes les accusations à son encontre, peut encore décider de faire appel de cette décision, mais le parquet également.

Si ce n'est pas le cas, une autre solution pourrait s'offrir à l'écrivain. Selon une source proche du dossier à l'AFP, cette peine permet à l'État algérien de "sauver la face tout en laissant la porte ouverte à une éventuelle grâce présidentielle". Selon certaines analyses avancées par des observateurs, cette grâce du président algérien Abdelmadjid Tebboune pourrait même intervenir rapidement soit ce week-end pour la fin du ramadan ou dans quelques mois, notamment le 5 juillet, date des grâces traditionnelles de la fête de l'Indépendance algérienne. "Qu'importe la condamnation, nous espérons une grâce présidentielle", avait réagi juste avant le verdict, sur franceinfo, Kamel Bencheikh, poète franco-algérien et ami de Boualem Sansal. Selon lui, la rapidité du jugement, survenant quatre mois après l'arrestation, est un bon signe, car, pour obtenir une grâce présidentielle, il faut que la condamnation définitive soit prononcée. Ce dernier a aussi évoqué les deux dates clés à venir, possibles pour une telle décision.

Un état de santé inquiétant 

"Son âge et son état de santé rendent chaque jour d'incarcération plus inhumain encore. J'en appelle au président algérien : la justice a failli, qu'au moins l'humanité prévale", a écrit l'avocat de l'accusé, Me Zimeray, sur X, faisant à son tour allusion à une possible grâce par le chef de l'État. L'écrivain est, en effet, âgé de 80 ans et atteint d'un cancer. Kamel Bencheikh assure d'ailleurs n'avoir "aucune nouvelle" de l'état de santé de son ami.

En France, les appels pour la libération de l'écrivain ont été nombreux. Un rassemblement de soutien a eu lieu ce mardi 25 mars à Paris devant l'Assemblée nationale. Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, était présent tout comme les présidents de l'Assemblée et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher.

Emmanuel Macron avait aussi soutenu la libération de l'écrivain. "J'ai confiance dans le président Tebboune et sa clairvoyance pour savoir que tout ça n'est pas sérieux et qu'on a affaire à un grand écrivain, qui plus est malade". Le chef de l'Etat algérien pourrait saisir cette occasion pour faire un coup politique : alors qu'une crise diplomatique très vive est ouverte entre la France et l'Algérie depuis quelques mois, une grâce serait perçue comme un geste de bonne volonté et d'apaisement - sans qu'Alger n'ait à perdre la face. Abdelmadjid Tebboune rappelle d'ailleurs régulièrement aux médias algériens qu'il entretient de bons rapports avec Emmanuel Macron. Il pourrait donc prendre au mot le président français. Mais dans ce contexte de bras de fer, cette décision pourrait aussi dépasser le chef de l'Etat algérien.